Deep Tech : l'UM6P accueille l'édition 2024 de la Global Immersion Week    ENSAM Mèknes-Entreprises : un partenariat pour la souveraineté technologique    PAM : Un brassage de personnalités nouvelles et anciennes au sein du nouveau bureau politique    Engagement istiqlalien pour un « patriotisme renouvelé » !    Le Japon déterminé à continuer à œuvrer en faveur d'une coopération « plus étroite » avec le Maroc    Maroc : le déficit budgétaire à plus de 1,18 MMDH à fin avril    Tourisme : Le Maroc attend un record de 16,8 millions d'arrivées en 2024    Etats-Unis : Rencontre à la Silicon Valley avec des membres de la communauté marocaine    Guerre au Mali : Une ONG amazighe saisit le président de l'Union africaine    «Le Maroc ne peut faire face à Facebook et Tiktok», reconnait le ministre de la Justice    Anniversaire des FAR : 68 ans de réalisations et de dévouement au service de la Nation    SM le Roi félicite le Général Mahamat Idriss Deby Itno à l'occasion de son élection à la magistrature suprême du Tchad    Afrique du Sud : Déploiement de l'armée pour protéger les installations électriques    Défis climatiques : Pour une seule voix au nom du continent    Morocco's Achraf Hakimi ranked 2nd best African player in Ligue 1    FRMF/FIFA : Lancement d'un stage certifiant pour les instructeurs formateurs des entraîneurs    Rabat : Dar Es Salam accueille la 23e édition du Trophée Hassan II «Tbourida»    National ''amateurs'': Le KAC en danger à Assa !    Botola D2/J26 : L'ASS vers la relégation ... sauf miracle !    Les prouesses des attaquants marocains à l'étranger mettent Regragui dans l'embarras...du choix    Transport scolaire et écoles pionnières, Benmoussa expose les avancées de son ministère    Situation de la prison de Meknès : les précisions de la DGAPR    Bientôt une plateforme numérique d'enseignement à distance de l'amazigh    Colère des étudiants en médecine: Pas de session extraordinaire, selon Miraoui    Espagne : Consulat mobile au profit de la communauté marocaine de la province de Grenade    CV, c'est vous ! EP-70. Redouane Salmi, customiseur de motos classiques    SIEL-2024 : La BNRM et la BNF s'associent pour intensifier leur coopération dans le domaine de la bibliothéconomie    Tunisie. Les avocats décrètent une grève générale    Coupe de la CAF (finale aller) : La Renaissance de Berkane bat le Zamalek    Tennis: Le Maroc champion d'Afrique des U14 ans garçons et filles, qualifié pour le Mondial    Aleph et le Groupement des Annonceurs du Maroc Réinventent la Publicité Digitale    Gabon. Le ministère de l'Intérieur organisera les prochaines élections    Automobile : CAC fait son salon    Niger. L'audience de levée d'immunité de Mohamed Bazoum renvoyée au 7 juin    Organisation mondiale des agrumes : le Maroc tient désormais les rênes    Le temps qu'il fera ce lundi 13 mai 2024    Visa : le Portugal se tourne vers BLS    Sebta et Mellilia : les travailleurs transfrontaliers percevront des allocations chômage    Création du Polisario : Le regard critique porté par un jeune sahraoui    SIEL 2024 : La SNRT révèle les rôles historiques et enjeux futurs de ses chaînes amazighes    FICAK 2024: Regards croisés sur le cinéma et l'esthétique en Afrique    SIEL 2024: Hommage au Sénégalais Souleymane Bachir Diagne, figure emblématique de la philosophie en Afrique    Le FICAM célèbre l'excellence de l'animation avec un programme captivant    «Marrakech fait son cirque» se tient du 22 au 25 mai 2024    Soudan du Sud: 1,33 million de réfugiés rentrés chez eux en six ans    Feux de forêt dans l'ouest du Canada: des milliers de personnes évacuées    Russie : Le ministre de la Défense limogé    « Déserts » de Faouzi Bensaïdi : La flagrance du calvaire infligé par le capitalisme    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Rencontre avec le Docteur Dia, premier psychiatre de Mauritanie
Publié dans H24 Info le 07 - 11 - 2019

Qui n'a jamais entendu parler du « docteur Dia « ? Même le dernier des Touaregs au fin fond du Sahara connaît son nom. À l'instar de notre Croque-Mitaine, de la Fée Carabosse, de Pinocchio, il a donné son nom à une expression populaire. En Mauritanie, «on va t'emmener voir le Docteur Dia» est couramment utilisée tant pour faire mettre en garde les enfants pas sages qu'entre adultes. Sauf que Docteur Dia existe vraiment. Il exerce toujours à Nouakchott et a accepté de nous recevoir, l'écrivaine Geneviève Damas et moi, et de nous parler de son métier.
