À l'approche de la Coupe d'Afrique des nations au Maroc, le conflit récurrent entre clubs européens et sélections africaines refait surface, exacerbé par une décision de la FIFA limitant la mise à disposition des joueurs à sept jours avant la compétition continentale. Face à cette situation, la CAN pâtit une fois de plus de la domination des clubs européens et de la faiblesse politique de la CAF, compromettant la préparation des équipes africaines. À quelques semaines de la Coupe d'Afrique des nations organisée au Maroc, le vieux conflit entre clubs européens et équipes nationales africaines a refait surface. La FIFA a fixé une mise à disposition des joueurs réduite à sept jours, après une réunion avec l'Association des clubs européens (ECA). Une décision qui crispe de nouveau le continent et fragilise la préparation des sélections. Un scénario bien connu, que regrettent les journalistes sportifs interrogés. Pour Hanif Ben Berkane, journaliste à Footmercato, le feuilleton est devenu presque banal : «C'est toujours le même discours et les mêmes polémiques. Les années passent et la CAF peine toujours à vraiment se faire respecter. Les conditions de préparation de la CAN ne sont jamais les mêmes qu'un Euro ou un Mondial.» Il reconnaît le poids du calendrier européen, en pleine saison, mais estime que le problème est plus profond : «Même si la CAN se jouait l'été, on aurait encore des soucis. Quand ce ne sont pas les clubs qui freinent, c'est la FIFA qui cède devant eux. Le seul point positif, c'est que certains entraîneurs commencent à réagir et dénoncent la situation.» Faiblesse de la CAF face à la FIFA Said Abadi, journaliste à Canal+, voit également dans cette décision un manque de considération pour la CAN : «Cette polémique revient avant chaque édition. C'est dommageable car cela montre que l'on ne respecte pas assez la plus prestigieuse des compétitions africaines.» Il pointe une CAF trop faible face à la FIFA : «Si la Confédération avait une voix plus forte, ce débat n'existerait plus. Le calendrier de la CAN est régulièrement bouleversé : cette année, il a été décalé en hiver à cause de la nouvelle Coupe du monde des clubs, alors que jouer l'été aurait été idéal pour le Maroc et les clubs.» Pour lui, les conséquences sont concrètes : «Les sélections ne peuvent pas se préparer correctement : moins d'entraînements, pas de matchs amicaux… Certaines avaient déjà réservé leurs hôtels au Maroc. Encore une 'disasterclass' dont l'Afrique se serait bien passée.» Reda Allali, journaliste marocain, qui officie notamment dans l'émission La Bombonera sur Radio 2M, la tension dépasse le cadre africain. «Il y a aujourd'hui une véritable guerre entre le football des nations et les clubs européens, qui considèrent les joueurs comme leurs employés et sont dérangés par les trêves internationales.» Un système à bout de souffle ? Selon lui, même les stars participent à cette défiance : «On a vu Kylian Mbappé qui choisit ses matchs parce que jouer en Azerbaïdjan le dérange, Kevin De Bruyne qui dit que la Ligue des nations est inutile alors qu'il doit affronter les Pays-Bas… Ces prises de position auraient été inimaginables il y a quelques années.» Derrière ces déclarations, Reda Allali pointe un malaise général. «Ils se plaignent de plus en plus du nombre de matchs. Le football se mange lui-même. Il s'auto-détruit en multipliant les compétitions sans jamais s'arrêter.» Au-delà du cas de la CAN, les trois journalistes semblent s'accorder : l'inflation des compétitions, la pression économique et la toute-puissance des clubs européens pèsent désormais sur le football de sélection. La CAN, elle, continue de payer la faiblesse politique de la CAF et un calendrier mondial structuré autour de l'Europe. Tant que cette architecture ne bougera pas, le même conflit ressurgira. Pour l'instant, les sélections africaines devront composer avec une préparation express. Le Maroc aussi.