18 Novembre : La date des dates!    Pressée par Trump, l'Algérie lâche les Palestiniens à l'ONU    Morocco shines with silver and bronze at Islamic Solidarity Games in Riyadh    Atlas Lion Cubs eye World Cup semifinals after thrilling win over Mali    Presionada por Trump, Argelia abandona a los palestinos en la ONU    FIFM 2025 : Hakim Belabbes, Karim Aïnouz et Payman Maadi parmi les membres du jury    Mauritanie : Le président El Ghazouani reçoit une délégation politique et militaire du Polisario    Assassinat de Khashoggi : MBS évoque une "énorme erreur"    Coupe du monde 2026 : les détenteurs de billets bénéficieront de créneaux prioritaires pour les entretiens de visa américain    MBS veut travailler à une reconnaissance d'Israël "dès que possible"    L'Algérie au Conseil de sécurité : deux années de manœuvres et de contradictions    Maroc-Ouganda : Voici le onze de départ    Aéronautique : Airbus veut approfondir davantage son partenariat avec le Maroc    Polisario : Depuis Tindouf, des opposants réclament le départ de Brahim Ghali    Mundial Sub-17: Marruecos vence a Malí y avanza a los cuartos de final    Températures prévues pour mercredi 19 novembre 2025    Rabat. Hammouchi préside la cérémonie annuelle de l'excellence    GenZ : 6 mineurs d'Imzouren condamnés à de la prison ferme    L'artisanat marocain s'expose à Séville pour renforcer les liens culturels avec l'Andalousie    Grand prix national de la presse : Remise des prix aux lauréats de la 23e édition    Ayoub Gretaa retenu dans la sélection des "Révélations masculines César 2026"    L'eau et les infrastructures... au cœur des entretiens entre le ministre de l'Equipement et de l'Eau et l'ambassadrice de Chine    Gaza : Le Conseil de sécurité vote pour la création d'une force internationale    L'écrivain Boualem Sansal de retour en France, aussitôt reçu par Macron    Vidéo. L'ONMT déploie un important dispositif pour la CAN 2025    IPO SGTM: les premiers détails de l'opération    Circulation : 9.136 contraventions et 8.211 procès-verbaux dressés en une semaine    CDM U17 / Maroc-Mali : Les Lionceaux mènent à la pause    Mondial U17 : Un remake Maroc-Mali, l'Ouganda poursuit son petit bonhomme de chemin    Mondial U17 : Voici la composition du Maroc qui affrontera le Mali    Le Maroc accueille à nouveau les Awards de la CAF 2025 avec de fortes nominations nationales    Fête de l'indépendance. Mise en service du nouveau Centre de Commandement et de Coordination d'Agadir    Le Maroc commande dix hélicoptères H225M auprès d'Airbus Helicopters    Projet TGV au Maroc : 6 457 rails importés de Chine    Fête de l'Indépendance. Le sens d'une précieuse célébration    Sahara - Négociations : Un jeu à somme nulle ou positive ? [INTEGRAL]    Patrimoine culturel immatériel : La candidature du Caftan marocain examinée en décembre par l'UNESCO    Classement FIFA : Les Lions de l'Atlas profitent de la chute de l'Italie    Campagne agricole 2025-2026 : Programmation de 5 millions d'hectares de grandes cultures    JSI Riyad 2025 : Le Maroc améliore son classement    Interview avec Malak Dahmouni : « L'identité du FICAR s'est forgée sur 30 ans d'engagement envers le cinéma d'auteur »    Jeff Bezos, va prendre la tête d'une startup spécialisée IA    COP30 : le Maroc appelle à un compromis ambitieux sur le financement climatique    Lancement d'une licence d'excellence en cinéma au profit des étudiants-détenus    Bénin. Une révision constitutionnelle à six mois de la présidentielle    Dakar Fashion Week : L'élégance africaine défile    Aminux signe son grand retour avec son nouvel album "AURA"    Maroc - Espagne : Des exercices conjoints pour la sécurité maritime dans le détroit de Gibraltar    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Lettre à mon ami tunisien
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 05 - 02 - 2014

Je devais t'écrire le lendemain du 14 janvier 2011. Pourquoi ne l'ai-je pas fait à ce moment-là ? Est-ce la surprise de voir ce que tu as accompli ce jour-là ? Je ne m'attendais pas à ce qu'un jour tu…, allez, je vais te le dire crûment.
Je ne te connais pas belliqueux, va-t'en guerre, bagarreur. Tu es plutôt pacifique, conciliant, civilisé quoi. Tels les peuples à la longue histoire et la riche civilisation.
