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Hydrogène vert : Mapping du coût à l'export
Publié dans Challenge le 10 - 06 - 2025

Le coût de l'hydrogène vert produit en Afrique et destiné à l'export vers l'UE risque d'être plus élevé, souligne un rapport publié par des chercheurs de l'université d'Oxford. Décryptage !
C'était au Forum économique mondial à Riyad que le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a estimé que ce gaz bas carbone n'était pour l'instant « qu'au stade embryonnaire » et qu'il est illusoire de s'attendre à une production de 20 millions de tonnes annuellement, comme souhaité par l'Union européenne dès 2030. Aujourd'hui, le constat, au demeurant amer, est que bien que ce gaz ait suscité un grand espoir chez plusieurs spécialistes, car vu comme un moyen de réussir la transition énergétique mondiale, il est évident qu'à ce jour, cet engouement n'est plus au beau fixe. Dans un rapport récent publié par des chercheurs de l'Université technique de Munich, l'Université d'Oxford et l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich dans Nature Energy, il est révélé que le coût réel de l'hydrogène vert africain destiné à l'exportation vers l'Europe est sous-estimé, et pourrait s'avérer bien plus élevé que les projections optimistes avancées ces dernières années. Le rêve d'un corridor énergétique Sud-Nord, dans lequel le continent africain jouerait un rôle de pourvoyeur stratégique d'hydrogène vert à l'Europe, se heurte ainsi à une série de contraintes majeures. Les chercheurs identifient des coûts d'infrastructure, de transport maritime et de reconversion industrielle souvent passés sous silence dans les scénarios politiques. À cela s'ajoutent des incertitudes sur la stabilité réglementaire et les risques géopolitiques qui pèsent sur la fiabilité des chaînes d'approvisionnement à long terme. Dans le détail, le rapport montre que même dans les régions les plus propices – Maroc, Egypte, Mauritanie ou Namibie –, le coût complet de l'hydrogène vert exporté pourrait dépasser les 5 €/kg à horizon 2030, bien au-dessus du seuil de compétitivité estimé autour de 2 à 3 €/kg pour l'industrie européenne. Les frais liés à la compression, la liquéfaction, le transport maritime, puis la regazéification ou reconversion dans les ports européens grèvent lourdement le prix final. De plus, l'incertitude sur la demande européenne réelle, encore floue malgré les annonces, ajoute une couche de complexité à la rentabilité des projets.
Ce rapport sort à un moment où le Maroc travaille sur son offre. Ce paysage mitigé reflète les hésitations des investisseurs à se lancer dans de tels projets nécessitant des capitaux importants pour un marché peu lisible.
« L'Offre Maroc » : entre engouement et défis…
Contacté par Challenge, l'expert en énergie Amine Bennouna nous éclaire sur la situation. Quatre raisons « objectives » semblent être à l'origine de cet engouement : * »La première raison est due à l'existence d'un off-taker local (OCP) dont l'extraction de phosphate devrait passer de 41 [Mt] en 2022 à 70 Mt en 2027 et une production d'engrais qui nécessitera 2 Mt d'ammoniac en 2031, dont 1 Mt d'ammoniac vert qui nécessiterait 0,2 Mt d'hydrogène vert à produire au Maroc. La deuxième raison vient de l'intention de l'UE d'importer 10 Mt d'hydrogène renouvelable par an en 2030, adossés à 10 Mt à produire sur place, subventionnés à 1,8 G€. La 1ère tranche de 0,72 G€ a alloué 0,46 €/kg en moyenne à 7 projets produisant 1,58 Mt/an avant 2029 sur 4 pays (P : 337 M€, E : 255 M€, N : 81 M€, FIN : 45 M€). La troisième raison est arithmétique : l'AMI s'adressait à tous les métiers de l'écosystème lié à l'hydrogène vert, depuis la génération de l'énergie électrique renouvelable jusqu'à la production, la manutention et le stockage de l'hydrogène produit, avec tous les métiers industriels et intermédiaires, qu'ils soient de développement, de services ou de financement. La quatrième raison est un mix de conditions scientifiquement quantitatives et qualitatives qui ont fait que des cabinets spécialisés avaient déjà placé le Maroc dans le top 10 des pays les plus prometteurs pour la production d'hydrogène vert. »
