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Entretien: Les ingrédients d'un modèle de croissance plus endogène
Publié dans Finances news le 19 - 02 - 2015

En dépit de l'amélioration des déséquilibres macroéconomiques, l'objectif d'une croissance globale et inclusive est loin d'être atteint. Le Maroc est appelé à oeuvrer davantage pour accélérer son intégration dans les chaines de valeur mondiale. La détérioration continue de la position du compte courant, et plus particulièrement celle de la balance commerciale, renvoie plus à la problématique de la compétitivité de l'offre exportable qu'à une politique de change. Larabi Jaidi, économiste et professeur universitaire, revient sur les mutations internationales qui nous guettent et sur comment rendre la croissance durable.
Finances News Hebdo : Au cours de la dernière décennie, les pouvoirs publics ont fait de la maîtrise des agrégats macroéconomiques leur principal objectif. Quelle évaluation faites-vous de cette stratégie de croissance eu égard à l'état actuel de notre économie ?
Larabi Jaidi : La soutenabilité des finances publiques requiert un assainissement budgétaire, à travers la réduction des charges non productives et la canalisation des ressources disponibles vers l'investissement productif et le développement humain. Depuis des années, nous n'avons cessé d'utiliser la dépense publique pour autre chose que pour ce à quoi elle est faite, à savoir investir dans les biens collectifs (santé, éducation, infrastructures, recherche-développement). Affronter les défis auxquels fait face notre pays aujourd'hui passe par l'accélération et l'élargissement des réformes structurelles. Ces dernières, aussi difficiles soient-elles, sont les seules à même de rétablir les équilibres macroéconomiques, d'assurer leur viabilité et de redonner à l'Etat les moyens pour améliorer la compétitivité, relancer la croissance et renforcer la cohésion sociale. Il s'agit d'abord de la réforme de la Caisse de compensation et des systèmes des retraites. Ces réformes et bien d'autres sont des réformes, à minima : elles sont indispensables, mais elles ne suffiront pas.
Davantage d'effort pouvait être fait. Notamment, la réforme en matière fiscale et les réformes d'intervention sur le marché du travail en vue de soutenir l'emploi. Paradoxalement, bien que la politique économique soit parvenue à redresser les déséquilibres macro-économiques par des compressions de dépense d'équipement, l'objectif d'une croissance globale inclusive et équitable n'a pas été atteint. On insistera également sur la nécessité de renforcer la gouvernance des politiques économiques et leur coordination au niveau du gouvernement. C'est à la mise en place d'un modèle de croissance plus endogène que l'Etat devrait réfléchir. Pour susciter un progrès pérenne qui ne soit plus dépendant de tel partenaire ou tel phénomène exogène: aujourd'hui l'économie mondiale, demain la pluviométrie. Car, il faut quand même poser une question de fond : comment rendre la croissance durable? Peut-elle durer sans se transformer ? Il y a bien un risque: celui d'une économie qui resterait perpétuellement en voie d'émergence.
F.N.H. : Face à toutes ces mutations que connaît l'environnement international, n'est-il pas temps pour le Maroc de repenser sa stratégie pour un meilleur positionnement dans les chaînes de valeur mondiale ?
L. J. : Le Plan émergence marocain, lancé en 2005, actualisé en 2009 à travers le Pacte national pour l'émergence industrielle (PNEI) et relooké en 2014. Les métiers mondiaux du Maroc (MMM) identifiés ont été justement retenus en raison de leur fort potentiel de croissance. Des montées en gamme dans la chaîne de valeur ont été constatées dans certaines industries. Dans l'automobile, le groupe Renault doit mettre en oeuvre une politique d'intégration locale. Le secteur aéronautique est considéré comme une chaine de valeur mondiale (CVM) très prometteuse. Des entreprises à la portée internationale EADS, Boeing, Safran, Bombardier sont présentes dans les activités de production, de services et d'ingénierie, soit les composantes principales de la chaine de valeur aéronautique mondiale. Le secteur est accompagné par des mesures concrètes de l'Etat (parc industriel intégré, pool de ressources humaines qualifiées, contribution financière publique..). Mais la montée en charge de ces secteurs est lente à se dessiner. Par contre, les filières du textile et de l'agroalimentaire qui occupent un poids important dans le tissu industriel ont des difficultés à restructurer l'ensemble des chaînes de valeur. En conséquence, le secteur industriel du Maroc reste un secteur à faible contribution de la valeur ajoutée faute d'avoir connu une véritable transformation structurelle. Si elle s'accompagne d'une montée en gamme plus accélérée, l'intégration dans les CVM pourrait accélérer la transformation structurelle de l'industrie nationale. A ce jour, le Maroc n'en attire qu'une petite partie, mais qui s'accroît. Le modèle industriel marocain reste vulnérable : persistance de déficiences en termes des prérequis de base (qualité des infrastructures notamment) qui peuvent faciliter l'intégration des entreprises marocaines dans les chaînes de valeur mondiales ; le système d'éducation et de formation n'arrive pas encore à offrir au tissu productif les ressources humaines en quantité et en qualité suffisante. Il est donc nécessaire d'accélérer le chantier relatif aux métiers mondiaux du Maroc afin de faire émerger de nouveaux secteurs à forte valeur ajoutée et d'optimiser les bénéfices que peut tirer notre économie d'une intégration accrue dans l'environnement international.
F.N.H. : Les changements de la division internationale du travail se sont accélérés au cours des dernières années se traduisant par l'émergence de nouveaux pôles de croissance mondiale (Chine, Inde...). Quel risque présente cette nouvelle configuration pour un pays en quête d'émergence comme le Maroc ?
