Alors que la région Casablanca‐Settat multiplie les opérations de contrôle, des rapports confidentiels révèlent un vaste détournement de licences agricoles pour ériger des unités industrielles clandestines. Derrière des façades prétendument agricoles, des acteurs influents ont bâti des usines illégales, défiant des jugements de démolition et profitant de complicités locales, au mépris de la loi et de l'environnement. Hespress a appris de sources concordantes que la Wilaya de la région Casablanca‐Settat a récemment adressé des rapports urgents aux autorités provinciales, notamment aux gouverneurs de Berrechid et de Médiouna, au sujet de graves détournements de licences agricoles. Celles‐ci ont été exploitées par des acteurs influents pour ériger, en toute illégalité, des unités industrielles de taille moyenne et légère, dont certaines exercent des activités formellement interdites, telles que la fabrication de sacs et de produits plastiques. Selon ces rapports, plusieurs autorisations initialement délivrées pour l'implantation d'entrepôts agricoles ont été frauduleusement utilisées pour contourner les services administratifs, et ce malgré des jugements définitifs ordonnant leur annulation et la démolition des ouvrages concernés. D'après les mêmes sources, ces nouvelles alertes reposent sur des plaintes d'exploitants lésés, appuyées par des correspondances des services centraux du ministère de l'Intérieur. Ces documents insistent sur l'urgence de mettre fin aux préjudices résultant de la non‐exécution de décisions rendues par la juridiction administrative, qui avaient prononcé l'annulation de licences de construction servant à des entrepôts transformés en unités industrielles clandestines dans plusieurs douars relevant de la province de Berrechid. Ces licences, délivrées par des présidents de communes, ont pourtant fait l'objet de jugements les annulant, assortis de lourdes astreintes financières et d'ordres de démolition restés lettre morte. Toujours selon les mêmes sources, des opérateurs influents camouflent leurs unités illégales derrière des façades trompeuses, en se présentant comme producteurs de canalisations d'irrigation ou de matériels agricoles. C'est le cas dans la commune de M'Barkiyine (province de Berrechid), où des licences de chambres froides agricoles, datant de 2013, ont été détournées pour couvrir des ateliers de transformation interdits. Les investigations menées par les services de la Wilaya pointent également l'implication de certains élus locaux dans ces circuits illicites. Des descentes effectuées sur des exploitations ont ainsi mis au jour de véritables usines clandestines, dotées de dizaines de machines et raccordées au réseau électrique subventionné sous couvert d'activités agricoles. Face à cette prolifération, les gouverneurs des provinces périphériques de Casablanca ont récemment adressé des rappels à l'ordre très fermes aux caïds, leur enjoignant de renforcer le contrôle sur les agents d'autorité et de bannir tout risque de connivence avec ces réseaux occultes. Ces mises en garde interviennent après la réception, par les services centraux du ministère de l'Intérieur, de rapports attestant la transformation de foyers d'habitat informel en véritables plaques tournantes d'activités industrielles prohibées, drainant illégalement l'électricité et menaçant les nappes phréatiques. Les enquêtes régionales ont permis de cartographier les trois plus grands pôles de production clandestine de sacs plastiques interdits : le premier dans la zone industrielle Moulay Rachid à Casablanca, le second à Douar Oulad Hadda (commune de Sidi Hajjaj Oued Hassar) et le troisième dans la zone dite « Lemsâada », rattachée à l'annexe administrative Haj Moussa, commune de Tit Mellil. Ainsi, les rapports accusent certains barons du secteur informel d'avoir exploité les périodes de congés des représentants de l'autorité locale (caïds, bachas et chefs de cercle) – étalés entre juillet, août et septembre – pour obtenir, en collusion avec des responsables communaux, des autorisations de clôture et de réhabilitation, avant de lancer des chantiers clandestins sur des terres agricoles. L'un de ces rapports cite nommément un « baron » du bâtiment informel à Sidi Hajjaj Oued Hassar (province de Médiouna) qui a réussi à ériger une briqueterie sur un terrain de deux hectares au douar Oulad Bouaziz, masquée derrière un haut mur destiné à dissimuler ses activités illicites.