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De son côté, l'expert en Power-to-X Yassine Zegzouti déclare : « Premièrement, je pense que les commentaires et les réactions sur l'étude d'Oxford ont principalement orienté l'analyse vers le fait que la production d'hydrogène vert dans certains pays africains et son exportation vers l'Europe ne sont pas compétitives. Cependant, le papier visait plutôt à démontrer ce qu'il faudrait mettre en place pour rendre cette production d'hydrogène vert plus compétitive à l'horizon 2030. En effet, avec les conditions actuelles du marché, la production d'hydrogène vert est actuellement plus coûteuse que celle des autres types d'hydrogène (gris et bleu). D'ailleurs, l'étude s'est basée sur les conditions actuelles du marché, marqué par des coûts de financement de projets élevés en raison des taux d'intérêt macroéconomiques, des risques liés à la sécurité et aux infrastructures, ainsi que de l'absence de soutien politique substantiel. Cela conduit à la conclusion que les importations d'hydrogène vert sont non compétitives par rapport à la production locale européenne ou à d'autres sources mondiales dans les conditions actuelles. »
Et d'ajouter : *« Cependant, le potentiel de réduction des coûts est plus élevé pour l'hydrogène vert. Il faudrait simplement créer les conditions favorables pour le rendre économiquement viable, par la baisse des prix de l'électricité renouvelable, la réduction des coûts des électrolyseurs, le développement des infrastructures et la diminution des coûts de transport. À cet égard, le Maroc est en train de mettre en place les conditions nécessaires pour réduire le coût de production d'hydrogène vert, notamment par l'Offre Maroc Hydrogène qui propose un cadre opérationnel pour les investisseurs et les développeurs de projets afin d'établir leur projet d'hydrogène vert et ses dérivés. En parallèle, le Maroc poursuit l'évolution des infrastructures mises en place, comme les ports et les stations de stockage (cavités salines), ainsi que les incitations fiscales proposées. Ces efforts positionnent le Maroc parmi les pays capables de produire de l'hydrogène à un prix compétitif de 0,8–1,6 US$/kg H2 (BloombergNEF, Hydrogen Economy Outlook, 2020, p.28). Bien que ces efforts soient importants, ils ne sont évidemment pas les seuls nécessaires. »*
H2 vert : pas encore de vrai « marché », mais quel est son prix ?
* »Si le prix de l'hydrogène vert devait entrer en concurrence directe avec ceux du gasoil et du gaz naturel de ce premier trimestre de 2024, il faudrait que les prix de H2 soient environ 7 fois plus faibles que le prix moyen du marché d'aujourd'hui. Et si la courbe d'apprentissage devait suivre le 'learning rate' du solaire photovoltaïque, il faudrait que les ventes cumulées se multiplient au moins par 40, ce qui ne devrait pas se produire avant la moitié de la décennie 2030-2040″*, prévient l'expert. Selon les données de l'expert, un montant des ventes chiffré à 1 320,19 M$ par le CHP1 aboutit à un total de 0,17 Mt vendues, soit 0,17 % des 100 Mt totales de tout H2 ; un montant des ventes chiffré à 3 200 M$ par le GVR2 aboutit à un total de 0,41 Mt vendues, soit 0,41 % des 100 Mt totales de tout H2. Au final, la masse de H2 vert se situe entre 0,17 et 0,41 % du total, ce qui, malgré l'énorme incertitude, vérifie l'information de l'IEA3 à moins de 1 %. Selon les calculs de l'AIE, une augmentation de 3 points de pourcentage du coût de financement pourrait augmenter le coût total d'un projet d'hydrogène produit à partir d'électricité renouvelable de près d'un tiers. De ce fait, plusieurs projets ont vu leurs estimations de coûts initiaux réévaluées jusqu'à 50 % de plus. Cette hausse des coûts a une influence directe sur la compétitivité d'un tel procédé. Etant donné que jusqu'à 70 % du coût final d'un kilogramme d'hydrogène dépend du prix de l'électricité, le marché n'a pour l'instant aucun intérêt à adopter l'hydrogène vert sans incitations.*
Pour l'expert, la production d'hydrogène va coûter trop cher si l'on souhaite l'utiliser comme combustible. * »Il est admis que le coût de H2 doit descendre sous 1 $/kg pour les usages énergétiques. »* Le coût actualisé de la production d'hydrogène (LCOH) renouvelable est estimé à environ 4,5 à 6,5 $… * »Cependant, le coût de production d'hydrogène renouvelable devrait baisser à 2,5 à 4,0 $/kg d'ici 2030, grâce aux progrès de la technologie des électrolyseurs, économies d'échelle, améliorations de conception et réduction du coût de l'énergie renouvelable. »*, nuance l'expert.
