D'importants efforts faits par le Maroc en la matière, mais persistance de beaucoup de goulots d'étranglement. Les autorités, interpellées, promettent d'activer les réformes en cours. L'amélioration du climat des affaires au Maroc a été au centre de la rencontre de haut niveau avec les chefs de gouvernement français et marocain. La rencontre organisée conjointement par la CGEM et le MEDEF aura été l'occasion de faire le point sur les différents acquis dans ce domaine. Contrairement à la tradition dans ce genre de rencontre où les officiels viennent prononcer des discours, la parole a été donnée en premier lieu aux opérateurs économiques pour témoigner de leurs expériences au Maroc, particulièrement en ce qui concerne les freins rencontrés durant l'accomplissement de leurs actes d'investissements. Les intervenants, tant marocains que français, sont unanimes à dire que des efforts importants ont été réalisés mais, de l'aveu même de Mohamed Naijb Boulif, le Maroc peut mieux faire. Passant en revue les différentes lois promulguées au cours de la dernière décennie, le ministre délégué auprès du Chef du gouvernement, chargé des Affaires générales et de la Gouvernance, a insisté sur la réforme de la loi sur la concurrence et les prix, favorable à l'ensemble des acteurs économiques. La concurrence n'est pas le seul point à avoir été soulevé par les intervenants qui ont énuméré d'autres problèmes, notamment le cadre juridique et réglementaire, la diversité des régimes, le code de l'urbanisme, la corruption, la lourdeur administrative, le problème de la TVA et les délais de paiement. D'ailleurs, l'assistance a eu droit à un cas concret, celui d'Air Liquide qui a dû faire face à des impayés énormes avec le ministère de la Santé, pour la vente de gaz médical aux hôpitaux publics. Un problème qui se pose de manière récurrente et qui nécessite l'intervention du ministre. Et fatalement le foncier ! Sur ce registre, Philippe de Richoufftz, du Cabinet Damas, a évoqué le problème de la diversité des régimes fonciers, une dizaine, ce qui peut surprendre les investisseurs, ainsi que la lenteur de la procédure d'immatriculation du foncier. Si, aujourd'hui, des avancées certaines ont été enregistrées dans l'amélioration du cadre juridique, d'autres sont encore au stade de projet. Maria Bahnini, conseiller juridique, estime que «le climat des affaires ne repose pas uniquement sur la quantité et la qualité des textes législatifs, mais aussi sur le management institutionnel et la bonne gouvernance». Dans ce contexte, elle pointe du doigt un problème judiciaire majeur auquel les entreprises sont confrontées : l'indisponibilité de la jurisprudence. Cela se traduit par une perte de temps considérable devant les tribunaux et une gestion aléatoire des affaires similaires. Elle s'est par contre félicitée de la création par le Maroc d'institutions qui accompagnent et protègent l'investissement, notamment les CRI, bien que ces guichets ne fonctionnent pas avec la même efficacité. Dans ce sens, le conseiller juridique estime que des efforts doivent être encore faits, notamment en matière de collecte d'informations pertinentes au profit des investisseurs. Dans cet ordre d'idées, Ahmed Rahhou, président de la Commission climat des affaires et partenariat public/privé de la CGEM, propose que ces CRI soient transformés en observatoires locaux, une sorte de tour de contrôle qui émet des alertes en cas de problème afin que les autorités puissent trouver des solutions rapidement. L'objectif étant la fluidification de l'acte d'investir au Maroc. Dans cette même perspective, Ahmed Rahhou a cité quatre thèmes majeurs sur lesquels la CGEM travaille en étroite collaboration avec les autorités publiques. Le premier concerne la difficulté de trésorerie, qui résulte essentiellement du non-respect des délais de paiement. «Un effet de cascade qui pénalise fortement l'investissement», précise-t-il. Aujourd'hui, avec la promulgation de la loi 32-10 qui fixe le taux à 10% pour la sanction des mauvais payeurs, ce problème est en voie de résolution. Concernant la TVA et les problèmes qu'elle engendre, A. Rahhou a souligné que des mesures sont en cours pour satisfaire la demande de remboursement et pour que la TVA soit neutre. Qu'elle soit collectée sur la valeur ajoutée créée par l'entreprise, comme son nom l'indique. Il a insisté, entre autres, sur la commande publique comme levier de développement, et sur l'instauration de l'équité fiscale et, partant, la lutte contre la concurrence sauvage. Des pouvoirs publics à l'écoute Très attentifs aux différents témoignages des opérateurs français installés au Maroc et aux interventions d'acteurs économiques nationaux, le ministre de l'Economie et des Finances, Nizar Baraka, et Mohamed Najib Boulif, ont pris le soin de répondre en détail aux doléances des investisseurs. Ainsi, l'argentier du Royaume a d'abord souligné que l'exécutif s'inscrit dans une démarche volontariste, transparente et de partenariat, faisant allusion à la publication des projets de lois sur le site du Secrétariat général du Gouvernement, ainsi qu'au travail des comités, en collaboration avec la CGEM. Ce constat fait, le ministre a énuméré les différentes lois adoptées et celles en cours qui visent l'amélioration du climat des affaires au Maroc. A ce titre, il cite la loi en cours de finalisation sur le partenariat public/privé, la loi relative à la création du marché des capitaux, la refonte du texte sur la Bourse, la nouvelle loi bancaire qui permet la création de banques participatives ... Il a par ailleurs rassuré les opérateurs en annonçant la création d'une nouvelle cellule qui veille au respect de la loi 32-10, et à la réduction des délais de paiement, l'Etat ayant été largement qualifié de mauvais payeur. Par ailleurs, en matière de TVA, le nombre des entreprises remboursées à octobre 2012 est en hausse de 30%, sachant que l'effort a porté dans un premier temps sur les PME. Aussi, l'amnistie fiscale en faveur des entreprises ayant basculé de l'informel vers le formel a permis à 4.000 unités d'intégrer la liste des assujettis. En plus de cela, il y a la baisse de 30 à 10 % de l'IS pour les entreprises qui réalisent un résultat inférieur à 300.000 DH. Pour sa part, Mohamed Najib Boulif a insisté sur le fait que les stratégies réformatrices de la TPE sont en phase finale d'adoption tandis que la stratégie nationale des risques, naturels ou non, est en cours. Les deux responsables ont manifesté la prédisposition de l'exécutif à supprimer les goulots d'étranglement qui freinent l'investissement !