HPS, Microdata, Distrisoft, GFI Maroc, Defim ou encore Orsys… Des entreprises qui ont en commun d'opérer dans le secteur des NTIC, mais aussi d'avoir été créées par d'anciens cadres de multinationales. Une génération de précurseurs des nouvelles technologies qui ont profité de leur expérience dans des firmes aussi réputées que Bull, Microsoft ou Unysis, pour se lancer dans l'entreprenariat. Pari réussi, puisque leurs entreprises ont atteint leur rythme de croisière et que l'un d'entre eux vient même d'être élu patron des patrons. Etre cadre dans une multinationale peut receler bien des avantages quant à l'évolution de carrière. Mais, contrairement à ce que l'on peut penser de prime abord, ce n'est pas en interne que la chrysalide tend à devenir papillon. En effet, nombre d'anciens cadres de multinationales ont connu le tournant décisif dans leur carrière en volant de leurs propres ailes. Ces profils hautement qualifiés sont poussés par l'ambition, et par l'évidence que constitue cette opportunité de créer sa propre structure et de faire fructifier son expérience acquise dans des entreprises au savoir faire reconnu. Genèse d'un secteur En sondant le marché à la recherche de profils de ce genre, on s'aperçoit que le secteur des nouvelles technologies est particulièrement propice à ce genre de trajectoires. Ainsi, le numéro un mondial du secteur informatique dans les années 1980's, Bull, a fait office de vraie pépinière à ce niveau. Le meilleur exemple de réussite de ce genre n'est autre que le nouveau patron des patrons, excusez du peu ! En effet, Mohamed Horani fait partie de cette génération d'anciens cadres de Bull qui ont vite fait de se mettre à leur compte pour profiter des opportunités d'un secteur en pleine croissance à travers sa firme HPS. Il n'est toutefois pas le seul, un autre top-manager d'une entreprise évoluant dans les NTIC, Hassan Amor, a suivi le même cheminement en quittant Bull pour créer une société de distribution de matériel informatique, Microdata. La firme française a aussi cocooné des réussites entrepreneuriales au féminin. Saloua Karkri Belkziz a ainsi été derrière la création de GFI Maroc, elle a même connu un parcours similaire à celui de son désormais fameux ex-collègue, Horani, en présidant l'association des femmes chefs d'entreprise. Un autre ancien de Bull, Farid Elhafiane, a lui créé un distributeur de fournitures informatiques, Defim. Toutefois, la firme à l'arbre n'a pas l'exclusivité en ce domaine. Ses concurrents de l'époque, IBM et Burroughs (Unysis), ont tout autant irrigué le secteur naissant des nouvelles technologies en nouveaux patrons. Iba Rachid, ancien ingénieur commercial chez Buroughs-Unysis, a choisi de se lancer dans le domaine des services d'ingénierie en créant Orsys. Depuis, il a cédé cette société pour en créer une autre. Enfin, le numéro un de l'édition de software Microsoft, a vu ses rangs désertés par quelques-uns de ses meilleurs éléments au Maroc qui sont partis pour créer Distrisoft sous la houlette de Karim Radi Ben Jelloun. Ce recensement d'anciens cadres devenus patrons n'est pas fortuit, car il renseigne sur des donnes essentielles du secteur à l'époque. D'abord, les nouvelles technologies n'en étaient qu'à leurs balbutiements au royaume, et les multinationales ayant investi le marché vierge marocain ont créé une dynamique. Les besoins profiléraient au gré de l'expansion du secteur, et comme cette expansion était exponentielle, bien des niches étaient à prendre. Les multinationales externalisent Les multinationales elles-mêmes appuyaient quelques-uns de leurs éléments pour externaliser des pôles entiers de leur activité. A titre d'exemple, Bull a souhaité externaliser son pôle de distribution au profit de ses anciens cadres. Hassan Amor a donc joui de l'appui et de la collaboration de ses anciens employeurs. Mais le top-manager ne s'est pas suffi du marché de Bull et a contacté d'autres constructeurs et compte désormais une carte commerciale très large. Toutefois, il ne faut pas croire que tous ces nouveaux patrons ont été appuyés par leurs anciens employeurs, car certains d'entre eux se sont placés en concurrence et non en complémentarité avec les structures où ils travaillaient. En tout cas, ils ont cela en commun qu'ils ont pour la plupart évolué dans des postes commerciaux. Les génies du technique ne sont pas forcément des entrepreneurs dans l'âme. « Etre patron est une vocation, et il faut surtout avoir un bon portefeuille clients», nous explique un cadre qui n'a pas souhaité se lancer dans l'aventure entreprenariale. Ceux qui ont réussi à se lancer se targuent de leur envie d'entreprendre, qui les a aidés à dépasser les débuts difficiles. Il ne faut pas oublier que passer du salariat à l'entreprenariat n'est pas chose aisée. Le risque est même assez élevé. Si l'on a cité les noms de ceux qui ont réussi, ceux qui n'ont pas pu mener à bien leur entreprise sont nombreux. Sans citer de noms, il nous suffit de dire que leurs entreprises ont été éphémères et n'ont pas survécu à l'épreuve du marché. Pour la plupart, ils sont revenus à leur statut de salariés en réintégrant des structures multinationales. En tout cas, le secteur des NTIC est maintenant peuplé d'entreprises créées par d'anciens cadres, dont un certain nombre a même choisi de fouler les travées de la bourse. C'est le cas de Microdata, Distrisoft ou encore HPS. Sans oublier que la fédération des nouvelles technologies fait partie des plus solidaires, puisque ce sont pour la plupart d'anciens collègues. Cet esprit de corps a très bien fonctionné en faveur de Mohamed Horani, ancien président de la fédération et nouveau président de la CGEM. Cet ancien cadre fait l'unanimité chez ses pères et défend désormais la cause des patrons de tout bord. Mustapha Lemkhente, DG de Premax Ancien cadre chez Bourroughs-Unysis, Mustapha Lemkhente a choisi de lancer sa propre entreprise de services informatiques, Premax. Il répond à nos questions pour illustrer toute une génération d'anciens cadres devenus patrons… Challenge Hebdo : comment vous-est venue l'idée de lancer votre propre entreprise ? Mustapha Lemkhente : je crois que c'est d'abord une question de tempérament. Car en intégrant la multinationale dans laquelle j'étais salarié, j'ai toujours eu comme objectif de lancer mon propre business. Au début, je me disais qu'après cinq ou six ans, je transformerais l'essai. Au final, il aura fallu huit ans pour concrétiser ma volonté d'entreprendre. C.H. : quels étaient les atouts à votre disposition pour mener à bien votre projet ? M. L. : mon principal atout, tout comme celui de tous ceux qui se sont lancés à la même époque, était l'expérience avec un constructeur de renom. Cela donne un certain savoir-faire à travers le transfert de savoir technique, mais surtout la connaissance pointue des besoins du client. C'est pour cela que les profils d'ingénieurs commerciaux ont été les plus nombreux à tenter l'expérience et à la réussir. C.H. : quelles sont les difficultés auxquelles vous avez dû faire face ? M. L. : le plus difficile est de gagner la confiance des gens. Le démarrage est par définition difficile, car on est petit et en recherche de références. Mais si on arrive à inspirer confiance à travers l'engagement et en offrant des concessions sur les tarifs, on peut glaner les premières références qui ouvrent la voie aux autres. Et c'est par ce biais qu'on arrive à pérenniser son entreprise.