L. J. : L'OCDE a publié en 2010 un rapport intitulé «Le grand basculement de la richesse», dans lequel elle considérait que le G8 s'effaçait derrière le G20 et l'influence des pays développés se diluait au profit des pays émergents. La croissance insolente de quelques pays du Sud n'est pas sans faille. Elle avive les tensions sociales de pays très inégalitaires comme le Brésil et fait apparaître des clivages longtemps atténués sous l'ère communiste en Russie ou en Chine. Les Bric forment une association qui est certes un levier d'affirmation sur la scène internationale, mais reste trop hétéroclite pour former une alliance. Certes, le club des pays dits émergents n'est pas fermé. D'autres pays vont probablement, d'ici quelques années, faire à leur tour leur entrée dans la cour des nations émergentes : l'Indonésie, le Nigeria, les Philippines, le Viêtnam ... La nouvelle vague des candidats du futur proche est encore moins homogène mais elle partage des caractéristiques communes : une population jeune et formée, des classes moyennes en expansion, des réformes économiques et institutionnelles en progression continue. Le Maroc fera-t-il partie de cette nouvelle fournée ? Il en a le potentiel. Mais, aujourd'hui nos partenaires traditionnels de l'Union européenne tournent au ralenti. Le Maroc n'a pas beaucoup à attendre de l'impulsion extérieure. La tendance de la demande externe est une contrainte sur laquelle le gouvernement n'a aucun contrôle.
F.N.H. : Le régime de change actuel est souvent cité par les opérateurs comme étant une limite de la stratégie actuelle de croissance. Un ancrage du Dirham à l'Euro est-il toujours plausible ?
L. J. : La compétitivité de nos exportations renvoie à la réforme du régime de change, dont la configuration actuelle ne lui permet pas de jouer son rôle d'amortisseur des chocs exogènes de la balance des paiements. Bank Al-Maghrib a procédé à l'affinement du calcul des indicateurs de taux de change effectif nominal et réel. Cette nouvelle approche tient compte aussi bien du poids des principaux partenaires commerciaux du Maroc que de l'effet de la concurrence étrangère sur ses principaux marchés. L'évolution du TCER constitue une mesure plus appropriée de la compétitivité extérieure des exportations marocaines. Ces dernières années, le taux de change effectif nominal du dirham, dont le calcul se base sur un panier comprenant les monnaies des principaux pays partenaires et concurrents du Maroc, s'est déprécié. En termes réels, il s'est déprécié en raison d'un différentiel d'inflation globalement en faveur du Maroc. Pour tirer davantage profit de l'ouverture extérieure, l'évolution vers un régime de change plus flexible paraît souhaitable. La réussite d'une telle réforme nécessite une démarche progressive conditionnée par des prérequis : adaptation du cadre de politique monétaire, amélioration du régime de ciblage d'inflation, soutenabilité budgétaire à moyen terme, système financier solvable et résilient... Le succès de cette évolution du régime de change est aussi conditionné par une bonne préparation de tous les acteurs concernés. Toutefois, la détérioration continue de la position du compte courant, et plus particulièrement celle de la balance commerciale, renvoie inéluctablement à la problématique de la compétitivité de l'offre exportable, qui reste limitée aussi bien en termes de contenu que de destination. Son redressement demeure tributaire de la concrétisation des politiques sectorielles et transversales, avec notamment le développement de la recherche et de l'innovation et l'amélioration de la formation et du climat des affaires.
F.N.H. : Le problème endémique des jeunes se pose aujourd'hui avec acuité sur le plan international. Au Maroc, les actions déployées pour y remédier n'ont pas encore abouti et l'inadéquation formation-emploi persiste toujours. Pourquoi à votre avis ?
L. J. : La formation est un objectif essentiel de la politique de l'emploi. Les mutations structurelles des systèmes productifs renforcent les besoins en formation. Face à ces mutations, un décalage est apparu entre les besoins formulés par les entreprises et la formation des ressources en main-d'oeuvre. Il faut se garder de toute approche uniquement en termes quantitatifs. Le taux d'insertion des diplômés de la formation professionnelle n'est pas satisfaisant. Il est très difficile de prévoir à long terme quel sera le contenu exact des emplois futurs.
Le problème est aussi, et surtout, d'ordre qualitatif. Il faut avant tout permettre une certaine flexibilité des systèmes de formation pour que ceux-ci puissent s'adapter continuellement à l'évolution des besoins de l'économie. Plutôt que de la simple multiplication des filières, il faut trouver un équilibre entre la diversité des diplômes et leur unification minimale, nécessaire à la bonne fluidité du marché du travail. Le système éducatif ne devrait-il pas promouvoir de plus en plus une formation de base, à profil large, la spécialisation professionnelle s'effectuant ultérieurement en entreprise ? La formation en alternance doit donc être encouragée, mais son succès dépend aussi, et surtout, de la collaboration des entreprises.
Les institutions d'intermédiation, les dispositifs d'insertion mis en place ont révélé une efficacité variable par rapport à la montée du chômage. Il est donc nécessaire d'améliorer ces interventions, de renforcer sans cesse les programmes de formation/adaptation/reconversion destinés aux diplômés-chômeurs, de consolider les mesures favorables aux jeunes promoteurs. Toutefois, comme dans toutes les formes d'intervention publique, il est primordial d'évaluer de façon systématique et rigoureuse les effets de ces dispositifs, tant sur le plan macroéconomique que sur les bénéficiaires. La multiplicité des dispositifs qui se succèdent ou s'entassent en "strates" au cours du temps ne signifie pas nécessairement une amélioration de la visibilité de la politique de l'emploi. Une évaluation permettra de mieux saisir l'impact de chaque mesure et d'optimiser son rendement.


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