Chambre des Représentants : adoption en commission de la 1ère partie du PLF 2026    Rapport international : progrès du Maroc dans la lutte contre le crime organisé et le blanchiment d'argent    Réforme du pôle public audiovisuel : Lancement d'une étude sur les chaînes publiques    Commission des finances : Lekjaa défend l'exonération fiscale temporaire accordée aux sociétés sportives    Islamabad : Mohamed Ould Errachid s'entretient avec des présidents de Sénat    Live. Suivez le débat de La Vie Eco sur les transformations de Casablanca à l'horizon 2030    Défense. Le partenariat maroco-rwandais s'intensifie    L'Allemagne admet la plainte du Maroc contre plusieurs journaux pour diffamation dans l'affaire Pegasus    TGR : déficit budgétaire de 55,5 MMDH à fin octobre    Transport aérien : Royal Air Maroc renforce la connectivité nationale    Gouvernance opérationnelle de l'eau : où en est le Maroc ?    Deux prestigieuses distinctions pour 2M!    Chambre des Représentants : adoption en commission de la 1ère partie du PLF 2026    Inauguration du Centre Dar Al Moukawil à Errachidia    L'ESSEC met le continent au cœur du débat avec "Ce qu'attend l'Afrique"    Transavia étend ses liaisons annuelles entre la France et le Maroc    Alger accepte de gracier Boualam Sansal à la demande de l'Allemagne    Drones SPY-X : BlueBird Aero Systems transfert la technologie avant l'implantation de son usine au Maroc    Tebboune "omet" le Sahara lors de sa rencontre avec le président somalien : un tournant diplomatique ?    Gabon : 20 ans de prison par contumace pour l'épouse et le fils d'Ali Bongo    Le Maroc observe la situation sécuritaire au Sahel où les transporteurs poursuivent leurs livraisons malgré les risques    La Commission européenne classe la Belgique parmi les pays exposés à une pression migratoire    Le jour où New York a voté pour elle-même    Macron et Abbas conviennent de mettre en place un comité conjoint pour « la consolidation de l'Etat de Palestine »    Rabat se prépare à accueillir le barrage africain qualificatif pour le Mondial 2026    Affaire du baiser : Luis Rubiales refuse de présenter ses excuses à Jenni Hermoso    TotalEnergies CAF CAN-Maroc 2025: Danone lance la promotion "prix addahabiy de Danone"    Ayoub El Kaabi dans le viseur des Canaris    Abdessamad Ezzalzouli intéresse deux clubs de Premier League    CDM U17 / 16es de finale : répartition, jours et horaires dévoilés    Prépa CDM (F) Futsal : lourde défaite des Lionnes face à l'Espagne à Tolède    Mondial U17 / Afrique : 9 nations qualifiées pour les 16es    Alerte météo : rafales de vent et averses orageuses de mercredi à jeudi dans plusieurs régions    Rabat: Enseignement supérieur : la qualité universitaire au cœur d'une réflexion stratégique    Espagne : Démantèlement en collaboration avec le Maroc d'un réseau de trafic de haschich à l'aide de drones    Le temps qu'il fera ce mercredi 12 novembre 2025    Les températures attendues ce mercredi 12 novembre 2025    Casablanca. Incident maîtrisé dans un entrepôt de SOMAFACO à Lissasfa    Appel d'offres international pour le schéma directeur du littoral de Tétouan et de M'diq-Fnideq    Fès : arrestation de 17 personnes, parmi lesquelles quatre fonctionnaires, pour détournement de fonds publics et vols    Artisanat: Lancement de la 3è édition du programme «Les trésors des arts traditionnels marocains»    Grammy Awards 2026 : Davido, Burna Boy et Ayra Starr en lice    La Fondation du Forum d'Assilah couronnée à Mascate par le prix du sultan Qabous pour la culture, les arts et les lettres    Aminux signe son grand retour avec "AURA", un album double face entre ombre et lumière    La FNM, la FRMJE et la Ligue régionale Rabat-Salé-Kénitra des jeux électroniques s'allient pour promouvoir la culture numérique    Du nord de l'Europe jusqu'au Maroc : Une carte numérique déterre 300.000 km de routes romaines    La Fondation Trois Cultures reconnue par l'UNESCO comme "Centre de Catégorie 2"    UIR : Chaire UNESCO lance officiellement l'édition 2025 du programme World Heritage Volunteers    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Enseignement supérieur: À hue et à dia
Publié dans Albayane le 12 - 10 - 2017

Au moment où il s'avère que le savoir implique une nouvelle phase de l'évolution des sociétés, les processus d'apprentissage et d'innovation semblent être en panne dans la nôtre. Malgré les dépenses importantes souscrites par l'Etat, depuis l'indépendance du royaume, pour l'éducation nationale, au sens large du terme, et à l'opposé des sacrifices consentis par les familles à cet égard, la situation de l'enseignement à tous les niveaux ne semble pas répondre à l'ambition déclarée dans l'émergence économique et la gouvernance démocratique de notre société.
