Lutte contre la corruption : Une convention de partenariat signée entre l'INPPLC et le Pôle DGSN-DGST    Coopération économique : Bourita participe à la 2e édition du Forum « Invest In Sénégal » à Dakar    Maroc-France : Signature de deux conventions de coopération dans le domaine agricole    Partenariat économique Maroc-Argentine : L'industrie pharmaceutique et l'IT en renfort    Santé : Entre problématiques et avancées, Tehraoui fait le point    Cinéma: Trois films marocains distingués au 41e Festival du film méditerranéen d'Alexandrie    Ayta D'bladi : La chasse aux billets est lancée !    Accord Pan-Euro-Mediterranéen : levier de compétitivité à l'export    Fès, point de départ du Rallye du Maroc 2025, prévu du 10 au 17 octobre    Nayef Aguerd victime d'une "agression" à l'aéroport de Marignane en France    Addis-Abeba: signature d'un mémorandum d'entente entre la CUA et l'Union Panafricaine de la Jeunesse    Le temps qu'il fera ce mardi 7 octobre 2025    Revue de presse de ce mardi 7 octobre 2025    Subventions aux cliniques privées : Après la polémique, Tahraoui sommé de révéler la liste et la nature des aides    Hassan Sentissi El Idrissi : "Le principal défi concerne l'eau"    Marché des capitaux: plus de 77 MMDH de levées à fin août 2025    Lionceaux U17 : Elyes Saïdi forfait après une commotion cérébrale    Fouzi Lekjaa, artisan de la rentabilité financière de la CAF    Le Maroc, plan A, B et C : la foi de Motsepe dans la CAN 2025    Transport routier : enfin l'heure de la réforme ?    La CMR primée par l'Association Internationale de la Sécurité Sociale    Etats-Unis: la délivrance de visas étudiants en baisse de 20%    Températures prévues pour le mercredi 08 octobre 2025    Edito. Confiance à reconstruire    France : la démission éclair du gouvernement Lecornu plonge l'exécutif dans une impasse politique    Les dispositions légales et réglementaires n'encadrent pas clairement les services de transport via les applications intelligentes    Le Bureau des Nations unies pour la lutte contre le terrorisme célèbre à Rabat cinq années de coopération avec le Maroc dans la formation antiterroriste en Afrique    Hôpital Hassan II d'Agadir : les enquêtes bouclées    Le tribunal de Rabat confirme en appel la condamnation d'Ibtissame Lachgar à deux ans et demi de prison pour «atteinte à l'islam»    Conseil de gouvernement : réforme du Code de commerce et stratégie du développement durable au menu    L'innovation moderne révolutionne la médecine traditionnelle au Xinjiang    Musée Mohammed VI : une nouvelle directrice à la barre    En images : manœuvres aériennes maroco-françaises dans l'Est du Maroc    La signature de l'accord agricole Maroc-UE amendé vient renforcer un partenariat de longue date entre Rabat et Bruxelles (Commission européenne)    En huit mois, le Maroc importe plus de 660 000 tonnes de produits agricoles russes pour 1,46 milliard de dirhams    African Young Women in Action : le cinéma africain s'écrit au féminin    Elvis Ntambua Mampuele : "Mon père désarmait les enfants-soldats"    Lecornu déplore les "appétits partisans" ayant motivé sa démission    Espagne : Le procès du Marocain responsable de l'attaque d'Algésiras commencer    Décès à l'hôpital d'Agadir : le MSPS saisit la justice et suspend les responsables concernés    Flottille pour Gaza: Israel annonce l'expulsion de 171 militants, 2 Marocains encore retenus    FNM: Nadia Sabri, nouvelle directrice du Musée Mohammed VI d'art moderne et contemporain    Mohamed Hamidi, pionnier de l'art moderne marocain, s'éteint à 84 ans    Australie : Fusillade à Sydney, jusqu'à 100 coups tirés et 20 blessés    La Chine déclenche une alerte d'urgence après le typhon "Matmo"    Marrakech: le musée Yves Saint Laurent accueille une exposition sur le couturier et ses chiens    Match amical : Le Maroc U17 affronte le Sénégal    Mondial U20 : Les Lionceaux de l'Atlas connaissent leur adversaire pour les 8ès    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Phénomène social: pas tendre, la société !
Publié dans Finances news le 12 - 04 - 2021

© Tarek Ananou «Grupo de niños migrantes en Europa»

Protection des enfants, des jeunes et des mères seules, l'association SOS villages d'enfants et l'Union européenne s'engagent ensemble et lancent le projet «Agir pour une amélioration de la protection sociale au Maroc».

