Le prince Moulay Hicham, comme à son accoutumée, s'est encore une fois invité aux élections au Maroc en passant, cette fois-ci, un savon au Parti de la justice et du développement (PJD) qu'il accuse d' »immobilisme » et de formation pleine de contradictions. Dans une tribune publiée ce vendredi dans le magazine d'actualités français l'Obs, Moulay Hicham estime que le » PJD ne peut pas imposer sa volonté sur l'arène politique, mais n'a pas non plus de menace crédible à mettre en œuvre contre la monarchie, à part quitter totalement les institutions politiques, ce qui saperait toute sa stratégie d'adaptation. Cela met au jour son irréductible contradiction ». Toujours selon le prince réputé proche de l'association Al Adl wal Ihsane, le PJD « se présente comme un parti d'opposition qui se bat contre les excès du palais, alors que sa vision idéologique et sa stratégie politique ne lui permettent pas d'affronter ces excès ». Et Moulay Hicham de poursuivre dans sa lancée: « Le PJD est un parti patriotique, mais aussi un parti antilibéral composé par une myriade de courants idéologiques. Quelques-uns de ses membres plaident pour un Etat théocratique tandis que la plupart cherchent à « islamiser » la société. Bon nombre d'entre eux sont des politiciens professionnels qui veulent uniquement occuper une fonction publique. Ils sont peu nombreux à vouloir un véritable régime parlementaire ». Dans sa tribune, le prince affirme, par ailleurs, que le PJD a fait preuve de pragmatisme de façon à préserver sa relation avec le palais. « Publiquement, il affirme son attachement aux réformes constitutionnelles et au processus démocratique annoncés en 2011. Chaque fois que sa propre interprétation de la Constitution a différé des positions de la monarchie, il a systématiquement capitulé, sachant que dépasser cette limite signifierait son éviction », souligne-t-il non sans ajouter que cette formation politique « a aussi délibérément accompagné son discours islamiste d'une note traditionaliste ». Ainsi, à en croire Moulay Hicham, « le PJD considère-t-il le roi comme l'interprète suprême de la Constitution en sa qualité de commandeur des croyants, reconnaissant sa haute autorité exécutive sur les questions religieuses. Il invoque même des concepts islamiques essentiels à son identité pour justifier cette subordination, comme Ta'a(l'obéissance) et Nasiha (le conseil) ». « Cette oscillation entre une soumission sans équivoque à la monarchie et un prétendu soutien public à la démocratie a rendu le PJD immobile », estime « le prince rouge » selon lequel, le PJD affirme – en tant qu'acteur islamiste – vouloir une démocratisation, pourtant il se subordonne lui-même au palais sur la base d'une autorité religieuse, tout en se plaignant de ne pouvoir faire avancer des réformes ». Pour ce qui est du scrutin législatif du 7 octobre prochain, le prince Moulay Hicham souligne qu' » Historiquement, les élections parlementaires au Maroc ont été des exercices de gestion politique, de cooptation et d'ajustement au service du statu quo ». « Les élections d'octobre ne feront pas exception. Les observateurs non avertis verront cet événement comme la preuve que la démocratie avance au Maroc ». « En réalité, les élections générales ne sont que le dernier réajustement de la relation entre la monarchie et le PJD », écrit Moulay Hicham avant de commenter: « cette élection peut aussi être une opportunité de rebattre les cartes du jeu politique. Le palais pourrait soutenir la montée du parti centriste proche de lui, le Parti Authenticité et Modernité (PAM), et reléguer le PJD au rôle de partenaire mineur au sein du gouvernement. Et Moulay Hicham de conclure que « le but des élections à venir est donc de poursuivre lebusiness as usual. Le pouvoir va confirmer l'influence du PJD, éventuellement limité par le succès de partis plus proches de la monarchie, tout en montrant aux observateurs qu'elle reste en faveur d'une transformation démocratique. Malgré leur aversion mutuelle, le Parti islamiste et la monarchie sont liés comme des frères siamois. Les deux sont des forces contre-révolutionnaires responsables du détournement du « printemps arabe » au Maroc ».