Le dernier Rapport d'évaluation des menaces cybernétiques en Afrique 2025, publié par l'Organisation internationale de police criminelle (Interpol), révèle une progression vertigineuse des alertes liées aux escroqueries numériques dans plusieurs pays africains, atteignant jusqu'à +3 000 % dans certains cas. Le Maroc figure parmi les Etats confrontés à une recrudescence significative, en particulier sur le terrain des extorsions numériques à caractère sexuel. L'étude de 36 pages, consultée par Barlamane.com et fondée sur des données recueillies auprès de 49 services répressifs africains, met en évidence l'essor de techniques de fraude de plus en plus élaborées, rendues possibles par l'usage détourné de l'intelligence artificielle et l'exploitation de vulnérabilités institutionnelles persistantes. L'Afrique exposée à quatre menaces dominantes Le rapport identifie quatre types de délits numériques prépondérants : les escroqueries en ligne (dont le hameçonnage), les attaques par rançongiciel, la fraude au courrier électronique professionnel (BEC), et la sextorsion numérique. À eux seuls, les courriels frauduleux et les faux sites représentent plus du tiers des incidents rapportés sur l'ensemble du continent. Des Etats comme la Zambie, l'Egypte, le Kenya ou le Maroc ont enregistré une hausse brutale du nombre de tentatives d'escroquerie, notamment à travers des messages frauduleux simulant des communications officielles ou bancaires. Grâce à des algorithmes sophistiqués, les fraudeurs se font passer pour des institutions ou des marques légitimes, rendant la supercherie difficilement détectable par les victimes. Données médicales dérobées, administrations paralysées Parallèlement, les attaques par rançongiciel connaissent une intensification préoccupante. L'Afrique du Sud, l'Egypte, le Nigéria et le Kenya ont été les plus affectés par des intrusions ciblant des établissements hospitaliers, des agences gouvernementales ou des opérateurs d'infrastructures critiques. Le Département sud-africain de la défense a vu plus de 1,6 téraoctet de données confidentielles siphonnées par des cybercriminels. Au même moment, la société Telecom Namibia a signalé une faille ayant compromis plus de 492 000 fichiers sensibles. Ces attaques ont provoqué des interruptions de service majeures, révélant la fragilité des architectures numériques publiques face à des groupes organisés et dotés de moyens techniques redoutables. Sextorsion numérique : le Maroc particulièrement touché Interpol alerte également sur la montée en flèche des cas de sextorsion numérique, alimentée par l'usage croissant de contenus explicites générés par l'intelligence artificielle. Le phénomène touche particulièrement le Maroc, l'Egypte et le Mali. Les réseaux criminels ciblent notamment les jeunes internautes, piégés dans des échanges intimes par des profils fictifs, puis soumis à des menaces de diffusion de ces contenus à des fins d'extorsion. Les répercussions de ces agissements sont multiples : détresse psychologique aiguë, ruine financière et atteintes irréversibles à la réputation des victimes. Malgré certaines opérations transfrontalières — telles que l'opération Serengeti — et des coopérations ponctuelles avec le secteur privé, Interpol déplore des moyens judiciaires encore inadaptés, une absence d'harmonisation législative et une formation lacunaire des agents. L'organisation appelle les Etats africains à ériger en priorité la souveraineté numérique, à accroître la vigilance citoyenne et à structurer une réponse continentale rigoureuse aux nouvelles formes de prédation numérique.