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Droit d'accès à l'information, encore une loi vidée de sa substance ?
Publié dans La Vie éco le 23 - 03 - 2019

20 ans après la tentative d'Abderrahmane Youssoufi, c'est à El Othmani que revient le privilège de donner le coup d'envoi au gouvernement transparent. Malgré une volonté politique clairement affichée, la loi 31.13 relative au droit d'accès à l'information ne répond pas aux attentes. Des termes et des concepts vagues, des délais démesurément allongés et des sanctions en bout de chemin, la loi déçoit.
Le gouvernement «veille à réussir le chantier d'accès à l'information, compte tenu de son rôle dans le renforcement de la transparence des administrations». C'est le chef du gouvernement qui l'affirme. Saad Eddine El Othmani a également réitéré, à l'occasion de l'entrée en vigueur le 12 mars de la loi 31.13 relative au droit d'accès à l'information, que «les agents administratifs ne doivent en aucun cas retenir l'information ou les décisions qui concernent généralement l'usager». Véritable volonté de changement, ou simple vœu pieux comme le gouvernement en a tant fait ? Le fait est que, près de vingt ans plus tôt, le Premier ministre d'alors tenait, à peu de choses près, les mêmes propos. Abderrahmane Youssoufi était pourtant animé d'une forte volonté de réforme dans une conjoncture qui ne s'y prêtait pas du tout. Les prérogatives du chef du gouvernement n'étaient pas aussi étendues qu'elles le sont aujourd'hui.
Quoi qu'il en soit, en adoptant, en 1998, un Pacte de bonne gestion, le gouvernement d'Abderrahmane Youssoufi proposait de faire de l'information du citoyen un élément central de la réforme de l'administration marocaine. Ce pacte comprenait même un «engagement de l'administration à communiquer, à se concerter et à être réceptive». Pour le gouvernement d'alternance, «l'accueil, l'information et l'écoute des citoyens devraient désormais constituer une préoccupation centrale des services publics». Plus de 20 ans plus tard, nous en sommes encore très loin. Les principes du pacte n'ont pas été pleinement assimilés par les représentants de la fonction publique qui ne voulaient pas jouer le jeu de la transparence. C'est vrai qu'un pacte n'a pas la force d'une loi, il n'en reste pas moins que c'est pratiquement dans ces mêmes conditions que la nouvelle loi, attendue depuis au moins deux décennies, vient d'entrer en vigueur. Il devait pourtant en être autrement, puisque déjà depuis le discours de feu Hassan II, en 1993, devant le 1er colloque national sur l'information, on a assisté à de multiples déclarations d'intention et expressions de la volonté du gouvernement d'inscrire l'accès à l'information dans son agenda.
Une charge constitutionnelle en moins
On voit bien que ce n'est pas la volonté politique qui manque. Elle a d'ailleurs été mise en évidence lors du dialogue national «Médias et société», qui a eu lieu en 2010. Cette rencontre a été l'occasion pour les associations et les partis politiques (Istiqlal, PJD, RNI, USFP) qui y ont participé d'appeler à l'adoption d'une loi sur le droit d'accès à l'information. Deux d'entre ces partis, le RNI et le PJD plus précisément, ont même recommandé la constitutionnalisation de ce droit. Le RNI a d'ailleurs également recommandé le développement de la politique e-gov, la formation des fonctionnaires et l'initiation de «campagnes de sensibilisation à l'adresse du public, afin de l'encourager à utiliser ce droit». Si ces recommandations avaient été prises en compte on serait certainement bien plus avancés. En tout cas, la culture de l'information aurait été bien plus ancrée au sein de l'administration. L'USFP, elle, a insisté sur la «mise en œuvre pratique» du droit à l'information, qui «suppose un travail parallèle au niveau de l'archivage, de la modernisation des administrations et la généralisation de l'utilisation des systèmes d'information». Quant à l'Istiqlal, il a inscrit la nécessité d'une loi sur l'accès à l'information dans une volonté plus générale «d'élaborer un code légal unifié sur l'exercice informationnel».
