Le président William Ruto a indiqué, peu après son investiture en 2022, que Rabat et Nairobi avaient convenu d'améliorer leurs relations, «entre autres dans les domaines du commerce, de l'agriculture, de la santé, du tourisme et de l'énergie». «Le Kenya soutient le cadre des Nations unies comme mécanisme exclusif pour trouver une solution durable au différend du Sahara», avait insisté M. Ruto, entretemps. Le ministre kényan des affaires étrangères, Musalia Mudavadi, est attendu en fin de semaine à Rabat pour présider, lundi 26 mai, à l'ouverture solennelle de la toute première ambassade du Kenya au Maroc, a appris Barlamane.com de ses sources. La cérémonie se tiendra en présence de son homologue marocain, Nasser Bourita, scellant un rapprochement historique entre Rabat et Nairobi. Dans l'invitation adressée par Jessica Gakinya, première ambassadrice du Kenya accréditée auprès du royaume, il est précisé que l'inauguration se déroulera lundi 26 mai dans les nouveaux locaux diplomatiques situés dans le quartier de Souissi. Ce déplacement, le premier de Musalia Mudavadi dans la capitale marocaine en tant que chef de la diplomatie kényane, marque également une première bilatérale : jamais auparavant un ministre des affaires étrangères du Kenya n'avait effectué de visite officielle en terre marocaine dans un cadre exclusivement diplomatique. Ce moment intervient peu après l'adoption, par le gouvernement du président William Ruto, du document de politique étrangère n° 1 de 2025, feuille de route doctrinale kenyane. Si le texte réitère sans détour l'adhésion de Nairobi au principe d'une seule Chine, il passe sous silence tout positionnement explicite sur le Sahara — une absence d'autant plus notable que les versions antérieures faisaient état du «droit inaliénable des peuples à disposer d'eux-mêmes, y compris celui [du peuple sahraoui].» Cette suppression, avalisée par la commission parlementaire chargée de la défense, du renseignement et des affaires étrangères, aurait été justifiée par «l'évolution des équilibres géopolitiques contemporains», selon les termes employés dans le rapport final. Cette annonce consacre un désengagement amorcé, déjà perceptible lors de l'épisode survenu peu après l'entrée en fonctions du président Ruto : en septembre 2022, un message publié sur les réseaux sociaux annonçait que le Kenya «ne reconnaît plus» le Polisario. Bien que cette déclaration ait été supprimée dans les heures qui suivirent, le message diplomatique a été capté par les autorités marocaines. Dans la foulée, Nairobi a rappelé son ambassadeur auprès de la rasd, Peter Katana Angore, dont la nomination, en 2022. Dans un entretien accordé à la presse en 2023, Korir Sing'Oei, secrétaire principal kenyan aux affaires étrangères, avait justifié ce rappel par «l'absence de perspectives commerciales significatives.» Le Maroc, lui, a multiplié les efforts diplomatiques sur le continent pour infléchir les équilibres au sein de l'Union africaine (UA). À cet égard, l'ouverture de l'ambassade kényane consacre un approfondissement sans précédent dans les relations bilatérales entre les deux pays. Selon des sources diplomatiques bien informées, la visite prochaine du président Ruto au Maroc se précise. Pour rappel, dans un discours en août 2022, le roi Mohammed VI a exhorté les pays partenaires du Maroc à «clarifier» leur position sur la question du Sahara et à le soutenir «sans aucune équivoque.» Ce dossier est «le prisme à travers lequel le Maroc considère son environnement international», a affirmé le souverain.