Lisbonne lance un plan de 400 millions d'euros pour renforcer la résilience de son réseau électrique, tout en misant sur une future interconnexion avec le Maroc pour garantir sa sécurité énergétique à long terme. Le Portugal accélère la transformation de son réseau électrique après le black-out majeur du 28 avril dernier, qui avait touché l'ensemble de la péninsule Ibérique. Trois mois après l'incident, le gouvernement portugais a présenté un ensemble de 31 mesures visant à renforcer la stabilité du système électrique national. L'une des options stratégiques évoquées par les autorités de ce pays concerne le projet d'interconnexion électrique avec le Maroc, appelé à jouer un rôle clé dans la sécurité énergétique du pays. Lisbonne tire les leçons du black-out C'est à l'occasion d'une conférence de presse tenue à Lisbonne le 28 juillet que la ministre portugaise de l'Environnement et de l'Énergie, Maria da Graça Carvalho, a détaillé ce plan de résilience énergétique estimé à 400 millions d'euros. Selon elle, ces mesures auront un impact tarifaire quasi nul pour les usagers, de l'ordre de 0,04 % pour une facture mensuelle de 25 euros. L'essentiel de cet investissement proviendra de fonds européens et du Plan de relance et de résilience (PRR), tandis qu'une partie sera prise en charge par les consommateurs à travers les mécanismes tarifaires approuvés par le régulateur ERSE. Parmi les actions immédiates, figurent le renforcement du contrôle automatisé du réseau, la numérisation des données en temps réel, le lancement d'un appel d'offres pour des capacités de stockage par batteries d'ici 2026, ainsi que le soutien à l'autoconsommation dans les infrastructures critiques telles que les hôpitaux. L'interconnexion avec le Maroc, un élément décisif Mais au-delà des mesures techniques nationales, les autorités portugaises soulignent l'importance d'un meilleur ancrage régional pour prévenir de futurs incidents de grande ampleur. À ce titre, le projet de liaison électrique entre le Portugal et le Maroc prend une dimension particulière. Déjà soutenu politiquement dans le sillage de l'appui lisboète au plan d'autonomie marocain pour le Sahara, ce projet représente pour Lisbonne une opportunité d'élargir ses sources d'approvisionnement et d'exportation d'électricité. Le lien envisagé permettrait notamment au Portugal d'accéder à l'électricité produite à faible coût dans le Royaume, notamment via les centrales solaires et éoliennes implantées dans le sud du Maroc. Il offrirait aussi une voie d'export pour les surplus d'électricité verte portugais, dans un contexte où l'Europe cherche à construire une architecture énergétique résiliente et intégrée avec les pays voisins du Sud. Une séparation du réseau ibérique inquiétante Le rapport technique préliminaire présenté par le groupe d'experts de l'ENTSO-E (le réseau européen des gestionnaires de transport d'électricité) a confirmé que le black-out du 28 avril résultait d'une série de tensions en cascade, déclenchées dans le sud de l'Espagne, qui ont conduit à une désynchronisation totale de la péninsule Ibérique du reste du continent. Il s'agit d'un phénomène sans précédent dans l'histoire des réseaux européens. Face à cette fragilité structurelle, la diversification des connexions internationales, notamment vers l'Afrique, apparaît comme une solution stratégique. Le projet de câble électrique sous-marin Maroc-Portugal, encore en phase d'étude, s'inscrit dans cette vision partagée d'une coopération euro-marocaine dans le domaine énergétique.