La sérénité, ou plutôt l'optimisme prudent, règnent au sein de Bank Al-Maghrib. Le taux directeur ainsi que celui de la réserve monétaire ont été inchangés, à l'issue du dernier conseil de la Banque centrale. Une réunion particulière, qui se veut un prélude au rapport annuel qui devra être présenté au Souverain par Abdellatif Jouahri, gouverneur de BAM, avant la fin de ce mois. Pour l'heure, les conclusions du conseil sont plutôt positives dans l'ensemble. «Les dernières données font ressortir la poursuite de l'amélioration de l'activité économique. Sur l'ensemble de l'année 2010, le redressement des activités non agricoles devrait en effet se confirmer», indique le wali de la banque centrale. Jouahri conditionne, néanmoins, ce même redressement à la détérioration récente de la situation financière. Selon lui, les réalisations des activités agricoles ne seront positives que si les dernières perturbations de la situation financière ne «se propagent pas davantage à la sphère réelle sur le plan international». Les secteurs non agricoles devraient ainsi afficher des valeurs légèrement haussières en 2010, qui se répercuteraient de manière positive sur le PIB global. Celui-ci devrait tout de même progresser à un rythme inférieur à celui enregistré l'année précédente, soit entre 3 et 4%, «en raison de la contraction prévisible de la production agricole par rapport au niveau exceptionnel atteint en 2009», souligne-t-on chez BAM. Par contre, les exportations piétinent toujours autant, malgré une bonne performance des phosphates. «Les autres secteurs à l'export manquent toujours autant de diversification et de compétitivité. La mise en œuvre de la stratégie nationale de l'export demande du temps. Espérons que cela sera rattrapable», commente Jouahri. Une inflation à 1,2% en 2010 Concernant l'analyse des conditions monétaires, elle affiche, sur la base des données arrêtées à fin avril 2010, une poursuite de la croissance modérée de l'agrégat M3, revenue à 3,9%, après 4,6% au premier trimestre 2010. En outre, selon la Banque centrale «le rythme de progression du crédit bancaire, bien qu'en ralentissement, reste soutenu, s'établissant à 10,2% en avril dernier». Quant à la prévision centrale de l'inflation, elle a été révisée à 1,7% en moyenne sur l'horizon de six trimestres, contre 1,4% en mars 2010. Partant, pour l'année en cours, la cherté de la vie s'établirait en moyenne à 1,2%, contre 1% annoncé lors du dernier conseil en mars 2010. Au troisième trimestre 2011, elle devrait se situer autour de 2%. «Les risques entourant la prévision d'inflation restent légèrement orientés à la hausse, en liaison avec les perspectives d'évolution des prix à l'importation et du crédit bancaire. Dans ce contexte, le Conseil a décidé de maintenir le taux directeur à 3,25%». Et la gratuité des services de caisse ? L'éloquence du gouverneur de BAM n'est plus à démontrer. La réunion post-conseil est toujours l'occasion d'aborder moult questions, auxquelles Jouahri répond avec sa verve habituelle. Ainsi, sur le dossier encore d'actualité de la gratuité de certaines opérations bancaires, il apparaît que la mise en œuvre de la circulaire correspondante est imminente. Il est également question d'harmonisation des contrats d'ouverture de compte. Concernant la gratuité des services de caisse, le gouverneur a été plus que ferme : «Nous allons y veiller, nous seront intraitables et nous appliquerons les pénalités prévues. Sur le plan régional, nous prévoyons de déployer des agents de BAM dans le but de contrôler ces opérations». Jouahri a également été loquace sur un sujet qui lui tient à cœur, celui de la révision des statuts de BAM ainsi que de la loi bancaire. «La crise a révélé des éléments qui n'étaient pas pris auparavant en considération. La réforme doit notamment, introduire la notion de stabilité financière, qui n'existait pas dans nos statuts», souligne Jouahri, qui a également insisté sur l'effectivité de l'indépendance des régulateurs financiers, ainsi que sur les enseignements à tirer des directives de Bâle III. «La spécificité marocaine doit s'adapter aux orientations données à l'international».