Par R. K. Houdaïfa

Par sentiment de honte ou par crainte d'être maltraitées, beaucoup de mères célibataires, sinon la plupart, fuient les maternités. Pourtant, beaucoup d'entre elles ressentent l'envie profonde d'être une mère digne et exemplaire.
Une vie de chienne !
N., vingt-deux ans. En apparence. Car derrière son entrain de commande se dissimule une souffrance obstinément tue. Il y a quatre ans, elle était encore une oie blanche. Au milieu d'une famille besogneuse, elle coulait des jours mornes. Un jour, son prince viendrait, espérait-elle. Son vœu fut exaucé.
Elle fit la connaissance d'un jeune homme de vingt-cinq ans. Beau comme un astre, très poli. Elle en fut immédiatement éprise. Au fil de ses rencontres avec Mehdi, elle apprit qu'il vit en France. Un jour, il lui déclara sa flamme et la supplia de lui accorder sa main. Il irait rendre visite à ses parents, en compagnie des siens, dès que ceux-ci rentreraient de France, promit Mehdi. Gage de sa sincérité, il se mit à la couvrir de parfums et de bijoux. Confiante, elle prit l'habitude de l'accompagner dans l'appart qu'il avait loué. Un jour, le soleil implacable faisant fondre les ultimes résistances, ce qui devait arriver arriva. Elle perdit sa vertu.
Il fallait se rendre à l'évidence : elle avait été la proie facile d'un tombeur sans scrupules. Le pire était à venir. Absorbée par son malheur, elle ne remarqua pas que ses règles ne s'annonçaient pas, et c'est au bout de deux mois qu'elle se rendit compte de son état. «Moi qui étais la chouchoute de ma famille, j'allais devenir sa honte. Je ne pouvais lui faire ça. Plutôt me pendre. Mais je n'en ai pas eu le courage. Après, j'ai pensé à me faire avorter. On m'a dit que ça se pratiquait. Mais où trouver la somme nécessaire ?»
Les bijoux reçus en cadeau ne valaient pas un clou. En désespoir de cause, elle se résolut à partir, loin, là où elle ne risquerait pas d'être l'objet d'un crime d'honneur, pratique encore courante chez les déshérités. Profitant de l'absence momentanée de ses parents, elle ramassa ses maigres effets et prit l'autocar. Elle était certaine qu'une bonne amie divorcée ne l'abandonnerait pas. L'amie en question, non seulement lui fournit le gîte et le couvert, mais était aux petits soins pour elle.
Jusqu'à la délivrance, veillée par une sage femme. Elle donna le jour à une fillette, qu'elle n'eut pas même le temps de baptiser. Dès le troisième jour, un rupin, prévenu par son amie, s'empara du nourrisson. Une semaine après, Mehdi se volatilisa. Elle commença à désespérer. Elle n'avait pas noté son adresse et elle ignorait jusqu'à son patronyme. L'appart était occupé par d'autres vacanciers.
Elle qui n'avait jamais bu une goutte d'alcool se fit engager comme serveuse dans plusieurs bistrots avant d'échouer dans un bastringue de la côte casablancaise. Elle y officie comme «bouchonneuse». Elle est payée au pourcentage sur les bouteilles qu'elle fait consommer aux clients. Peu farouche, elle permet au client des privautés furtives, et s'il se montre généreux, elle lui accorde volontiers les dernières faveurs, après la fermeture, dans son modeste meublé.
Sa fille, elle la revoit, de loin. «Ses parents adoptifs ne m'autorisent pas à l'approcher. Alors, je me pointe à la sortie de la crèche, et j'ai juste le temps de l'apercevoir, montant dans la voiture». Avec sa famille, N. a rompu les ponts. Sans doute la croient-ils morte. «Et voilà le fruit d'un instant d'égarement. Je me retrouve sans famille, sans mari, sans enfants, juste bonne à enivrer les hommes et à leur donner du plaisir. Une vie de chienne !».
Danse avec les loups
Une histoire dramatique, que viennent confirmer de trop nombreux récits de calvaires gravis par les mères célibataires. Quand M. raconte le sien, elle fond en larmes. Un corps d'enfant et des yeux de braise. Elle dit avoir vingt-quatre ans. Pourtant, elle est marquée par la vie. La mauvaise vie.
A dix-sept ans, elle est victime d'un viol collectif. Elle sera enceinte des loubards des bidonvilles «qui sont venus avec leurs couteaux, chacun ayant avalé beaucoup de comprimés, dans un terrain vague», pour abuser d'elle. «Certains puaient la colle, et disaient : viens ou alors on va te découper en morceaux...» Enceinte du groupe, elle sera récupérée par un souteneur du bidonville, «pour faire le ménage, satisfaire des notables du 'hay', et le soir, se prostituer». Une vie saccagée sans que la victime y soit pour quelque chose.