L'Université, à quelques exceptions près, est devenue «une grande garderie» où des ados passent trois années au moins pour se rendre compte de l'impasse dans laquelle ils se trouvent. Subissant un enseignement sans aucune attache avec la réalité sociale, ces jeunes apprennent l'oisiveté et la débrouillardise pour que les semestres soient validés au lieu de se motiver pour un parcours aboutissant à la vie active et responsable. L'enseignement supérieur «crache», plus que jamais, des chômeurs bradés de diplômes qui ne leur servent à rien. Pire, il est décrié par les responsables eux-mêmes sans qu'ils puissent développer une alternative. Le diagnostic du Président de l'Université Mohammed V est sans appel : une licence fondamentale qui ne sert à rien et qui est obtenue dans les temps impartis par seulement 20% des étudiants inscrits.
Le mouvement étudiant reste agité par des houles obscurantistes de tout bord, pour qui la tolérance est la pire des ennemies. Depuis sa crise dans les années soixante dix du siècle dernier, il n'est pas arrivé à se relever de l'interdiction de son organisation syndicale. La perpétuation de cet état montre l'état d'infantilisation dans lequel sont maintenus les étudiants malgré une présence formaliste dans les conseils d'établissements. C'est aussi une preuve de l'intégration de l'université dans son environnement, avec ses tares, sa médiocratie et ses dysfonctionnements.
Quant au corps professoral, il est devenu plus attentif à la «grille» lui assurant la promotion promise qu'à l'efficience de sa pédagogie. L'Université marocaine ne promeut plus les valeurs de l'émancipation, de l'égalité, de la démocratie participative, de la justice sociale et de la réalisation de soi par le travail assidu et honnête. Elle est devenue un secteur comme les autres où la corruption et la dépravation côtoient les pratiques issues de la marchandisation des rapports universitaires. La Cour des comptes s'en est émue jusqu'à demander à des présidents d'université de ne pas vaquer aux vacances estivales afin de répondre à ses interpellations.
Les enseignants-chercheurs (tant qu'ils arrivent à maintenir cette dénomination), ne savent plus à quel saint se vouer. Entre les divergences syndicales et la fragilisation du SNESup, les enseignants-chercheurs se trouvent de plus en plus réduits à une comptabilité horaire beaucoup plus qu'à l'exercice d'une pédagogie pour promouvoir la société du savoir dont ils doivent être les initiateurs. L'Université ne semble plus accorder un intérêt au devenir de la société marocaine. Déjà qu'elle peine à appliquer convenablement son autonomie, elle est devenue conservatrice pour essayer de se maintenir par les prérogatives qu'elle détenait par la force du savoir et de son implication dans la transformation de la société. La concurrence privée la confine dans une position marginale alors qu'elle n'arrive que très rarement à imposer son leadership dans les domaines de la connaissance et de sa transmission. La recherche développement se fait ailleurs que dans les locaux des établissements de l'enseignement supérieur, sauf cas rarissimes.
Reste l'administration de l'enseignement supérieur ; elle tend de plus en plus à se comporter à l'instar de l'administration nationale, dans ses tares. Dans les établissements, elle souffre du manque de motivation et de la routine quotidienne sauf pendant les pics encadrant l'année universitaire. Au fait, elle ne manage rien ; elle subit avec les moyens du bord ; cela d'autant plus qu'elle n'est pas formée pour conduire et/ou participer à la mise en œuvre des projets des établissements universitaires. On fait avec, comme l'on dit, sans plus.
