La question de la transmission de la tuberculose par le biais du lait et de ses dérivés non stérilisés suscite une vive polémique au sein des milieux sanitaires et chez les consommateurs au Maroc. Cette inquiétude s'exacerbe dans un contexte où de nombreux produits laitiers échappant à tout contrôle sanitaire continuent d'être écoulés sur les marchés traditionnels. Interrogée à ce sujet par Hespress, une source au sein de l'Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) a tenu à rassurer. « Tous les produits laitiers, quelle qu'en soit la nature, issus d'unités de production disposant d'un agrément, sont soumis à un système de contrôle rigoureux par l'ONSSA. Ils ne présentent donc aucun danger pour la santé du consommateur », a-t-elle affirmé. En revanche, la même source met en garde contre les produits provenant d'unités ou d'établissements non agréés par l'Office, ou encore ceux commercialisés en dehors des circuits contrôlés : « Ces produits peuvent avoir des effets néfastes sur la santé des consommateurs ». Elle recommande ainsi de ne pas consommer de lait en provenance d'unités non autorisées sur le plan sanitaire, en soulignant qu'« il est aisé de distinguer les produits sains grâce aux informations figurant sur leur étiquette, notamment le numéro d'agrément délivré par l'ONSSA et d'autres mentions sanitaires présentes au dos de l'emballage ». De son côté, le Dr Tayeb Hamdi, médecin et chercheur en politiques et systèmes de santé, rappelle que la tuberculose est une maladie infectieuse qui touche essentiellement l'être humain. Sa transmission se fait principalement d'une personne à l'autre, par voie aérienne, notamment par la respiration, la toux ou le contact direct. Cependant, comme le souligne Dr Hamdi, la bactérie responsable de la tuberculose ne se limite pas à l'homme. Elle peut également se retrouver chez certains animaux, tels que les bovins, les ovins, les caprins, mais aussi les chats et les chiens. Ce constat rend donc possible une transmission de l'animal à l'homme, en particulier par la consommation de lait cru ou de ses dérivés. Il avance que les rapports de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) indiquent que 10 % des cas de tuberculose humaine dans certains pays sont imputables à la transmission interespèces, contre 90 % de transmission entre humains. Le médecin ajoute qu'un animal infecté peut rester asymptomatique pendant plusieurs mois, ce qui augmente le risque de transmission à l'homme, soit par contact direct, soit via la consommation de produits contaminés, en particulier le lait non stérilisé et ses dérivés tels que le lait fermenté ou le raïb. Ce type d'infection affecte généralement les ganglions lymphatiques, mais peut aussi atteindre d'autres organes du corps. Le Dr Hamdi va plus loin en affirmant que les risques sanitaires liés à la consommation de lait cru ne se limitent pas à la tuberculose. En effet, cela peut également entraîner des pathologies graves comme des intoxications alimentaires, des diarrhées aiguës ou d'autres troubles digestifs, pouvant dans certains cas aller jusqu'au décès. Ces risques sont particulièrement élevés chez les personnes vulnérables notamment chez les enfants, personnes âgées, femmes enceintes ou individus dont le système immunitaire est affaibli. Pour se prémunir contre ces risques, le médecin souligne l'importance de connaître les différents types de lait en fonction de leur mode de traitement thermique. Il explique donc que le lait cru, qui n'a subi aucun traitement, demeure le plus dangereux tandis que le lait pasteurisé, chauffé entre 60 et 70 °C, permet d'éliminer la majorité des microbes tout en conservant les qualités nutritionnelles essentielles. Pour ce qui est du lait stérilisé, il est porté selon Dr Hamdi à plus de 100 °C, ce qui élimine l'ensemble des agents pathogènes. Enfin, le lait traité à ultra-haute température, dit UHT, offre une longue conservation pouvant atteindre six mois sans nécessité de réfrigération. Enfin, Dr Hamdi souligne l'importance cruciale de vérifier l'origine du lait et de ses produits dérivés. Il appelle les consommateurs à éviter l'achat de lait provenant de sources non contrôlées, qu'il s'agisse des animaux eux-mêmes, des lieux de production ou des personnes en charge de la transformation. Il recommande également de ne pas consommer de produits laitiers issus de lait non traité thermiquement, comme certains fromages traditionnels. Et de rappeler que « le traitement thermique ne nuit aucunement à la valeur nutritionnelle du lait, mais assure au contraire une protection efficace de la santé humaine ». Ce débat intervient dans un contexte où les appels se multiplient pour un renforcement du contrôle sur les marchés informels, ainsi qu'une meilleure sensibilisation des citoyens à la nécessité de consommer des produits sains, sûrs et soumis à des contrôles rigoureux, afin de préserver la santé publique et prévenir la propagation de maladies évitables.