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Nouzha Skalli : «Le Maroc a réalisé pacifiquement sa transition démocratique»
Publié dans Albayane le 01 - 04 - 2011

Nouzha SKALLI, ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité à accordé au magazine italien « MINERVA » (édition de mars 2011 n°306), une interview où elle traite de la situation dans certains pays arabe,
de la théorie de l'effet domino et des transformations socioéconomiques en cours au Maroc. La ministre attire l'attention sur le danger d'une généralisation facile des analyses et de l'assimilation de situations sociologiques complètement différentes. Elle affirme dans cet entretien que « Le Maroc est ainsi prédisposé en matière de performances économiques et de développement humain à être un des pays en mesure de réaliser les OMDs et a été classé par le PNUD parmi les dix premiers pays du monde pour les efforts accomplis en matière de développement humain ». Entretien
Question : A propos de l'actualité de la Tunisie, de l'Algérie et de l'Egypte, on parle beaucoup, dans la presse française, d'un effet dominos et d'un effet boomerang. Est-ce qu'il y a une différence? Qu'est-ce que vous en pensez?
Nouzha SKALI : Le soulèvement populaire en Tunisie, déclenché par un évènement à première vue à caractère social, l'immolation par le feu du jeune vendeur ambulant «Mohammed Bouaziz», s'est rapidement transformé en un mouvement contestataire à caractère politique visant le développement des libertés et de la démocratie et le départ de l'ex président Benali.
On peut parler d'effet domino quand il s'agit de situation similaire ou comparable.
L'aspiration des peuples à vivre dans la liberté et la dignité est partagée par tous les peuples. Le véritable sens de la démocratie, c'est de garantir non seulement les libertés mais aussi des mécanismes permettant aux différentes idées et visions d'entrer en compétition d'une façon institutionnelle et sans recourir à la violence et aux manifestations de rues non organisées.
Pour ce qui est du Maroc, sa situation est totalement différente.
Le Maroc, qui a connu des années difficiles durant les décennies 70 et 80, appelées années de plomb, a réalisé pacifiquement sa transition démocratique, mais non sans sacrifices de militants et militantes du mouvement démocratique.
Dès le début des années 1990, Hassan II, le défunt Roi du Maroc au Maroc a entamé un dialogue avec les forces de l'opposition et a engagé le pays dans une transition démocratique. Après avoir décrété une amnistie générale de tous les prisonniers politiques, des réformes majeures ont été réalisés en concertation avec l'opposition.
- 1992 et 1996: Réformes de la Constitution qui ont introduit l'engagement du Maroc à respecter les droits de l'homme tels qu'universellement reconnus.
- Des mesures ont été adoptées pour assurer la transparence des élections qui se tiennent régulièrement aux dates prévues. Les élections qui s'en sont suivies ont donné la première place au plus grand parti d'opposition à l'époque, l'Union Socialiste des Forces Populaires. En 1998, le secrétaire général de ce parti qui était en exil et qui avait été longtemps auparavant condamné à mort a été nommé 1er Ministre. Un gouvernement d'union nationale a été formé avec les forces de l'opposition. Il y a douze ans de cela !
En 1999, le Maroc a connu l'avènement du Roi Mohammed VI. Un roi particulièrement engagé pour les droits humains, les droits des femmes et la démocratie. Le train des réformes s'est alors poursuivi avec une cadence plus accélérée en permettant de réaliser des performances importantes sur tous les plans politique, économique, social, culturel et environnemental.
Dans les toutes premières années de son règne, le nouveau Roi a impulsé le nouveau concept de l'autorité en insistant sur la nécessité pour les agents d'autorité d'être au service des citoyens et citoyennes.
Grâce à son leadership et en partenariat avec les forces démocratiques et les organisations de droits humains dans le pays, il a impulsé un grand nombre de réformes structurantes pour les droits de l'homme et de la démocratie, mais aussi pour les droits des femmes et l'égalité et pour les droits des enfants et des personnes handicapées.
- Des mesures ont été adoptées pour assurer des élections libres et transparentes et assurer pour la première fois l'entrée des femmes en nombre significatif au parlement en Septembre 2002.