Je ne m'attendais pas à ce que tu secoues la chape de plomb qui te couvrait depuis près d'un demi-siècle. Les régimes autoritaires qui se sont succédé t'avaient bâillonné. Mais tu t'en accommodais, pourvu qu'ils s'occupent, sinon de ton bonheur, du moins de ton bien-être matériel même si, avoue-le, cela fut au prix de ta liberté d'expression.
Et, au moment où l'on s'y attendait le moins, un simple marchand ambulant, que dis-je, un courageux et héroïque jeune homme de 19 ans redressa l'échine, leva la tête et réclama tout haut son droit à une vie décente. Rappelle-toi, Bouazizi, de son vrai nom Tarek, vendait faute de mieux des fruits et légumes dans les rues de Sidi Bouzid, seul revenu d'une famille de sept enfants. Il rêvait de s'acheter une camionnette pour remplacer sa charrette. Il devait constamment verser des pots-de-vin à une administration vorace et corrompue qui lui confisquait son seul moyen de survie pour un oui ou pour un non. Amère réalité.
Le 17 décembre 2010, on saisit une fois de plus son outil de travail, une charrette et une balance. Humilié, écœuré, il s'immole ce jour-là devant ses harceleurs, puis s'éteint le 4 janvier 2011.
L'acte désespéré de Bouazizi a sonné ton réveil. Tu as reconnu le signe du destin, tel que prédit par le grand Victor Hugo : « Les grandes révolutions naissent des petites misères comme les grands fleuves des petits ruisseaux ». Et là, tu as fait l'inattendu. Tu es descendu dans la rue, exprimé ta colère, et occupé l'espace public jusqu'à ce que l'omnipotent et inamovible dictateur ait « dégagé » dix jours plus tard, le 14 janvier 2011. Ce faisant, tu as écrit dans les annales de l'Histoire une des rares révolutions qui se soient déroulées en douceur, que ne peut revendiquer nul rebelle surexcité, nul philosophe des lumières, nul leader charismatique. Pas même Bouazizi qui, loin de se poser en martyre pour l'avènement d'une hypothétique démocratie, voulait juste qu'on le laisse tranquille pour s'occuper d'une famille nombreuse.
Du coup, tu as effacé cette odieuse image de l'Arabe condamné au choix étriqué entre l'extrémisme religieux et la dictature laïque comme régime politique. Pour cela, tu mérites la reconnaissance de toute une nation. Depuis, ton exemple a fait des émules, un sujet dont je te parlerai une autre fois.
Pour l'heure, si je suis revenu sur ces événements que tu connais bien, c'est d'abord pour mesurer d'où tu es venu et à quoi tu es parvenu, en ayant eu l'intelligence d'éviter le sort prédit aux révolutionnaires par Pierre Victurnien Vergniaud : «La Révolution est comme Saturne : elle dévore ses propres enfants». Et, en dépit des vagues de violences nourries par la misère qui éclatent ici et là, la Tunisie, berceau du Printemps arabe, a réussi avec bonheur à ne pas basculer dans le chaos.
Ensuite, et surtout, pour te féliciter d'avoir adopté le 26 janvier dernier, trois ans après le sacrifice de Bouazizi, une Constitution parmi les plus progressistes du monde arabe. Par bonheur, laïcs et religieux ont fait montre d'intelligence durant cette période critique. Ils ont appris à vivre ensemble, et compris que la survie du pays dépend d'un consensus national, non d'une confrontation sociale. Cette intelligence a produit un savant mélange entre laïcité et «islamité» que l'on retrouve dans la consécration de la liberté d'expression et d'opinion, l'égalité des citoyens et des citoyennes en droit, le principe de parité homme-femme dans les assemblées élues, la prohibition de la torture physique et morale, l'impossibilité pour le législateur de réviser les dispositions constitutionnelles en matière des droits de l'Homme.
Ce savant mélange a fait de l'Etat le gardien de la religion, le garant de la liberté de conscience et de croyance et du libre exercice du culte, le protecteur du sacré, le garant de la neutralité des mosquées et des lieux de culte par rapport à toute instrumentalisation partisane. De même, l'Etat s'est engagé à diffuser les valeurs de modération et de tolérance, à protéger le sacré de toutes violations, à proscrire l'accusation d'apostasie et à s'opposer à l'incitation à la haine et à violence.
Bravo donc cher ami tunisien pour ta nouvelle Constitution. Elle jette les fondements d'un Etat démocratique, et offre un modèle pour certains pays qui se débattent encore dans les turbulences laissés par ta révolution du jasmin.
Mon enthousiasme peut paraître excessif. J'en conviens. Car, tout texte élaboré par les humains est perfectible. Ta nouvelle Constitution n'y échappe point. En attendant, tous mes vœux t'accompagnent dans ton cheminement à venir vers l'enracinement des valeurs qu'elle consacre dans les pratiques quotidiennes, afin que cette rive sud de la Méditerranée soit le havre de paix auquel aspirent ses peuples.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.