Gaza est en train de sombrer. « Le pire scénario de famine est en train de se réaliser », ont alerté mardi des experts de la plateforme Integrated Food Security Phase Classification (IPC), soutenue par les Nations Unies. Les données sont sans appel. Deux des trois seuils définissant une famine ont déjà été franchis dans la majorité du territoire, où les niveaux de malnutrition aiguë confirment les avertissements répétés des agences humanitaires. Selon l'évaluation de l'IPC, « les preuves s'accumulent montrant que la famine généralisée, la malnutrition et les maladies entraînent une augmentation des décès liés à la faim ». Ross Smith, directeur des urgences au Programme alimentaire mondial (PAM), a déclaré à Genève qu'il s'agit clairement d'une « catastrophe qui se déroule sous nos yeux, sur nos écrans de télévision. Ce n'est pas un avertissement, c'est un appel à l'action. C'est sans précédent au XXIe siècle ». Les experts de l'IPC ont par ailleurs fait savoir qu'un habitant sur trois survit désormais plusieurs jours sans nourriture. Les hôpitaux, eux, sont au bord de la rupture. Depuis avril, plus de 20.000 enfants ont été traités pour malnutrition aiguë, et au moins 16 enfants de moins de cinq ans sont morts de causes liées à la faim depuis la mi-juillet. Et ce n'est qu'un début. En mai 2025, une analyse de l'IPC avait déjà prédit un niveau d'insécurité alimentaire catastrophique pour l'ensemble de la population d'ici septembre. D'ici là, au moins 500.000 personnes devraient se retrouver en phase 5 de l'IPC, la « catastrophe », marquée par la famine, la misère extrême et la mort. Cette spirale infernale a été causée par près de deux années de conflit, générant des milliers de morts et de blessés, ainsi que la destruction de près de 70% des infrastructures à Gaza. Le déplacement des civils est devenu, quant à lui, la norme. L'IPC estime que 90% des 2,1 millions d'habitants ont été déplacés, souvent à plusieurs reprises. Depuis la fin de la trêve le 18 mars, plus de 762.500 nouveaux déplacements ont été enregistrés. Les zones considérées comme « sûres » ne représentent plus que 12% du territoire. Bien que les appels à la paix se multiplient, l'accès humanitaire reste dramatiquement limité. Les convois sont régulièrement entravés ou pillés, et les ONG peinent à atteindre les populations en détresse. Dimanche dernier, Israël a annoncé l'instauration de « pauses humanitaires » quotidiennes, permettant l'entrée de plus de 100 camions. Une amélioration, certes, mais très loin de répondre aux besoins urgents de la population. En ce sens, l'IPC appelle la communauté internationale à exiger un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel, un accès humanitaire sans entrave, ainsi que la restauration urgente des services de base. « Des morts massives sont imminentes sans intervention urgente », prévient leur rapport. Les experts réclament également la protection des civils, du personnel humanitaire et des infrastructures critiques, notamment celles liées à la santé, à l'eau, à l'assainissement, aux routes et aux télécommunications.