TGR: gouvernance financière un nouveau chapitre s'ouvre à Rabat    Coupe de la CAF: Un sifflet congolais pour RSB-USMA    Pourquoi le rapport de force avec la France a changé    Conseil de sécurité: le mouvement des non-alignés fait valoir les efforts royaux en faveur de la cause palestinienne    Banques : Voici le nombre de détenteurs de comptes au Maroc    La France prête à financer la liaison électrique qui liera Casablanca à Dakhla, une annonce majeure    Mondial des clubs 2025. On connaît les 4 équipes africaines qualifiées    le Réal Madrid fonce vers un nouveau titre    la CAN 2023 très lucrative...    Eliesse Ben Seghir suspendu par la LFP    RS Berkane- USM Alger : la CAF rejette l'appel interjeté par le club algérois, sanctions additionnelles probables    SIAM : meilleures participations à la 16e édition    Agriculture durable : l'ADA et le PNUD s'allient pour renforcer l'entrepreneuriat des jeunes    Nabila Hamani : portrait d'une magicienne du verbe classée au top des meilleures poétesses de sa génération    PI: Une commission tripartite pour conduire le 18è congrès    Rachid Benali : « L'agriculteur ne perçoit qu'entre 20 et 25% du prix payé par le consommateur»    Meknès : remise des prix de la 16ème édition du SIAM    Entrepreneuriat des jeunes : L'ADA et le PNUD s'allient    Maroc : L'ONMT mise sur le football pour promouvoir la destination    Coupe du Monde des Clubs 2025 : La liste africaine est close depuis vendredi 26/4/2024    Botola D1/J27 (suite): HUSA-FAR en affiche au début de la soirée    Conseil de sécurité: Le Mouvement des non-alignés salue les efforts de SM le Roi en faveur de la cause palestinienne    Burkina: adoption d'une loi relative aux assises nationales sur la transition    Lutte contre la piraterie médiatique : l'ANME lance un appel à la conformité des prestataires    L'Humeur : Et hip et hop, rappons !    Signature de deux mémorandums d'entente entre le Maroc et Djibouti dans le domaine de la santé et de la protection sociale    Mohamed Mhidia, portrait d'un Wali    Pour un nouveau paradigme pour les relations économiques Maroc-France    La France a fait le choix stratégique de renforcer ses liens économiques avec le Maroc    18ème congrès général : satisfaits du bilan de Nizar Baraka, les istiqlaliens se disent optimistes pour la prochaine étape (Reportage)    Tanger: Fermeture définitive de la prison locale "Sat Village"    Interview. Paola Bacchetta: "Troublée par le mot "marabout", j'en ai fait des cauchemars"    L'OMS alerte sur l'exacerbation de la résistance antimicrobienne pendant le Covid    Salon d'Oujda : l'Oriental des livres    Interview. Rania Berrada : "La migration, c'est être prêt à se confronter aux rouages administratifs"    Covid-19: dix nouveaux cas    Aires protégées : l'ANEF actualise l'étude nationale    Algeria challenges CAF decision on match forfeited over jersey with full Moroccan map    Partenariat historique entre ARAMCO et la FIFA    Attentat près de Moscou: Un nouveau suspect arrêté    Sommet social mondial: M. Hilale s'entretient à Genève avec les directeurs généraux des organisations internationales    Gaza, Ukraine, relations sino-américaines… Voici ce qu'en pense le chef de la diplomatie chinoise    Les têtes d'affiche du 26e Festival Jazz au Chellah dévoilées    Promesse de fin de mandat : Akhannouch veut renforcer l'état social    Prévisions météorologiques pour le samedi 27 avril 2024    Jazzablanca : le tourbillon rock-blues « Zucchero » pour une première apparition au Maroc    Europe meets Morocco in the 26th edition of the Jazz au Chellah festival    Lubna Azabal, étoile marocaine, à la tête du jury des courts-métrages et de La Cinef à Cannes    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Quand le Pape prend la tête d'une nouvelle croisade
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 19 - 09 - 2006

En visite en Bavière, sa patrie, où il fut jadis membre des Jeunesses hitlériennes, Benoît XVI a tenu des propos d'une rare intolérance envers l'Islam. Il renoue ainsi avec «l'enseignement du mépris» professé, des siècles durant, par Rome envers les «infidèles» : Juifs ou Musulmans.
Lors de sa participation, peu de temps après son élection, aux journées mondiales de la Jeunesse à Cologne, le nouveau souverain pontife avait agréablement surpris en se rendant à la synagogue et au Centre culturel musulman de la ville dont il fut autrefois l'archevêque. Beaucoup avaient voulu y voir de sa part une volonté de poursuivre la politique de dialogue de son prédécesseur avec les autres religions monothéistes.
Le discours qu'il a prononcé le 12 septembre à l'université catholique de Ratisbonne, où il enseigna de 1969 à 1977, montre qu'il n'en est rien. Il a laissé parler sa véritable nature et montré son ultra-conservatisme qui renoue avec les traditions théologiques antérieures au concile de Vatican II.
