L'ancien haut fonctionnaire onusien Jamal Benomar a ravivé, par des propos polémiques la controverse autour des événements du Rif. Lors d'une intervention publique, ce diplomate controversé a déclaré que «le maintien en détention des activistes du Hirak du Rif constitue une violation flagrante du droit marocain et du droit international», ajoutant que cette situation «contredit les slogans relatifs à l'équité, à la réconciliation et au respect des droits de l'homme». Or, ce mouvement de contestation, qui avait agité le nord du pays en 2016 et 2017, ne s'était pas limité à des rassemblements pacifiques. Des affrontements violents avaient éclaté, faisant plusieurs policiers blessés, des bâtiments publics saccagés, des commerces incendiés et un climat d'insurrection documenté par des rapports officiels. Vingt ans de prison : telle était la peine infligée à quatre de ses meneurs, accusés de «complot visant à porter atteinte à la sécurité de l'Etat». Trois autres ont été condamnés par la chambre criminelle de la cour d'appel de Casablanca à des peines de réclusion variées. Un parcours international marqué par les échecs Ce discours véhément n'est que le dernier épisode d'un itinéraire diplomatique jonché d'échecs retentissants. Envoyé par l'Organisation des Nations unies (ONU) en Afghanistan, M. Benomar avait reconnu l'effondrement du projet occidental dans ce pays, admettant lui-même que «le projet américain et occidental en Afghanistan a échoué car il n'a pas intégré les talibans dans la solution», ajoutant qu'il aurait fallu «dialoguer avec eux dès 2002». Nommé sur le dossier irakien, il se targue d'avoir critiqué la politique américaine, condamnant la dissolution de l'armée et l'éviction du Parti Baas. Pourtant, nul résultat tangible n'est venu confirmer ses prises de position tardives et théoriques, laissant derrière lui un pays exsangue, fragmenté et livré aux convulsions sectaires. L'illusion yéménite, dernière étape d'une série de ratés Chargé en 2012, par le secrétaire général des Nations unies de l'époque, Ban Ki-moon, d'une médiation au Yémen, M. Benomar promettait une issue inclusive. Après avoir rencontré l'ancien président Ali Abdallah Saleh, des partis traditionnels et une jeunesse insurgée, il a proclamé que «les revendications des jeunes étaient légitimes et qu'il fallait les convertir en un processus politique impliquant tous les Yéménites». Mais la mise en œuvre échoue. Les conclusions du dialogue national demeurent lettre morte, les factions s'enlisent dans leurs querelles et le pays sombre dans une guerre interminable. Pis encore, selon les propres termes de M. Benomar, «les puissances membres permanentes du Conseil de sécurité ont vu dans le Yémen, dès l'éclatement de la guerre, une occasion de vendre des armes et de conclure des contrats d'une ampleur extravagante». Des propos désapprouvés par les chancelleries occidentales. Un discrédit consommé auprès des capitales régionales Ses ultimes manœuvres l'ont exposé à la défiance des Etats du Golfe, l'accusant d'avoir été trompé par les Houthis, lesquels négociaient la paix tout en poursuivant leur conquête. Dans les faits, le Yémen s'effondre entre les mains de factions rivales tandis que la médiation onusienne s'étiolait dans l'impuissance. Sa démission, en avril 2015, a consacré l'échec d'une mission dont il avait lui-même reconnu la stérilité. Aujourd'hui, celui qui était très contesté s'érige en critique acerbe de Rabat, reniant le devoir de mesure que requiert tout ancien serviteur de la légalité internationale. Après avoir multiplié les revers sur les terrains les plus sensibles de la scène internationale, Jamal Benomar semble désormais vouloir solder sa carrière dans le ressentiment, usant de ses tribunes pour ternir l'image de son pays, en proie à des accusations infondées et à une rhétorique qui sacrifie la nuance sur l'autel de l'amertume. De son pays ? le mot est osé, puisque l'homme se sent aujourd'hui plus britannique que marocain.