La lettre adressée par Emmanuel Macron au Premier ministre a levé le voile sur une rupture désormais consommée entre Paris et Alger. Le président français y acte la suspension de l'accord bilatéral de 2013, dénonce les blocages imposés à l'ambassade de France, et exige une application rigoureuse des mesures de réadmission. Au même moment, Khaled Drareni, représentant de Reporters sans frontières (RSF) pour l'Afrique du Nord, publiait un message furibond sur Twitter, s'alignant ouvertement sur les positions du régime algérien, sans jamais dire un mot sur ses victimes. Malgré ses fonctions au sein d'une organisation censée défendre la liberté de la presse, M. Drareni n'a, à aucun moment, dénoncé la répression systématique des journalistes et des écrivains en Algérie. Le président français Emmanuel Macron a durci le ton : dans une lettre confidentielle datée du 6 août, le président français a ordonné la suspension immédiate de l'accord franco-algérien de 2013 sur les exemptions de visa diplomatique. Ce revirement radical consacre une rupture assumée avec Alger, que le chef de l'Etat accuse de ne plus respecter ses engagements en matière migratoire, consulaire et sécuritaire. «La France doit être forte et se faire respecter», écrit le président, avant de préciser que «cette règle de base vaut pour l'Algérie aussi». Il appelle à activer sans délai le levier visa-réadmission (LVR) prévu par la loi de 2024 afin de bloquer l'octroi de visas à tous les détenteurs de passeports officiels algériens. Il évoque par ailleurs «l'attentat de Mulhouse» pour justifier la nécessité d'expulser les ressortissants classés à haut risque : «Le prolongement du séjour de personnes dangereuses sur notre territoire ne peut plus être toléré». Khalid Drareni se sert de RSF pour servir les intérêts du régime algérien Barlamane.com avait lancé l'alerte : les ONG internationales sont noyautées par des éléments inféodés à des régimes autoritaires. Outré par le revirement présidentiel français, Khaled Drareni (RSF) s'est fendu d'un message incendiaire sur Twitter, dénonçant ce qu'il qualifie de trahison politique. «Emmanuel Macron a tranché : il s'est rangé derrière les outrances de son ministre de l'Intérieur sur la question algérienne», affirme-t-il. Et il poursuit, en accusant l'Elysée d'avoir «piétiné les espoirs d'apaisement entre Alger et Paris». Emmanuel Macron a tranché : il s'est rangé derrière les outrances de son ministre de l'Intérieur sur la question algérienne, piétinant les espoirs d'apaisement entre Alger et Paris. À ceux qui croyaient encore à une normalisation, il a opposé un choix politique assumé : celui de... pic.twitter.com/addDvB5w5l — Khaled Drareni (@khaleddrareni) August 6, 2025 Pour M. Drareni, les justifications invoquées — absence de coopération migratoire, expulsions diplomatiques — ne seraient que des prétextes. «Ce sont des excuses. La vraie raison, c'est l'absence de grâce présidentielle pour Boualem Sansal», avance-t-il, avant de conclure : «Vous parlez de fermeté ? Mais c'est l'Elysée qui a déserté le terrain de la vérité.» Dissonance entre fonction publique et loyauté politique Cette charge aurait pu passer pour un simple emportement militant, si elle n'émanait pas du représentant officiel de Reporters sans frontières (RSF) pour l'Afrique du Nord. Depuis 2022, Khaled Drareni, naguère farouche opposants du régime algérien actuel, occupe ce poste stratégique censé garantir la neutralité du plaidoyer en faveur des journalistes réprimés dans la région. Or, en prenant parti de manière aussi explicite pour le pouvoir algérien — au moment même où Paris documente des entraves diplomatiques systématiques —, il brouille gravement la ligne de l'organisation. «La fermeté, la vraie, c'est celle d'un peuple qu'on insulte quand on ose remettre en question l'existence même de sa nation», a-t-il même écrit, reprenant mot pour mot l'élément de langage du pouvoir algérien après les propos de M. Macron en 2021 sur l'histoire du pays. Une fonction à double fond RSF, de son côté, présente la mission de Drareni comme purement professionnelle : il s'agit de «développer le plaidoyer public et rédactionnel», «suivre des dossiers sensibles», et «coordonner les campagnes prioritaires» dans six pays — dont le Maroc, explicitement désigné pour ses journalistes «injustement incarcérés». Mais le déséquilibre est flagrant : tandis que l'organisation multiplie les campagnes contre Rabat, elle reste d'une prudence extrême à l'égard d'Alger. Les accusations de torture, de surveillance extraterritoriale et les liens entre services de renseignement et certains correspondants ne font l'objet d'aucun traitement de fond. Le ver est dans le fruit Khaled Drareni, présenté comme un défenseur de la liberté d'expression, agit désormais en acteur aligné sur les intérêts algériens. Son tweet n'est pas un dérapage : c'est un aveu. Il confirme ce que plusieurs diplomates à Paris soupçonnent depuis longtemps — à savoir que l'appareil algérien a placé un homme à un poste-clé dans une ONG de référence. L'Elysée, de son côté, ne s'y est pas trompé. En refusant la moindre concession, en bloquant l'octroi de visas diplomatiques et en conditionnant le retour de l'ambassadeur à Alger à une reprise intégrale de la coopération, Emmanuel Macron pose les termes d'un bras de fer frontal. Khalid Drareni, qu'il le veuille ou non, a choisi son camp. Le Maroc, cible récurrente des rapports de RSF, réagira certainement.