- Enfin, un processus innovant et courageux de réconciliation nationale a été engagée à travers l'Instance Equité et Réconciliation dirigée par Driss Benzekri, un militant de gauche et ancien prisonnier politique qui est aujourd'hui décédé et considéré comme un héros national. Dans le cadre des recommandations de cette instance ont été réalisées :
- Des Auditions publiques sur les violations passées des droits de l'Homme
- Une indemnisation matérielle et une réhabilitation des victimes des violations passées des droits de l'Homme y compris une réinsertion sociale et la couverture médicale
- Une action de réparation individuelle et communautaire qui est encore en cours aujourd'hui
- Tout cela en vue de tourner la page du passé des violations des droits de l'Homme, après l'avoir lue et afin que notre pays ne connaisse plus jamais cela!
- Enfin, des mécanismes nationaux de protection des droits de l'Homme ont été mis en place comme le conseil consultatif des droits de l'Homme également dirigé par un ancien prisonnier politique.
- De multiples autres réformes ont été réalisées dans le domaine de la liberté d'expression et d'association, comme la libération du champ audio-visuel qui permet aujourd'hui une parole qui s'exprime en toute liberté y compris en direct à travers les radios et les télévisions!
Je n'ai pas parlé des chantiers pour la promotion des droits des femmes et de l'égalité mais ils sont nombreux, profonds, structurants.
Outre la révolution tranquille constituée par la réforme du Code de la famille, on peut citer la réforme du code de la nationalité, l'accès des femmes aux postes de responsabilité et de décision et l'institutionnalisation de la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Ces chantiers sont aujourd'hui couronnés par un agenda gouvernemental de l'égalité.
A côté de ces réformes, je dois vous dire que le Maroc est un Etat-Nation où le système de la monarchie est enraciné. Le Roi du Maroc, qui est également Commandeur des Croyants, bénéficie d'une très forte légitimité religieuse et populaire depuis des siècles.
Le système de la monarchie est considéré au Maroc comme un atout qui nous permet d'avancer dans la cohésion, tout en permettant une confrontation d'idées et de visions sur l'ensemble des sujets.
Ainsi, c'est grâce à la légitimité et à la crédibilité de l'institution monarchique qui a créé un large consensus de toutes les forces politiques, que nous avons pu avancer sur des dossiers comme celui des droits des femmes.
Au Maroc, également quelques gens se sont mis le feu comme acte de protestation. Ils sont des épisodes qui représentent une difficulté générale dans la population qui a fait naître des révoltes en Tunisie et Egypte. Le Maroc est-il à l'abri?
J'ai parlé des droits de l'homme, des libertés et de la démocratie au Maroc. Ceci dit en matière de développement humain, malgré les progrès incontestables qui ont été accomplis, des défis importants subsistent pour lutter contre la pauvreté, éradiquer l'analphabétisme, généraliser l'éducation, améliorer la qualité de l'enseignement. Il s'agit là d'un problème qui se répercute incontestablement sur l'emploi des jeunes.
De grands investissements publics ont été lancés durant ces dix dernières années pour renforcer les infrastructures de base : ports, aéroports, autoroutes, routes etc.
Sa Majesté le Roi Mohammed VI a lancé, le 18 mai 2005, un grand chantier de développement humain, pour lutter contre la pauvreté et les disparités sociales. Il s'agit de l'Initiative Nationale du Développement Humain qui a permis de réduire sérieusement la pauvreté et l'exclusion grâce à une approche participative et partenariale avec la société civile et les élus locaux. Elle a ciblé les 360 communes rurales les plus pauvres et les 267 quartiers périphériques des villes souffrant d'exclusion sociale.
Durant cette période, en effet, L'INDH a réalisé 22.000 projets dont ont bénéficié 5 millions de personnes à travers l'accès aux infrastructures de base, les équipements collectifs, l'animation des quartiers, le renforcement des capacités, la formation professionnelle et les activités génératrices de revenus et d'emploi.
Ce chantier de proximité a permis une réduction palpable de la pauvreté et de l'exclusion. En l'espace de 5 ans, le taux de pauvreté dans les communes INDH est passé de 36% à 21 % soit 47% de diminution. Cette formidable initiative a réussi à créer une véritable mobilisation sociale autour des objectifs du développement humain.
L'évaluation en termes de réalisation des OMDs nous montre une évolution significative durant la dernière décennie, notamment en matière de lutte contre la pauvreté.
