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Point de vue : Le Maroc démocratique possible : pour une monarchie citoyenne
Publié dans Albayane le 27 - 03 - 2012

Dans le cadre du débat autour des réformes politiques et institutionnelles, nous reproduisons les interventions écrites que l'Administration du PPS a reçues, à l'occasion de la tenue de la quatrième session du Comité central consacrée à la révision de la Constitution.
Il est évident que les lecteurs et les citoyens sont les bienvenus pour contribuer au débat.
« Le corps politique, aussi bien que le corps de l'homme, commence à mourir dès sa naissance et porte en lui-même les causes de sa destruction. Mais l'un et l'autre peut avoir une constitution plus ou moins robuste et propre à le conserver plus ou moins longtemps. La constitution de l'homme est l'ouvrage de la nature ; celle de l'Etat est l'ouvrage de l'art. Il ne dépend pas des hommes de prolonger leur vie, il dépend d'eux de prolonger celle de l'Etat aussi loin qu'il est possible, en lui donnant la meilleure constitution qu'il puisse avoir. Le mieux constitué finira, mais plus tard qu'un autre, si nul accident imprévu n'amène sa perte avant le temps. » J.-J. Rousseau.
Le débat ouvert par des militants de notre parti, qui concerne les revendications du mouvement des jeunes des 20 février et 20 mars appelant à de véritables réformes constitutionnelles et à plus de justice sociale, est d'une grande importance puisqu'il permet aux partisans du PPS – au-delà des divergences de leurs opinions, voire de leurs convictions – de débattre d'une réalité qui agite, non sans tension, la scène politique nationale comme d'ailleurs ses sœurs jumelles dans d'autres pays du monde arabe.
La période charnière entre la fin de l'année 2010 et le début de l'année 2011 est marquée par des soulèvements-surprises (mais prévisibles !) des rues arabes (le processus n'est visiblement qu'à ses balbutiements, et il faut attendre ce qu'apporteront les jours sinon les mois à venir comme dénouement pour voir de quoi il accouchera – surtout si on tient compte de ce qui se passe encore au Yémen, en Syrie et, de manière on ne peut plus barbare, en Lybie). L'onde de choc a été ressentie chez nous, quoique sur l'échelle de « Richter » des manifestations on n'ait, jusqu'à présent, pas enregistré des degrés alarmants. Mais est-ce une raison pour se croire tiré d'affaire comme le prétendent les adeptes de la théorie de l'«exception marocaine» ?
Disons-le sans ambages : le Maroc de l'ancien régime n'est plus viable actuellement du fait que le pays a connu, il y a plus d'une décennie, au moins deux changements concomitants : arrivée d'un nouveau roi à la tête du pays qui coïncide avec l'irruption d'un nouveau siècle, partant, d'un nouveau millénaire. Ces changements, il faut les mesurer à l'aune du déterminisme historique si l'on veut comprendre la nécessité pressante de la mue du régime appelé plus que jamais à écouter la voix du peuple plutôt que celle de ceux qui la lui confisquent. Le despotisme éclairé d'un Hassan II a fait son temps, et il était, peut-être, le système de gouvernement approprié pour un régime qui cherchait à déjouer les conspirations de ses ennemis à une époque où deux idéologies diamétralement opposées se disputaient le monde. Mais vouloir perpétuer un tel système (je dis bien système et non régime) aujourd'hui, c'est mésestimer l'évolution du peuple marocain, a fortiori sa jeunesse, qu'on croirait gouvernable par des lois d'outre-tombe.
La monarchie au Maroc jouit incontestablement d'une légitimité séculaire ; en la renforçant par une légitimité populaire, elle aura courageusement scellé l'alliance de l'estime mutuelle : « Les rois, remarquait il y a plus de deux siècles un clairvoyant Jean-Jacques Rousseau, veulent être absolus, et de loin on leur crie que le meilleur moyen de l'être est de se faire aimer de leurs peuples.1 » Pour ce faire, il faut que la vieille garde (tout comme la nouvelle) gavée de culture mekhzenienne soit mise hors service, voire hors orbite royale ; car elle continue de faire admettre (à tort) que la pérennité du pouvoir monarchique repose sur l'affaiblissement du peuple. Aussi payante puisse-t-elle paraître, cette approche qui hisse le conflit au rang de protecteur légitime du régime est un leurre. Elle n'est profitable aujourd'hui ni au régime en place ni au peuple (le seul habilité à le cautionner) ; mais, en revanche, elle l'est aux courtisans, ces sangsues de la cour, qui, au lieu d'œuvrer pour le bien de la nation et l'intérêt général, cherchent plutôt à satisfaire leur avidité insatiable d'accroître leur fortune, et ce, aux dépens de la misère et du mépris du peuple.