Bref, il aura fallu l'adoption d'une nouvelle Constitution, en 2011, qui consacre, dans son article 27, le droit d'accès à l'information et impose la mise en place d'un cadre juridique pour l'organiser. Et encore ! Il a fallu, en effet, 8 ans pour que ce cadre devienne effectif. Mais il reste en deçà des attentes. Encore une fois, comme n'ont pas manqué de le souligner les défenseurs des droits de l'Homme, il semble que le gouvernement s'est contenté d'expédier une «corvée» constitutionnelle. Certes, le chef du gouvernement s'est bien empressé de mettre en place la commission du droit d'accès à l'information. Celle-ci planche actuellement sur l'élaboration de son règlement intérieur, apprend-on. Lequel règlement devra préalablement être publié au Bulletin officiel avant le démarrage de ses travaux. En attendant son entrée en service, le chef du gouvernement se contente d'appeler les administrations «à préparer des documents au préalable à travers leurs sites institutionnels ou par le biais des moyens disponibles en vertu de la loi». C'est que la véritable mise en œuvre de cette loi va prendre encore du temps.
Le flou total
La commission, une fois qu'elle aura adopté son règlement intérieur, doit également élaborer le formulaire de demande prévu dans l'article 14, sans lequel aucune demande ne pourrait être satisfaite. Certes, au sein de la commission on laisse entendre que la demande peut être faite sous n'importe quelle autre forme, pourvu qu'elle respecte les autres conditions formelles, mais ne c'est pas acquis. Après, il faut également nommer et former les personnes chargées de recevoir, d'étudier et de répondre aux demandes d'information (art.12). De même que les institutions et les organismes concernés sont tenus de «prendre les mesures nécessaires permettant d'assurer la gestion, la mise à jour, le classement et la conservation des informations dont ils disposent, selon les normes adoptées en la matière, (…)» (art. 11). Ce qui risque également de prendre beaucoup de temps. Et quand bien même toutes ces formalités seraient respectées, ce n'est toujours pas gagné. La loi en elle-même comporte plusieurs aspects rédhibitoires. Une lecture rapide du texte a permis de relever des imprécisions et des écueils dont elle est truffée et qui peuvent en altérer la bonne application. En termes de terminologie, le texte se contente de définir les termes «information» et «institutions», laissant d'autres concepts sans précision comme «l'intérêt général» (art.6) et la «sécurité intérieure» (art.7) entre autres. Les analystes noteront également un flou dans l'application de cette loi, surtout lorsqu'il s'agit du chapitre des sanctions. Ainsi, si a priori l'article 12 précise que la personne ou les personnes en charge des demandes «sont dispensées de l'obligation du secret professionnel prévu par la législation en vigueur», l'article 28, lui, renvoie à l'article 446 du code pénal relatif justement à la divulgation du secret professionnel quand il s'agit des infractions à l'article 7 de cette loi. Or, cet article énumère entre autres informations qui font exception du droit d'accès à l'information, celles qui peuvent être considérées comme préjudiciables, notamment, aux relations avec un autre pays ou une organisation internationale et à la politique monétaire, économique ou financière de l'Etat. Cela d'autant que là encore les termes restent très vagues.
A l'ère du big data, des délais farfelus
De même, l'article 6 énonce que les informations peuvent être utilisées ou réutilisées, à condition que cela soit fait à des fins légitimes, sans altération de leur contenu.
Plus loin, l'article 29 prévoit des sanctions, selon l'article 360 du code pénal, contre toute altération du contenu des informations ayant porté préjudice à l'institution ou à l'organisme concernés. Les mêmes sanctions sont prévues lorsque l'utilisation ou la réutilisation des informations porte préjudice à l'intérêt général. Cela d'autant, note-t-on, que ce genre de dispositions ne devraient même pas figurer dans la loi, étant donné que les domaines non concernés par ce droit sont clairement spécifiés et même anormalement étendus. Curieusement, le demandeur de l'information ne bénéficie pas d'autant de protection. Les délais pour obtenir l'information sont considérés comme abusivement très longs.
