Chacun pour soi et... le gouvernement pour tous ! C'est la meilleure illustration qui puisse rendre compte du contexte politique dans lequel les partis politiques marocains préparent le scrutin du 25 novembre prochain. Une situation qui témoigne de l'ampleur de la guerre de positionnement entre les différents bords politiques et qui donne, surtout, le ton de la prochaine session extraordinaire du Parlement qui se penchera sur les 5 projets de lois organiques. À défaut du consensus que cherche désespérément le gouvernement, c'est au niveau même des coalitions des partis que, parfois, les divergences persistent. Un état de fait qui rend encore plus compliquée l'adoption d'une autre alternative laquelle aurait permis de faire l'économie d'un temps assez précieux au vu du délai qui court jusqu'à la date du scrutin. La grande interrogation du moment c'est la portée même de ces concertations eu égard à la cacophonie qui règne au niveau des quelques résultats annoncés. Une critique qui se justifie si l'on en juge par les réactions, assez éparses, ayant accueilli la validation de la date du scrutin fixé au 25 novembre. Selon les explications données par le ministre de l'Intérieur et confirmées par la suite par certaines formations et tout dernièrement par le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, «la date du 25 novembre pour la tenue des élections législatives a été choisie suite à de larges concertations avec les acteurs politiques». Khalid Naciri est même allé plus loin en précisant «qu'au cours de cette réunion, cette date n'avait fait l'objet d'aucune réserve, tout en estimant que toutes les dates peuvent présenter aussi bien des avantages que des inconvénients». Une réponse clairement adressée à son homologue de l'Economie et des finances, Salaheddine Mezouar, par ailleurs président du RNI, l'un des premiers partis à rejeter la date du 25 novembre, en raison de sa coïncidence avec l'examen de la loi de finances pour le prochain exercice budgétaire. Chose qui, évidemment, lèse le parti pour la campagne électorale, son président ne pouvant être au four et au moulin, souligne-t-on au RNI qui, pourtant, n'a pas été suivi dans cette logique, par son traditionnel allié, l'UC. Dans une déclaration faite, en fin de semaine, le secrétaire général du parti, Mohamed Abied, a indiqué que le choix du 25 novembre comme date pour la tenue des législatives est intervenu dans le cadre d'un consensus entre le ministère de l'Intérieur et les partis politiques, précisant que «pour ce qui est de la date des élections, notre souci était depuis le début d'accélérer l'élaboration des lois et la fixation du délai légal de 52 jours, pour renouveler les listes électorales». Une position qui rejoint, à quelques détails près, les raisons qui ont poussé le gouvernement à entériner cette date laquelle permettra selon son porte-parole, «de concilier entre l'impératif d'accélérer l'élection d'une nouvelle Chambre des représentants et, partant, la constitution d'un nouveau gouvernement, d'une part, et la garantie de délais suffisants pour la promulgation des lois électorales, d'une autre part». Polémiques sur l'approche consensuelle La requête du RNI pour décaler le scrutin risque donc et à tous points de vue de ne pas aboutir même si les indépendants ont été rejoints par le PJD. «Nous avons fait connaître notre position depuis un certain temps consistant en le rejet de la tenue de ce scrutin durant la période qui nous sépare de la fin de l'année, pour la simple raison que le gouvernement va déposer le projet de loi de finances au Parlement, au plus tard le 20 octobre», a souligné un responsable du parti de la lampe, ajoutant que «la discussion dudit projet devra durer au moins deux mois». Du coup, c'est la méthodologie même dans la recherche de l'improbable consensus qui commence à déplaire à certaines formations politiques. Selon le PJD, «il aurait été préférable d'en référer à l'institution législative pour trancher le débat en cours sur les textes électoraux, eu égard à la difficulté de dégager un consensus de l'ensemble des forces politiques». Même son de cloche du côté du RNI qui soutient que «la méthodologie adoptée pour gérer l'étape actuelle n'a pas pris en compte les exigences propres à favoriser un climat de compromis». Du côté de l'Istiqlal, par contre, c'est un autre avis qu'on donne. Le parti de l'actuel chef de gouvernement a déclaré «prendre acte avec satisfaction de la méthodologie suivie à ce jour pour la gestion du dossier des élections et qui repose sur l'approche participative et la recherche du plus haut degré de consensus, ce qui est sans précédent dans les annales électorales du Maroc». Selon un responsable du bureau exécutif du parti qui n'a, d'ailleurs, émis aucune réserve par rapport à la date du scrutin et qui vient de tenir une session extraordinaire de son conseil national sur la préparation des élections, la seule exigence «c'est de favoriser le climat politique approprié pour faire en sorte que ces élections renforcent les acquis constitutionnels et que des consensus soient dégagés à propos des chantiers ouverts, à leur tête celui relatif aux textes électoraux». Une rhétorique qui semble séduire le gouvernement. Selon Khalid Naciri, en tout cas, «les textes juridiques seront soumis incessamment au gouvernement, dès la fin des consultations avec les acteurs politiques dans le cadre de la démarche visant l'établissement d'un accord de principe». Le gouvernement semble déjà avancer dans cette logique puisque le dernier Conseil du gouvernement a été consacré, entre autres, au coup d'envoi de l'examen des projets de lois électorales. C'est ainsi que le projet de loi relatif au renouvellement des listes électorales générales et leur clôture après traitement informatique a été adopté lors du Conseil de jeudi dernier. Un des premiers documents qui a pu passer l'étape cruciale des concertations avec les acteurs politiques, selon le gouverneur directeur des élections au ministère de l'Intérieur, Hassan Aghmari, et qui contient assez de nouveautés devant permettre de garantir une large participation des citoyens, au moins sur les listes électorales. Lire aussi: Rappel à l'ordre royal Renouvellement des listes électorales, ce qui va changer... L'une des principales nouveautés contenues dans le projet de loi relatif au renouvellement des listes électorales, qui vient d'être adopté en Conseil de gouvernement, concerne la supervision de cette opération post-électorale, qui sera, pour la première fois, confiée aux magistrats, lesquels remplaceront les walis et gouverneurs à la tête des commissions administratives. Ceux-ci devront donc se charger de l'organisation du processus de renouvellement des listes électorales actuelles, à travers leur examen en s'assurant de l'identité des inscrits sur la base de la carte nationale d'identité. Ces magistrats seront désignés par le premier président de la cour d'appel au niveau de chaque commune ou circonscription. Le traitement informatique des listes électorales sera, également, sous la charge d'une commission technique nationale qui sera chapeautée par un président de Chambre à la Cour suprême et composée de représentants des partis politiques. Pour les MRE, le texte dispose que leurs inscriptions se fera au niveau des communes ou circonscriptions de leur naissance où ils disposent de biens ou d'une activité professionnelle ou commerciale, tout en veillant à simplifier cette opération «en stipulant le dépôt direct de l'inscription auprès de la commission administrative compétente ou au niveau des ambassades ou consulats de leur lieu de résidence». Le projet de loi a accordé un délai de 30 jours pour recevoir les demandes des nouvelles inscriptions et les demandes de transfert d'inscription. Selon les explications données par le porte-parole du gouvernement, «les partis politiques ont le droit d'obtenir une copie de la liste provisoire, celle des radiations, le tableau des demandes rejetées et le tableau rectificatif final, durant la période de dépôt».Un décret interviendra, prochainement, sur proposition du ministre de l'Intérieur, et fixera le calendrier des différentes étapes d'établissement des listes. L'appel de détresse des petits partis Ils sont présents sur la scène politique et veulent se faire bien entendre. Eux, ce sont «les petits partis» en raison de leur absence au Parlement ou au niveau des collectivités locales. Conscients de l'opportunité qu'offrent les consultations en cours, ils multiplient les sorties médiatiques afin de porter haut leur revendications. Récemment, ils ont même créé une coalition afin d'apporter une réponse commune aux amendements à porter aux projets de lois électorales. En dépit des divergences entre la vingtaine de formations politiques qui la composent, l'alliance de fortune pourra ainsi parler d'une seule voix. Car une fois l'étape des consultations politiciennes terminées, ces partis n'auront plus droit de cité lorsque viendra l'heure des vrais débats au cours de la session extraordinaire du Parlement. Leur plus grosse inquiétude, le maintien du seuil de représentativité, surtout à un niveau assez élevé (6 ou 8%) qui leurs priveraient de toute véritable existence sur la scène politique. Certains partis comme le parti travailliste, appellent à abaisser le seuil électoral à 3% pour la liste nationale lors des prochaines législatives, assurant que cela «permettra aux jeunes et aux femmes d'accéder au Parlement». Un appel qui risque de tomber dans l'oreille d'un sourd puisque sur la liste nationale, les grandes formations sont, encore, assez divisées. Déjà, le choix du monde de scrutin, a été un coup dur pour ces petites formations qui devront fournir plus d'efforts pour se mettre au diapason des partis représentatifs de l'échiquier politique du pays. L'union, dit-on, fait la force...