• Le taux de pauvreté relative est passé de 14,2% en 2004 à 8,8% en 2008
• Le taux du chômage est passé sous la barrière de 10% (9,1% en 2009).
• Le Taux net de scolarisation des enfants de 6-11ans est passé de 73% en 1999 à 96% au niveau national en 2009. Ce taux a triplé en milieu rural et quadruplé parmi les filles en milieu rural. Le rapport filles-garçons dans le primaire est passé 66% à 89%.
• L'Electricité a été généralisée en milieu urbain, en milieu rural, le taux d'électrification est passé de 9,7 en 1994 à 83,9 % en 2009
• En matière d'accès à l'eau potable, on est passé de 14% en 1994 à 90% en 2009, l'objectif généralisation eau potable sera atteint avant 2015
Le Maroc est ainsi prédisposé en matière de performances économiques et de développement humain à être un des pays en mesure de réaliser les OMDs et a été classé par le PNUD parmi les dix premiers pays du monde pour les efforts accomplis en matière de développement humain.
Néanmoins, il y a encore de grands défis à relever et je dois relever que parmi les obstacles, le défaut d'intégration des pays du Maghreb constitue un coût non négligeable appelé «le coût du non Maghreb » qui constitue un manque à gagner de 2 points de PIB pour chaque pays du Maghreb. La frontière entre le Maroc et l'Algérie est ainsi fermée, et l'Algérie a fait jusqu'à présent la sourde oreille aux appels du Maroc de faire converger nos efforts au bien-être de nos peuples au lieu de se tourner vers l'atteinte à la souveraineté du Maroc et à son unité territoriale. A l'instar des pays démocratiques, notre pays connaît régulièrement des manifestations libres à caractère social et d'une ampleur limitée. Il y a eu quelques rares cas individuels isolés de tentative d'immolation par le feu, qui ont été prévenus grâce à la vigilance de la protection sociale. Je peux affirmer comme le confirment tous ceux qui connaissent bien le Maroc, y compris de grandes organisations internationales de droits humains, que le Maroc jouit d'une stabilité remarquable. Il y a lieu d'ajouter que le Maroc ne se voile pas la face sur la nécessité de mettre en œuvre une nouvelle génération de réformes et de mettre en œuvre des stratégies d'ailleurs en cours pour lutter contre la corruption et contre les différents dysfonctionnements qui sont le fait de la majorité des pays du monde.
La cause qui a provoqué le soulèvement dans quelques pays dans le Nord de l'Afrique a certainement une grosse signification sociale, est-ce que vous croyez qu'elle peut cacher aussi un sentiment antioccidental?
Il faut tout d'abord préciser que le Maroc n'est pas l'orient mais l'extrême occident du monde arabo-musulman.
Dans le monde arabe, la perception du monde occidental, Europe et Amérique est fortement impactée par l'immense injustice constituée par l'appui à l'entité d'Israël au détriment des droits des peuples arabes. Mais ce sentiment antioccidental reste un sentiment ambivalent car les peuples arabes restent fascinés par le modèle démocratique occidental et le vivent quand même comme un modèle à suivre du moins en matière de libertés, de démocratie et de droits de l'Homme.
Est-il fondé de penser que, derrière les protestations et la rébellion populaire, il y a des mouvements ou cellules organisés du fondamentalisme islamique?
Ce serait très réducteur d'avancer une telle hypothèse, que rien ne permet de vérifier.
Nous avons lu que des intellectuels et des théologiens islamiques pensent profiter de ce moment historique pour redessiner l'Islam, et donc aussi le rôle de la femme et la séparation entre religion et politique. Ce changement est vraiment possible dans tous les pays dans le nord de l'Afrique?
Les changements de grande ampleur et le développement de la liberté d'expression peuvent créer des perspectives réelles pour ouvrir un débat serein au sein des sociétés arabes et musulmanes. Il s'agit d'une opportunité non pas pour redessiner l'Islam, mais pour revoir la lecture qui en est faite dans certains pays.
La religion musulmane est noble par ses valeurs et ses idéaux de justice, d'égalité et de tolérance. Cela peut être une opportunité pour rendre à la religion sa sacralité et la soustraire à toute instrumentalisation à des fins politiciennes en lui rendant ses valeurs de modération et de tolérance.


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