Pendant des siècles, elle n'existait plus que dans les récits des voyageurs et les chroniques anciennes. Sijilmassa, la grande cité du Tafilalet, fondée à la fin du VIIIe siècle, revient aujourd'hui au jour, pierre après pierre, grâce au travail minutieux d'une équipe marocaine de l'INSAP. Depuis 2024, les archéologues explorent les ruines de cette ville longtemps disparue, avec le soutien du ministère de la Culture. L'Institut a partagé, le vendredi 25 juillet sur son compte Facebook, les résultats de sa dernière campagne de fouilles : une série de découvertes qui redonnent vie à un site oublié du grand récit national. Au cœur du chantier, les fondations d'une immense mosquée médiévale de 2 620 m², construite sous Abû al-Montasir al-Yasa', puis agrandie jusqu'à l'époque almohade. C'est aujourd'hui la plus ancienne mosquée de ce type jamais mise au jour au Maroc. Ses murs racontent mille ans de prières, de silence et de transformations. Autour d'elle, les chercheurs ont dégagé des éléments d'architecture précieuse : stucs sculptés de l'époque midraride, et fragments de bois peint et doré datant du XVIIIe siècle. C'est la première fois que des vestiges matériels d'un décor alaouite sont identifiés à Sijilmassa. Toutefois, le passé religieux n'est qu'une facette. Près de la mosquée, un moule en céramique a été retrouvé, contenant encore des résidus d'or. Il servait à fabriquer des flans pour les dinars sijilmassiens. C'est la toute première preuve physique de l'existence d'un atelier monétaire sur le site, une activité que les textes mentionnaient, sans qu'aucune trace n'ait été confirmée jusqu'à présent. Enfin, les fouilles ont mis au jour un quartier résidentiel alaouite, avec ses douze maisons, ses patios, ses objets de cuisine, ses réserves. Même les noyaux de dattes ont traversé les siècles. Ce quartier raconte le quotidien d'un sud marocain vivant, organisé, nourri de ses terres et de ses échanges.