L'allée de carrelages de la maison à l'allure californienne et au jardin de fleurs jaunes écloses passée, on nous fait patienter dans un vaste hall aux tons bleutés. Après quelques minutes, on nous signale que Docteur Dia est prêt à nous recevoir. Il nous invite à prendre place dans le vaste salon mauritanien où les bleus se côtoient et on nous sert du pain de singe frais. Assis, en tenue traditionnelle, vaste toge couleur ciel, assortie à ses yeux certainement bleuis par les années, il observe.
H24Info: Docteur Dia, vous êtes le premier psychiatre de Mauritanie, exercez-vous toujours ?
Docteur Dia: Je suis retraité, donc je n'exerce plus à l'hôpital mais seulement dans une clinique que j'ai montée, la clinique du docteur Dia. Un de mes fils qui a choisi d'être psychiatre aussi, travaille avec moi.
De quelle école psychiatrique êtes-vous ?
Je n'ai pas d'école en particulier mais la psychiatrie est une discipline médicale rigoureuse où les médicaments ont indéniablement une part à jouer. Je crois aux « neurotransmetteurs ».
Ma thérapie peut-être aussi d'inspiration analytique et/ou systémique, cette dernière étant presque toujours utilisée ici puisque la société a généralement un mode de fonctionnement tribal. Mais avant tout, c'est la rencontre avec le patient qui compte. C'est elle qui détermine la technique à utiliser.
Y a-t-il des particularités psychiatriques à la société mauritanienne ?
Plusieurs. D'abord, ici il est d'usage de dire « on est hospitalisés » et non « je suis hospitalisé ». En effet, un patient n'est jamais interné tout seul. Il est accompagné par un des membres de la famille si ce n'est de toute la famille.
Ensuite, il y a les croyances. À l'inverse du médiatique Tobie Nathan, je ne pense pas que la culture d'origine du patient ait une importance outre mesure. « Aux pays des marabouts », quand les patients viennent en invoquant envoûtement, Djinns et Sheitan, je les écoute et ne tire que les symptômes objectifs nécessaires au diagnostic et à la prise en charge thérapeutique. Quand ils me disent entendre des voix, je me renseigne sur les caractéristiques. Je cherche les éléments nécessaires au diagnostic de schizophrénie, de manie, de dépression. Quand un patient me dit qu'il est envoûté et qu'il ne prend plus de plaisir, qu'il reste toute la journée au lit, je cherche les autres symptômes pouvant signer une dépression et je le traite avec des médicaments.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
J'ai effectué une grande partie de mes études à Dakar au Sénégal. Le professeur Collomb, remarquant que dans les villages toute la famille déménageait à côté du thérapeute quand un de leurs membres était malade, y crée l'hôpital institutionnel de FAN, où la thérapie familiale était la ligne directrice. Sous sa direction, je m'y suis intéressé. Elle a fait par la suite l'objet de ma thèse. Cette approche thérapeutique de la maladie mentale est un essai de rétablir la communication, il s'agit en particulier de groupes d'expressions verbales. J'ai aussi étudié le psychodrame.
Ma formation, je l'ai complétée en France où j'ai côtoyé des grands noms de la psychiatrie. Parmi eux, Pierre Deniker et Pierre Pichot. J'ai enrichi ma formation en faisant pendant deux ans une psychanalyse.
Et puis je suis revenu en Mauritanie où j'ai œuvré, après avoir pratiqué « la psychiatrie sous la tente », pour la création d'un service psychiatrie au sein de l'hôpital général. C'est ainsi qu'en 1978 le service de neuropsychiatrie a vu le jour. En 1990, a été créé l'hôpital des spécialités, comprenant psychiatrie et neurologie.
Quel avenir pour la psychiatrie en Mauritanie ?
Et ailleurs ?!, rajoute-il. L'horizon est immense. Contrairement à d'autres disciplines médicales, la multiplication des recherches en psychiatrie a permis de faire un bond énorme. Il reste encore beaucoup à faire. La connaissance de l'esprit humain est passinnante et infinie car il est en perpétuelle évolution.
En ce qui concerne le pays, il y a un psychiatre diplômé qui est chef à l'hôpital des spécialités. Il y près de cinq étudiants en cours de formation, un d'eux finit l'année prochaine.
Etiez -vous prédestiné à la psychiatrie ?
Je viens d'une famille d'agriculteurs, « le petit prodige », nous a expliqué ultérieurement sa fille. Je suis le premier à faire des études. J'ai fait d'abord médecine. Et puis la psychiatrie a été une question de rencontres !
Docteur Dia, nous regarde ensuite, et s'adresse à nous : Et si vous nous parliez de vous ? J'ai beaucoup parlé, à votre tour maintenant…
À la fin de la rencontre, on vient nous raccompagner. À la porte, la fille du docteur Dia court vers moi. Elle me remet le livre de son père La psychiatrie au pays des Marabouts. Sur la première page il est inscrit: «Merci d'avoir visité le vieux psychiatre».


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.