Certes, dans une Allemagne encore traumatisée par la marque du Mazisme, il a pris garde de ne pas attaquer le judaïsme. C'eut été d'autant plus malvenu qu'en 1096, Ratisbonne fut le théâtre d'un sanglant massacre de Juifs fomenté par les Croisés. Sur le chemin de Jérusalem, qu'ils voulaient délivrer des «Sarrasins», ces «soldats du Christ» massacrèrent les «infidèles locaux», prélude au bain de sang qui accompagna, en 1099, la prise de Jérusalem par Godefroy de Bouillon. Selon les chroniqueurs de l'époque, la tuerie des Juifs et des Musulmans de la Ville sainte fut telle que «le sang dégoulinait en véritable torrent dans les ruelles».
A Ratisbonne, le lendemain des cérémonies commémoratives de la tragédie du 11 septembre 2001, Benoît XVI a dirigé ses attaques contre l'Islam. Dénonçant le fondamentalisme comme l'une des «maladies mortelles» de la religion, il a vigoureusement critiqué l'intégrisme, cette «pathologie de la religion» et «les destructions de l'image de Dieu provoquées par la haine et le fanatisme». Il ne s'agissait pas de l'intégrisme catholique, incarné par les disciples de Mgr Lefebvre qui ont été, ces jours-ci, réintégrés dans le giron de l'église catholique, mais tout l'Islam. Car, si pour le pape, il est important « de dire avec clarté, en quel Dieu nous croyons, et de professer, avec conviction, le visage humain de la religion», il est clair que, pour le souverain pontife Benoît Xvi, l'Islam, toutes tendances confondues, n'est pas capable de cette «vision éclairée» de la religion.
Pour «preuve» de cette étonnante assertion, le pape est allé jusqu'à citer un empereur byzantin, Manuel II Paléologue qui, lors d'une controverse avec un érudit persan musulman, avait affirmé à ce dernier : «Montre moi donc que Mahomet a apporté de nouveau. Tu ne trouveras que des choses mauvaises et inhumaines comme le droit de défendre par l'épée la foi».
Le pape considère que tout l'Islam est fondé sur la notion de «djihad». Et Benoît XVI, en oubliant l'horreur du nazisme qui façonna sa jeunesse, en conclut : «Celui qui veut conduire quelqu'un vers la foi doit être capable de parler bien et de penser juste, et non de violence et de menace»… La phrase décisive dans cette argumentation de l'empereur de Constantinople contre la conversion forcée est la suivante ; agir de manière déraisonnable est contraire à la nature de Dieu. Pour l'empereur, un Byzantin éduqué dans la philosophie grecque, cette phrase est évidente. En revanche, pour la doctrine musulmane, Dieu est absolument transcendant. Sa volonté n'est liée à aucune de nos catégories, pas même celle de la raison.
Benoît XVI est peut-être bon théologien, il est médiocre historien, mauvais historien tout court. Et, curieusement, encore plus mauvais historien des religions. Faute de quoi il aurait su que l'Islam fut, au Moyen Age, un modèle de tolérance par rapport à un christianisme fanatique et obscurantiste qui institua l'Inquisition, brûla les hérétiques, expulsa Juifs et Musulmans comme ce fut le cas dans l'Espagne de la Reconquista. L'inquisition fut un frein au développement de la recherche scientifique et philosophique illustrée au contraire par un Averroès, un Avicenne musulmans ou un Maïmonide juif.
La dhimma (protection) garantissait aux «peuples du Livre» la liberté, moyennant le paiement de la djizzya et du kharadj, la liberté de culte et de conscience et permit la naissance d'Al Andalus, cette Espagne des trois religions, qui reste aujourd'hui un modèle.
Oublieux de cette réalité, Benoît XVI ne fait rien d'autre que de proposer aux autres confessions chrétiennes (protestantes ou orthodoxes) une «saine alliance» pour un «djihad» spirituel contre l'Islam qu'il perçoit comme une menace contre l'Occident. En fait, il fait siennes les théories du néo-conservateur américain Samuel Huttington, idéologue du «choc des civilisations».
On peut certes concéder au pape que le monde est plein de «confusion» et que les religions, dans ce qu'elles ont de plus pur et de plus noble, peuvent répondre aux aspirations des êtres humains. Toutes les religions et pas une seule en particulier. Quant à l'intégrisme et au fondamentalisme, il existe aussi chez les Juifs et chez les Chrétiens et doit être combattu. Enfin, l'église catholique gagnerait à faire son examen de conscience et à se débarrasser une fois pour toutes des préjugés racistes qui la virent sympathiser, un temps, avec le nazisme ou soutenir le colonialisme au nom de l'idée «missionnaire».
La crise qu'il a déclenchée pourrait peut-être permettre à Benoît XVI de s'en rendre compte et de «redresser la barre». Faute de quoi son pontificat constituera une régression que ses successeurs devront réparer. Difficilement car ils auront perdu l'estime et l'amitié des autres croyants. A moins que Benoît XVI n'arrive à «évacuer» ses années de jeunesse SS et ne devienne un pape acceptant et respectant les valeurs des autres religions monothéistes contemporaines, à commencer par l'Islam.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.