Dans le Maroc du XXIème siècle, et on ne le répétera jamais assez, la force du régime monarchique est coextensive à celle du peuple ; leur union peut consolider la puissance de l'Etat et, surtout, sa résistance face aux harcèlements politiques de nos voisins du nord et de l'est. Je serais tenté de dire, à la suite de l'auteur de Du Contrat social, que l'intérêt du roi est que « le peuple [soit] puissant, afin que cette puissance étant sienne le rend[e] redoutable à ses voisins2 ». N'en déplaise à la racaille courtisane !
Permettez-moi, chers camarades, de revisiter un pan de l'Histoire occidentale. Comme vous le savez, le XVIIIème siècle fut, en Occident, une époque de révolutions ; les Etats, comme l'Angleterre, qui surent s'adapter aux contraintes du siècle purent assurer la survie de leur régime en y introduisant de réelles réformes : la couronne britannique lâcha du leste dans le domaine des libertés publiques et individuelles, et légua plus de pouvoir aux représentants du peuple. En revanche, l'Etat bourbonien de France ne put survivre au soulèvement populaire qui mit fin au règne de Louis XVI en 1792. Le physiocrate Turgot, ministre progressiste et esprit éclairé, avait pourtant essayé d'introduire des réformes politiques et, surtout, économiques3 pour apaiser l'ire populaire ; or la résistance classique des corrompus (parmi les courtisans) et des privilégiés (dont Maurepas, vieux goupil de la cour qui occupa, sous Louis XVI et jusqu'à sa mort en 1781, le poste de Premier ministre) avait non seulement mis en échec ces réformes, mais conduit, par ricochet, à la chute du régime. Turgot (comme d'ailleurs Brienne ou Necker) était le bouclier du régime, et il aurait, sans doute, sauvé ce dernier s'il n'avait pas été disgracié en 1776 sous la pression de ses détracteurs. Certains le considèrent comme « le dernier des Français qui eût pu conjurer la crise au profit de la monarchie et de la France ».
Certes, le Maroc n'est pas la France, et pour cause ! Mais des pays comme le nôtre, qui se cherchent actuellement une place parmi les démocraties du monde civilisé peuvent réussir leur métamorphose en tirant parti des enseignements de l'Histoire universelle. Notre pays, pour asseoir les fondements de l'Etat de droit, doit chercher ses Turgot et ses Brienne, sinon les inventer. Nous sommes à la croisée des chemins et sommes sommés de ne pas rater le rendez-vous avec l'Histoire. Le mouvement des jeunes du 20 mars a tiré la sonnette d'alarme sur le malaise politique au Maroc ; leur activisme dément les thèses (ô combien fausses !) qui croyaient en la désaffection politique des jeunes. Ces derniers, n'ayant plus confiance en les partis politiques dont la plupart avaient succombé soit au bâton soit à la carotte du système, ont préféré leur brûler la politesse et chercher une alternative au vieil engagement politique. Le « cyber-militantisme » a de nos jours le vent en poupe ; l'encadrement de ces partisans de la «cyber-politique » est, sans doute, mieux réussi que celui offert par les partis. Ces derniers doivent en tenir compte ; car le roi a été réceptif à cette nouvelle vague de la praxis militante qu'aux sempiternelles – mais peu efficaces – jérémiades des partis agréés par l'Etat !