Comme partout dans notre beau pays ; on dispose ainsi de deux ensembles disjoints et dissemblables pour l'enseignement supérieur, public et privé. Le public, soumis à ses inerties et partagé entre, d'une part, des instituts, écoles et facultés à numerus clausus ayant des objectifs précis dans la formation des cadres et, d'autre part, des établissements qui absorbent le résidu des bacheliers sans pouvoir répondre aux véritables besoins de la société dans les domaines économique et culturel tout en assurant le partage de la connaissance au maximum. Le privé, preuve du désengagement de l'Etat, sans conformité avec le cahier des charges qui l'encadre, et qui s'oriente vers les formations où la logique du profit est déterminante.
Il reste beaucoup à faire pour que les relations entre les deux ensembles soient normalisées et normales afin qu'ils relèvent le défi «d'une économie des connaissances» par la pratique de l'innovation et «d'une société du savoir» pour s'orienter vers «une éthique de la liberté, de la responsabilité et du partage».
Les disparités dans l'Université publique sont telles que «le coût par étudiant dans les filières à accès régulé représente plus de trois fois le coût par étudiant dans les établissements à accès non régulé». Celles de l'enseignement supérieur privé, reconnues par les investisseurs eux-mêmes, résident dans l'hétérogénéité, l'imperfection et l'incapacité. En d'autres mots : «on trouve un certain nombre d'écoles de bon niveau qui attirent un nombre important d'étudiants, à côté d'un plus grand nombre de petites écoles qui peinent à atteindre la taille critique et qui ne disposent pas des infrastructures et des moyens nécessaires pour un fonctionnement optimal». Le privé évolue par la reconnaissance par l'Etat (et sa participation !) de huit universités privées et par le recyclage des retraités du public pour diriger ses établissements et défendre ses intérêts propres en faisant croire en sa capacité «de tirer l'ensemble du secteur vers le haut, en créant une émulation bénéfique». On attend toujours !
Cette volonté de transformer l'enseignement supérieur au Maroc ne date pas de ce jour. Elle a été réalisée au début du siècle par la mise en œuvre des dispositions de la loi 01-00, elle-même induite par les travaux consensuels de la COSEF et l'adoption de la Charte nationale de l'éducation et de la formation. L'ambition exprimée alors était de faire de l'Université «une véritable locomotive du développement économique scientifique, économique et culturel du pays et un vecteur essentiel de son rayonnement universel». Répondant partiellement à un besoin de sortir de crises itératives qui secouaient l'Université, la réforme fût débauchée par la défaillance des moyens envisagés pour être mis à la disposition du secteur et par une «adaptation» à la mondialisation par l'application mécanique des dispositions du processus de Bologne. Le constat est unanime, au lieu de renforcer «les dimensions intellectuelles, culturelles, sociales et techniques» de l'enseignement supérieur, la réforme est entrain de battre de l'aile malgré un programme d'urgence fort coûteux adopté après une décennie consacrée à l'éducation et à la formation.
La fuite des cerveaux est de plus en plus ressentie. C'est la remarque effectuée par une étudiante qui constate de fait que les meilleurs étudiants de sa promotion ont tous quitté le pays pour d'autres horizons pour se perfectionner et aussi servir de THQ (Travailleurs Hautement Qualifiés) dans les secteurs les plus utilisateurs en technologie de pointe et dans des secteurs de services, là où l'économie de la connaissance est mise en œuvre.
La recherche, sans laquelle l'enseignement supérieur n'a aucune existence réelle en relation avec les problèmes de développement de la société, se réduit à la production de discours sur ce qu'il faudrait faire sans que les autorités gouvernementales ne s'en soucient. Ils ont d'autres soucis, d'autres priorités et sans volonté réelle pour la consolidation d'une recherche nationale liée au développement inclusif avec les moyens dont on dispose. Les Marocain(e)s reconnues dans ce chapitre sont des expatrié(e)s. C'est triste de le dire, mais avec tout le respect que l'on leur doit, les autochtones font du remplissage sans plus. C'est là un problème qui relève de la consolidation de l'édification de l'Etat national, démocratique et moderne dans son approche d'émancipation et de souveraineté.
Au fait ; et globalement, on peut affirmer que les responsables de l'enseignement supérieur au Maroc savent exactement ce qu'ils font et ne commettent aucune erreur ni dans leur appréciation ni dans leur gestion. Le seul problème c'est qu'ils mènent leur action en tirant le secteur dans son ensemble «à hue et à dia». Si les dégâts sont là, l'espoir est encore plus grand pour faire sortir l'enseignement supérieur du marasme dans lequel il se débat afin de préserver et valoriser notre capital humain, le seul qui prévaut.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.