La majorité démocrate du Congrès des Etats-Unis accentue ses initiatives pour contraindre le président George Bush à renoncer à son projet d'augmentation des effectifs militaires américains déployés en Irak. John Murtha, qui préside la commission chargée des dépenses militaires à la Chambre des représentants, a présenté un dispositif encadrant le financement de la guerre qui reviendrait dans les faits à stopper le déploiement des 21.500 soldats promis en renfort par Bush. Au Sénat, le chef de file démocrate, Harry Reid, a inscrit à l'ordre du jour de la chambre haute un nouveau vote samedi sur la politique irakienne de l'administration républicaine. Ces initiatives coïncident avec la publication d'un nouveau sondage selon lequel l'idée d'un rapatriement le plus tôt possible des soldats déployés en Irak est partagée par 53% des Américains, cinq points de plus qu'il y a un mois et un niveau jamais atteint depuis le début de la guerre, en mars 2003. George Bush a réclamé du Congrès le déblocage d'une enveloppe budgétaire d'urgence de 93,4 milliards de dollars pour financer la poursuite des opérations militaires en Irak. "Nos hommes et nos femmes en uniforme comptent sur leurs représentants élus pour leur fournir le soutien dont ils ont besoin pour accomplir leur mission", a-t-il dit jeudi à Washington. "Les républicains et les démocrates ont la responsabilité de fournir à nos troupes les ressources dont ils ont besoin", a-t-il insisté. Mais l'argument ne convainc pas les parlementaires de plus en plus nombreux, dans les rangs démocrates comme républicains, à juger que la stratégie irakienne de la Maison blanche est un échec. "IMPENSABLE" Le plan exposé par John Murtha revient à soumettre le déblocage des fonds à quatre conditions que l'administration ne pourrait être en mesure de respecter: 1. le Pentagone devrait certifier que les troupes en cours de déploiement en Irak sont "totalement prêtes pour le combat", et qu'elles ont notamment reçu l'entraînement et l'équipement nécessaires; 2. chaque soldat devrait disposer d'un délai minimal d'un an aux Etats-Unis entre deux missions de combat; 3. aucune mission de combat ne pourrait excéder une durée d'un an; 4. le Pentagone devrait mettre un terme au dispositif dit de "stop-loss" qui lui permet de prolonger l'engagement des soldats. "Ils ne seront pas en mesure de continuer. Ils ne seront pas en mesure d'accomplir ce déploiement. Ils n'auront pas les équipements nécessaires, la formation nécessaire", a expliqué Murtha. Ancien combattant de la guerre du Viêtnam, l'élu démocrate de Pennsylvanie avait appelé dès novembre 2005 au retrait immédiat des forces américaines d'Irak. Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, a déclaré à un petit groupe de journaliste qu'aucune décision définitive n'avait été prise sur l'opportunité de voter un texte contraignant pour l'administration. Mais, rapporte le Washington Post, elle a apporté son soutien aux principales propositions avancées par Murtha, dont ses conditions sur les périodes de repos entre deux missions de combat et ses exigences en matière d'entraînement des troupes. Pour John Boehner, qui dirige le groupe républicain à la Chambre des représentants, les propositions de Murtha sont inacceptables. "Alors que des soldats américains combattent des terroristes islamistes radicaux à des milliers de miles d'ici, il est impensable que le Congrès des Etats-Unis discrédite leur mission, interrompe leurs renforts et les prive des ressources dont ils ont besoin pour réussir et rentrer sain et sauf à la maison", a-t-il dit. Une résolution non contraignante hostile au déploiement des 21.500 soldats promis en renfort par Bush devrait être adoptée vendredi par la Chambre des représentants.