Pour que notre pays réussisse une réelle transition démocratique pacifique, il faut, au-delà d'une profonde refonte de la Constitution (dont le bien-fondé est tributaire d'une sérieuse volonté politique),
- abolir le système makhzenien tout en passant par une période transitoire d'«altermakhzenisation4 » ;
- ériger en crime contre les droits de la personne toutes les formes de l'abus de pouvoir ;
- suspendre les passe-droits ;
- promouvoir la méritocratie et bannir le clientélisme et le favoritisme ;
- instaurer un régime monarchique pro-citoyen et non pro-courtisan ;
- faire de la séparation des pouvoirs et, ensuite, du politique et du religieux le crédo d'une Constitution juste et tolérante ;
- considérer les Marocains, dignité humaine oblige, comme des citoyens libres, non comme des sujets assujettis ;
- interdire aux politiques et aux grands commis de l'Etat de marier pouvoir et affairisme ;
- lutter contre l'hérédité ou la « vénalité » des offices, c'est-à-dire contre l'opportunisme de certaines familles influentes qui – pratiquant ce qu'on pourrait appeler la monarchie dans la monarchie – autorisent à leurs proches d'usurper les hautes fonctions de l'Etat par je ne sais quelle légitimité ;
- lutter contre la néo-féodalité, l'économie de la rente et le diktat des ploutocrates ;
- investir dans le capital humain pour lutter contre la pauvreté et la précarité ;
- rendre obligatoire la reddition des comptes ;
- assurer l'autonomie et la souveraineté réelles de la justice (pour y parvenir il faut, entre autres garanties, que les émoluments des juges soient des plus élevés en vue de prévenir toute tentative de corruption : un juge doit, en fait, toucher mieux qu'un ministre ; mais en contrepartie, il faut instituer un organisme indépendant de contrôle et de poursuites judiciaires en cas de non rectitude) ;
- encourager l'approche de la classe sociale et, au-delà, l'approche du genre : l'égalité des sexes ne peut avoir les résultats escomptés en dehors de l'égalité entre les classes sociales ;
- réformer le régime fiscal en le rendant équitable entre riches et moins riches ;
- revoir le fonctionnement de la caisse de compensation qui profite plus aux entreprises qu'aux citoyens démunis ;
- rompre avec la culture de l'impunité vis-à-vis des hauts fonctionnaires ;
- lutter contre tous les extrémismes : religieux, idéologiques et ethnocentristes ;
- œuvrer pour un nationalisme œcuménique au lieu d'un chauvinisme communautariste ;
- constitutionaliser l'obligation de l'encadrement des citoyens par les partis politiques ;
- revoir en l'améliorant la politique de l'éducation nationale, de la recherche scientifique et de la culture général ;
- libérer la création artistique des tabous et encourager la représentation des arts figuratifs (dont la sculpture) dans les espaces publics ;
- garantir la liberté de l'expression et le droit à la critique du pouvoir…
Voilà, chers camarades, une liste non exhaustive de propositions que je vous invite à étoffer et/ou à remanier pour aiguiser davantage notre conception du système politique idoine à application dans le Maroc du-vivre-ensemble. Ce sont ceux qui critiquent non sans audace notre système politique qui se soucient le plus du devenir démocratique du régime en place ; les thuriféraires, qui nimbent leurs discours d'hypocrites propos laudatifs, représentent, au contraire, un réel danger et pour le régime et pour le peuple. Au début des années 50 du siècle dernier (j'appelle encore une fois l'Histoire à la rescousse !), notre parti, dit alors Parti Communiste Marocain, affirmait, lors d'un procès qui conduisit à sa suspension, que « le marxisme-léninisme […] nous conduit à soutenir toutes [l]es forces dont la monarchie marocaine ». Peut-être qu'aujourd'hui le marxisme-léninisme est une vieille lune ; mais l'astre continue tout de même d'éclairer la nuit de nos rêves inassouvis.
* Membre du Comité central du PPS.
1- Jean- Jacques Rousseau, Du contrat social ou principes du droit politique, Paris, Librairie Générale Française, Coll. « Le Livre de Poche/Classiques de la philosophie », 1996, p. 99.
2- Ibid., pp. 99- 100.
3- Il libéra le commerce du blé, supprima le système corporatif et transforma en impôt la corvée d'entretien des routes par les paysans. Mais ses ambitions étaient bien grandes : il voulait réformer toute l'administration fiscale, établir la liberté religieuse ; bref, il voulait faire de la France un pays où l'on gouverne pour le peuple, non contre le peuple. Cette volonté d'instaurer un système politique inspiré des principes humanitaires du siècle des Lumières lui coûta son poste après seulement deux ans de sa nomination.
4- Cf. notre article « Changer le monde par l'agir progressiste : opter pour l'altermakhzenisation », in Perspectives du Maghreb, n° 12, avril 2006, pp. 14-15.


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