Et, que dire sur les femmes de ménage, particulièrement les plus jeunes – ces gamines qui ne savent même pas où s'arrête la charge de travail : dans la cuisine ou dans le lit du patron ?!
Qu'est-ce qui a poussé les femmes à «fauter», au risque d'être mises au ban de la société ? Au premier chef, le mirage du mariage. D'abord séduites – leurs partenaires leur font miroiter le mariage – abandonnées par la suite. Ainsi, l'on se demande si le déterminant majeur de ces situations (des adolescentes ou adultes ayant enfanté hors mariage) reste le manque d'éducation ?!
Dans ce triste tableau, les victimes sont les enfants. Ils en gardent des stigmates indélébiles. En outre, à moins d'être reconnus a posteriori par leurs géniteurs, qu'ils soient adoptés, choyés ou maltraités, ils restent des voyageurs sans bagage, avec des moments tronqués, menant une existence sans racine.
Une enfance volée
Poussés hors l'univers familial, entraînés sur la voie du vagabondage, de la mendicité et de la délinquance, ayant des désordres physiques et psychiques, souvent contraints, battus, soumis aux pires fantasmes : instabilité, agressivité, déni de soi, carence affective, perversion, énurésie, grossesse précoce... les ravages sont nombreux.
Combien sont-ils/elles en errance et sans défense ? Faute de statistiques fiables, on ne peut avancer un chiffre. Mais la détresse est omniprésente. Elle se manifeste sous de multiples dehors, poignante tel un remords. Elle s'épanouit sur les marges de plus en plus reculées de la ville et dans les campagnes désolées. Aujourd'hui, le fossé est infranchissable entre les in, protégés et bénéficiant des bienveillances sociales, et les out, rejetés à la périphérie chômeuse de la ville vénéneuse. Il suffit de parcourir la rubrique des faits divers des journaux pour s'en convaincre.
Pour rappel, les enfants, naguère au Maroc, n'étaient pas considérés comme des personnes à part entière. Des personnes qui ont des droits et des lois pour les défendre. Et qui restent néanmoins des enfants tant qu'ils n'ont pas dépassé l'âge de 18 ans, ainsi que le stipule la Convention internationale des droits de l'enfant, signée à l'ONU en 1989.
Pour des méthodologies d'accompagnement
Des vies broyées, des existences saccagées, des dignités bafouées, SOS Villages d'enfants Maroc s'en émeut. C'est dans le dessein de «permettre à des enfants, des jeunes sans soutien parental et des mères en situation de monoparentalité, de retrouver, en dépit d'un parcours difficile, un avenir meilleur», que ladite association a mis sur orbite «Agir pour une amélioration de la protection sociale au Maroc».
«Fondé sur une approche basée sur les droits, (ce projet) s'inscrit en ligne directe avec la Politique publique intégrée de protection de l'enfance au Maroc, instaurée en 2015, qui constitue la réponse nationale de lutte contre toutes les formes de violence et d'exploitation des enfants.»
Cela reposerait sur l'amélioration, le renforcement et le suivi psychologique, éducatif et sanitaire des enfants accueillis; le développement d'une démarche qualité au sein des établissements de protection sociale de l'Association, prenant compte également des enfants en situation de handicap, dont la méthodologie pourra être partagée avec le ministère de la Famille, de la Solidarité, de l'Egalité et du Développement social auprès d'autres établissements de protection sociale du Royaume.
Il convient de saluer l'initiative comme elle le mérite, tant enfants et jeunes se retrouvent délaissé(e)s. Toutes les passerelles doivent être réinventées pour reprendre le dialogue avec les jeunes, assurer leur insertion sociale dans la solidarité. Inventer de l'adulte là où il n'existe plus, inventer de la famille, retrouver les rites de l'initiation dans le désert de nos villes. Car, il est à craindre que nous n'ayons construit plus de places de prison pour les jeunes que de lieux d'apprentissage de la vie adulte.
Devenu visible, le phénomène des mères célibataires émeut associations et fondations, qui se portent au secours de ces mères de l'ombre et de leurs enfants. Mieux : inquiet de la situation, le projet prévoit également la création de «deux programmes de renforcement de la famille à Agadir et Salé». Et ce, afin d'accompagner «les mères seules à développer une éducation parentale respectueuse des droits de leurs enfants en matière d'accès à la santé ou à l'éducation. Les femmes cheffes de famille seront accompagnées à renforcer leur employabilité pour sortir de leur précarité économique». Un signe.
Est-ce suffisant ? Bien sûr que non. Il est temps de bousculer les vieilles certitudes et les tabous ravageurs. Au nom de milliers d'enfants sans racine et de femmes marginalisées.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.