L'administration dispose ainsi d'un délai de 20 jours, «ouvrables», précise la loi, pour répondre à la demande. Ce délai peut être prolongé d'une durée similaire si l'institution ou l'organisme concerné n'est pas en mesure de donner suite, en tout ou en partie, à la demande ou si cette dernière porte sur un grand nombre d'informations (art.16). Ce qui fait déjà 40 jours d'attente.
A l'ère des NTIC, du big data et de l'information instantanée, c'est une éternité. Il se peut tout simplement que la personne chargée de recevoir la demande s'abstienne, de bonne foi, de délivrer l'information.
Pour le recours, c'est, pour ainsi dire, un chemin de croix. Le demandeur doit, en effet, saisir en premier le président de l'institution ou l'organisme concerné qui dispose d'un délai de 15 jours pour donner suite à ce recours. Ce n'est qu'après que le demandeur peut s'en remettre à la commission du droit d'accès à l'information qui, elle, dispose d'un délai de 30 jours pour statuer. Soit un parcours de plus de trois mois avant de pouvoir saisir la justice administrative, en dernier recours. Rien de plus rédhibitoire. C'est pour dire, là encore, comme c'est le cas pour plusieurs autres lois prévues par la Constitution, que nous sommes donc très loin, en effet, de l'esprit de la loi fondamentale, mais aussi des attentes exprimées à la veille de son adoption.
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[tab title="Un parcours législatif atypique" id=""]Bien avant la promulgation de la nouvelle loi, plusieurs initiatives pour mettre en place un cadre juridique ont été avortées. Ainsi, suite aux Assises de l'administration de 1999 et à la volonté du gouvernement d'alternance de moderniser l'administration, un comité ministériel a été chargé de travailler sur un projet d'amendement de l'article 18 du statut général de la fonction publique. Lequel article précise que «tout fonctionnaire est lié par l'obligation de discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les faits et informations dont il a connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions». Ce projet n'a jamais abouti.
En 2006, le groupe parlementaire de l'USFP a préparé une proposition de loi relative au droit d'accès à l'information. Ce projet n'a pas été programmé en raison du contrôle du gouvernement sur l'agenda du travail législatif et n'a de ce fait pas, lui non plus, abouti.
Les parlementaires marocains ont voté la résolution de l'Union interparlementaire de 2009 sur la liberté d'expression et le droit à l'information et qui rappelle l'importance du droit d'accès des citoyens à l'information mais aucune mesure législative n'a été prise en conséquence. En 2010, les socialistes de l'USFP reviennent à la charge en déposant de nouveau la même proposition de loi devant le bureau de la première Chambre, mais avec le même résultat. Cette proposition de loi constitue d'ailleurs un cas intéressant en matière de législation et surtout des rapports entre le gouvernement et l'institution législative. Non découragée par l'issue de ses deux premières tentatives, l'USFP a encore déposé sa proposition de loi en juillet 2012. Mais cette fois elle a fini par être programmée et la commission de la justice a même entamé son examen. Le gouvernement a essayé de s'y opposer, mais n'ayant pas encore présenté un projet de loi, le président de la commission a rejeté son veto en maintenant l'examen de la proposition de l'USFP. La majorité, pour contourner la situation, décida alors de présenter une deuxième proposition sur le même sujet, signée par le MP. C'était en janvier 2013. Normalement, dans un cas pareil, lorsque deux propositions traitant d'un même sujet sont déposées, c'est la première qui est retenue. La commission peut, éventuellement, dans un cadre consensuel, programmer les deux textes et les mixer pour en tirer un texte amélioré. Ce fut justement le cas. Entre-temps, le gouvernement a eu le temps de préparer son propre projet de loi qu'il a déposé en juin 2015. Dans ce cas, la pratique veut que la commission surseoit à l'examen des deux propositions ou que leurs auteurs les retirent. Elle ne l'a pas fait, le président de la commission a insisté pour maintenir l'examen des trois textes en même temps, ce qui est une première dans la pratique parlementaire. Au final, c'est le projet de loi qui a finalement été retenu, il a été adopté in extremis par la première Chambre, le 20 juillet 2016 après un an de débats. Il a fallu un an et demi à la deuxième Chambre pour qu'elle l'adopte, à son tour, définitivement le 6 février 2018.[/tab]
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