Que faire ?
« Comme cela a été mentionné dans l'étude d'Oxford, des politiques de réduction des risques (de-risking) et des interventions stratégiques sont cruciales pour surmonter les défis financiers et géopolitiques majeurs auxquels sont confrontées les exportations africaines d'hydrogène vert. Les mesures de réduction des risques, telles que les garanties gouvernementales, les assurances, et le soutien des organisations internationales comme la Banque mondiale ou le Programme des Nations Unies pour le développement, peuvent réduire considérablement les coûts du capital et atténuer les risques liés à l'instabilité politique, à l'expropriation et aux préoccupations sécuritaires. De plus, le choix stratégique des sites dans des régions politiquement stables, le développement des infrastructures et la mise en place de politiques ciblées – telles que la promotion de l'utilisation industrielle locale et les accords commerciaux intra-continentaux – sont essentiels pour renforcer la résilience des projets et leur compétitivité. Au Maroc, beaucoup de ces mesures de réduction des risques sont déjà mises en place ou en cours de développement. Le Maroc est un pays très stable et entretient des partenariats solides avec différentes organisations internationales. Il veille également à assurer une bonne intégration industrielle, tirant parti de son expérience dans les énergies renouvelables », alerte l'expert.
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« Il faut aussi rappeler qu'en dépit de la mise en place de toutes ces conditions favorables pour rendre l'hydrogène vert compétitif, il est crucial de disposer d'acheteurs engagés (off-takers) qui puissent donner une impulsion au marché de l'hydrogène vert. Cet engagement est essentiel pour promouvoir le marché de l'hydrogène vert et ses dérivés. Malheureusement, il est difficile de trouver des acheteurs pour l'hydrogène vert actuellement, comme le montre le cas du projet de 2,2 GW de Neom en Arabie Saoudite, qui rencontre une pénurie de demande (Bloomberg). En Mauritanie, la société CWP Global a également suspendu son projet phare de production d'hydrogène et d'ammoniac verts en raison de l'absence d'accords d'achat fermes nécessaires à la viabilité économique du projet. Avoir des acheteurs engagés est donc crucial pour instaurer la confiance sur le marché de l'hydrogène vert. Heureusement, des initiatives comme Hincto, qui agit comme acheteur public intermédiaire, soutenu par un financement d'au moins 2,5 milliards d'euros, fourni par le gouvernement allemand et partiellement par les Pays-Bas, permettent de surmonter cette difficulté.
Au-delà de la compétitivité de l'hydrogène vert, un autre point important est qu'il faut également étudier la faisabilité de la production des dérivés de l'hydrogène, comme l'ammoniac vert, le méthanol et les e-fuels, qui représentent également un défi pour être compétitifs sur les marchés internationaux par rapport aux solutions conventionnelles. Selon l'IEA, la solution envisageable pour les rendre compétitifs à long terme passe par un soutien politique substantiel, via la tarification du CO2 ou des taxes sur les émissions de CO2.
À ce sujet, il serait nécessaire de commencer à travailler sur le marché du carbone au Maroc et de lancer une discussion sur les initiatives existantes. Bien que certaines initiatives aient vu le jour, il faudrait renforcer la politique carbone au Maroc et mettre en place des taxes sur les émissions de carbone produites par des procédés polluants. Cela permettrait au Maroc d'avoir un prix compétitif pour ses produits à base d'hydrogène vert. Enfin, ces études sont importantes pour éclairer le chemin pour tous les acteurs de l'hydrogène vert. Cependant, elles reposent fortement sur des prévisions de réduction des coûts des énergies renouvelables, des électrolyseurs et des infrastructures, en supposant des avancées technologiques significatives et des baisses de coûts. Ces projections, bien qu'informées par les tendances actuelles, sont intrinsèquement incertaines. L'échec à réaliser ces réductions de coûts pourrait modifier considérablement l'évaluation de la compétitivité. D'ailleurs, c'est pourquoi on trouve beaucoup de différences dans les prévisions des coûts de l'hydrogène en 2030 et 2050, établies par Bloomberg, l'IEA et IRENA... »


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