Le département d'Etat américain a maintenu le Maroc en catégorie Tier 2 dans son rapport 2025 sur la traite des personnes, tout en soulignant une progression marquée des efforts. Le texte observe que «le gouvernement du Maroc ne satisfait pas pleinement aux normes minimales pour l'élimination de la traite mais déploie des efforts significatifs pour y parvenir». Selon Washington, ces efforts se traduisent par une intensification des enquêtes, un nombre accru de poursuites, et une identification renforcée des victimes. «Le gouvernement a, en partenariat avec une organisation internationale, conçu un guide d'entretien des victimes et coopéré avec une ONG pour ouvrir un centre d'accueil offrant des services spécialisés». Toutefois, le rapport constate des lacunes, notamment dans l'orientation systématique des victimes vers les structures disponibles, souvent sous-utilisées. Les constats judiciaires et les avancées législatives Le rapport rappelle que «la loi 27.14 criminalise la traite sexuelle et la traite par le travail, assorties de peines allant de cinq à dix ans de prison et de lourdes amendes, portées jusqu'à trente ans dans les cas impliquant des enfants». Ces peines, juge-t-il, sont suffisamment sévères et comparables à celles prévues pour des crimes graves tels que le viol. En matière répressive, les chiffres traduisent une montée en puissance : «en 2024, le Maroc a enquêté sur 204 suspects dans de nouvelles affaires, contre 119 suspects en 2023». Le nombre de poursuites a atteint 213, contre 171 l'année précédente. Les juridictions ont condamné 60 trafiquants, dont 53 pour traite sexuelle et sept pour traite par le travail. Le département d'Etat relève que «le parquet général a maintenu deux magistrats spécialisés dans chaque cour d'appel, soit 44 procureurs au total», et mentionne la conclusion d'un accord bilatéral avec la Côte d'Ivoire pour coordonner les enquêtes et la protection des victimes. Mais le document souligne que les forces de l'ordre et les agents de première ligne manquent encore de formation, ce qui entrave l'identification des cas. La prise en charge des victimes et les mécanismes de prévention Les progrès sont également visibles dans la protection. Le rapport note que «452 victimes potentielles ont été recensées en 2024, dont 229 confirmées, contre 169 l'année précédente». Les autorités ont fourni un hébergement à 34 victimes, une assistance médicale à 53 personnes, un appui psycho-social à 14 et une aide juridique à près de 200. Le texte insiste sur la mise en place de guides pratiques d'identification, de procédures standardisées pour les foyers d'accueil, et l'ouverture d'un centre spécialisé à Tanger, en partenariat avec une ONG et une organisation internationale. Un second centre a été achevé à Fès mais n'était pas encore opérationnel à la fin de la période étudiée. Le département d'Etat relève que «le Maroc dispose de quarante centres d'accueil dans les hôpitaux et de cellules spécialisées dans les tribunaux, permettant aux victimes, notamment femmes et enfants, d'accéder aux soins et à l'assistance». Toutefois, il estime que l'identification proactive demeure faible, et que les abris restent insuffisamment utilisés. Du côté préventif, la Commission nationale de lutte contre la traite, placée auprès du ministère de la justice (MOJ), a tenu cinq réunions en 2024. «Le gouvernement poursuit la stratégie nationale 2023-2030 et son plan 2023-2026, menant des campagnes de sensibilisation à travers projections, affichages et réseaux sociaux». Une ligne téléphonique gratuite et une plateforme numérique ont été mises en place pour signaler des cas, mais leur fonctionnement a été jugé irrégulier. Enfin, le rapport salue l'application de la loi 19.12, qui impose aux employeurs de travailleurs domestiques étrangers de fournir des contrats conformes aux normes nationales, interdit le recours à des intermédiaires pour le recrutement, et proscrit les frais imposés aux travailleurs. Le texte souligne également que «les forces marocaines engagées dans les missions de maintien de la paix de l'ONU reçoivent une formation spécifique et opèrent selon une règle de tolérance zéro». Si le département d'Etat appelle à soutenir les moyens humains et financiers contre le phénomène, il conclut néanmoins que «le Maroc accroît ses efforts et améliore ses dispositifs, même si des insuffisances persistent dans l'identification, la protection et la coordination».