Le président de la municipalité de Nador, Mustapha Azouagh, est accusé par des membres du Conseil de dilapider les deniers publics et mener la ville vers la faillite. Une conférence de presse sera organisée pour expliquer la situation à l'opinion publique. Un grand scandale financier risque d'éclater dans la municipalité de Nador. Et pour cause, plusieurs millions de dirhams sont en jeu et des élus ainsi que des fonctionnaires risquent d'être éclaboussés. Tout a commencé au début de l'année 2003. Après quatre ans d'activité, la municipalité de Nador a décidé de résilier le contrat qui la liait à Nakawa SARL, société privée des services de collecte et d'évacuation des ordures ménagères et de nettoiement. La raison de cette résiliation est bien simple: Nakawa n'a pas respecté ses engagements. "La sécurité et la salubrité publiques se trouvaient ainsi compromises soit par l'interruption du service, soit par une extrême négligence", peut-on lire sur la décision de résiliation, datée de mai 2003 et dont ALM a obtenu une copie. Malgré plusieurs mises en demeure et même une mise en régie, le président de la commune, à l'époque Tarik Yahia, a donc été contraint d'appliquer les dispositions contractuelles mettant ainsi un terme à la convention. Cette résiliation a été approuvée, un mois plus tard, par le directeur générale des collectivités locales (DGCL), Saâd Hassar. Jusque-là, aucun problème particulier n'était à signaler. Toutefois, dès sa nomination au poste de président du Conseil communal de Nador, en septembre 2003, Mustapha Azouagh, qui succède ainsi à Tarik Yahia, se presse de signer une "annulation de la résiliation". "Une première dans les annales juridiques, puisque seul un tribunal est capable d'annuler une décision administrative", souligne Tarik Yahia. En tout cas, le nouveau président de la commune de Nador a réussi à faire approuver sa "décision d'annulation de la résiliation", non seulement par le gouverneur Mohamed Allouch, mais également par le DG des collectivités locales. Dès lors, la commune a commencé à signer des attachements au profit de Nakawa. En termes clairs, Mustapha Azouagh a décidé de payer des sommes astronomiques à la société, y compris pour la période où elle avait cessé toute activité. C'était sans compter sur la vigilance du receveur communal (sous tutelle du ministère des Finances) qui a refusé de débloquer la somme d'argent car, à juste titre, le contrat avec Nakawa a fait l'objet d'une décision de résiliation et que "l'annulation de cette décision est inopérante". Tarik Yahia, actuellement président de la Chambre de commerce et d'industrie et des services de Nador, a également alerté le trésorier général du Royaume, Saïd Ibrahimi, des risques d'un éventuellement contournement de loi et de dilapidation des deniers publics. Ibrahimi en fait immédiatement part à Saâd Hassar. Voyant l'étau se resserrer, Mustapha Azouagh a décidé de signer un nouveau contrat avec Nakawa. Toutefois, cette initiative est triplement condamnable. Tout d'abord, selon les propos de Tarik Yahia, "le Conseil municipal n'a absolument pas approuvé le nouveau contrat signé avec Nakawa". A cela, Azouagh répond : "Ce nouveau contrat est, en fait, un arrangement préparé par le gouvernement de Sa Majesté, en l'occurrence par le ministère des Finances et celui de l'Intérieur". Et d'ajouter: "La municipalité a voulu résoudre ce grave problème, héritage de l'ancien président". Deuxième problème: "Comment se fait-il que la commune se lie de nouveau à une société qui a prouvé son incapacité de respecter ses engagements?", s'exclame Tarik Yahia. Mustapha Azouagh est catégorique sur ce point : "Si Nakawa ne respecte pas le cahier des charges, le contrat sera immédiatement résilié". Et enfin, "comment le nouveau receveur municipal, Khalid Bouajaja, peut-il indûment payer pas moins de deux milliards de centimes à Nakawa? En tout cas, le rapporteur du budget, Mohamed Khanchaf, a décidé de porter l'affaire devant la Cour régionale des Comptes. Il estime que le contrat n'a aucune valeur car les membres du Conseil ne l'ont pas approuvé. L'affaire risque de prendre des dimensions politiques. Quatre membres élus ont décidé d'organiser, le 12 mars, une conférence de presse sous le thème: "Nador, une ville mise en faillite". Ces élus sont Mohamed Benazzouz, un vice-président, Mohamed Khanchaf, rapporteur au budget, Tarik Yahia, conseiller communal et ancien président du conseil ainsi que Mohamed Azougagh, conseiller communal et professeur universitaire à Oujda. Selon Tarik Yahia, la ville de Nador est réellement en danger. Il en veut pour illustration le niveau de l'excédent budgétaire. En 2002, il était supérieur à 1,4 milliard de centimes. En 2003, "à cause de l'affaire Nakawa", il est passé à 800 millions de centimes. Et en 2004, cet excédant n'a été que de 74 millions de centimes.