Entre projets solaires et parcs photovoltaïques de grande envergure, le Maroc met en avant un écosystème en pleine mutation. PME, TPE et startups sont appelées à monter en compétence pour devenir de véritables acteurs industriels, soutenus par les grands groupes et les clusters. La formation, la qualité, le financement et la gouvernance sont les leviers identifiés pour construire une chaîne de valeur «Made in Morocco» compétitive. Le développement du solaire au Maroc ne se résume plus aux grandes centrales et aux appels d'offres publics. Derrière chaque panneau photovoltaïque posé sur un toit ou chaque pompe solaire installée, se cache un écosystème en pleine structuration, où PME et startups jouent un rôle de plus en plus central. Mais comment ces acteurs, souvent de petite taille, peuvent-ils embarquer dans cette dynamique tout en répondant aux exigences des grands projets structurants et du marché international ? Selon Noureddine Aouda, directeur de l'innovation et des partenariats chez Nexans Maroc, le chemin est tracé, mais il reste exigeant. «Quand vous voyez une TPE qui passe à PME et une PME qui devient grande entreprise, l'espoir est permis». Cette montée en puissance traduit une dynamique réelle, mais le défi reste la qualité et la sécurité des installations, notamment pour ce qui est des centrales photovoltaïques dont la durée de vie est de 25 à 30 ans. «Une installation photovoltaïque, c'est une source de feu... il y a un enjeu de sécurité important et permanent», rappelle-t-il, soulignant la nécessité de formations qualifiantes pour les artisans et les PME. Former, certifier, accompagner Le cluster ENR Maroc joue un rôle moteur pour structurer ce vivier d'acteurs. Il a mis en place le label TACAPRO, conçu pour garantir la qualité des installations solaires et inciter les PME à structurer leurs compétences. «Nous organisons plusieurs formations tout au long de l'année», explique Houda Bouchara, responsable développement au sein du cluster. Ces formations techniques et technologiques sont complétées par un accompagnement à l'export et des projets pilotes en collaboration avec l'université et l'industrie, comme le futur CSP thermique. Chez Nexans, l'accent est également mis sur la formation et la sécurité. L'entreprise a développé un programme permettant de former artisans et PME à l'installation sécurisée des panneaux solaires, tout en les sensibilisant à la durabilité et aux normes requises pour les projets de grande envergure. Pour Nader Al-Zouabi, directeur général Maroc et Mauritanie chez Schneider Electric, la PME fait partie intégrante de l'écosystème. «Nous préférons pousser et développer cet écosystème de compagnies locales pour présenter notre entreprise au marché», explique-t-il. Les startups ne sont pas en reste. Le cluster dispose d'un incubateur labellisé par Tamwilcom, qui accompagne les porteurs de projets depuis la structuration de l'idée jusqu'à sa commercialisation. Appels à projets et challenges permettent de repérer les solutions innovantes, tandis que les jurys de financement offrent un soutien concret aux initiatives les plus prometteuses. Travailler ensemble pour une chaîne de valeur locale Tous les intervenants insistent sur un mot clé : la collaboration. «Travailler ensemble, apprendre à travailler ensemble, c'est la raison d'être du cluster», affirme Houda Bouchara. Cela implique que les grandes entreprises accompagnent les PME, elles-mêmes capables de soutenir les TPE. Les actions combinées (formation, financement, intégration industrielle, régulation) doivent converger pour créer un écosystème capable de répondre aux besoins locaux tout en étant compétitif à l'international. Pour Nader Al-Zouabi, la transition énergétique est une opportunité de transformation industrielle majeure. «Aujourd'hui, nous voyons que le monde et le futur seront électriques. Votre voiture, votre four, votre machine à cuisiner seront électriques». Dans ce contexte, le solaire devient un catalyseur de compétences et d'industrialisation, mais la réussite dépendra de la capacité des acteurs locaux à monter en gamme et à innover. Noureddine Aouda complète ce constat en rappelant l'importance du «Made in Morocco». «Nous devons aider à se différencier entre le made in Maroc et l'importation. Le transfert de technologie est central, mais il faut un soutien pour structurer l'offre locale», insiste-t-il. Le chemin est tracé : formation, qualité, financement, collaboration et gouvernance. Ces leviers doivent être activés à grande échelle pour que le pays devienne un hub solaire capable d'exporter ses compétences et ses technologies tout en réduisant son empreinte carbone. Les grands groupes, les clusters et l'ensemble de l'écosystème local doivent conjuguer leurs efforts pour transformer les ambitions en résultats tangibles, faisant du solaire marocain un exemple de transition énergétique inclusive et industrialisée. Nexans : former et sécuriser pour grandir Chez Nexans, la formation et la sécurité des installations photovoltaïques constituent une priorité stratégique. L'entreprise a mis en place des programmes complets destinés aux électriciens et aux PME, visant non seulement à améliorer la qualité technique des installations, mais aussi à réduire les risques liés à la sécurité, notamment le risque d'incendie. Pour répondre à ce défi, Nexans a développé un relais de formation permettant de toucher un maximum d'artisans et de PME, multipliant les sessions et assurant un suivi personnalisé. Mais son action ne se limite pas à la technique. L'entreprise accompagne les acteurs locaux dans la compréhension des exigences des grands projets structurants, dont la durée de vie s'étend sur 25 à 30 ans. «Nous avons développé un nouveau programme pour dispenser des formations qui permettent justement à ces PME ou même à des artisans de monter en compétence et d'exécuter ces installations complexes», ajoute Noureddine Aouda. Ainsi, Nexans transforme la montée en compétences locales en véritable levier de sécurité, de qualité et de pérennité pour l'écosystème solaire marocain. Schneider Electric : développer un écosystème local compétent Schneider Electric s'inscrit dans une approche résolument partenariale et locale. Le groupe a ouvert à Casablanca un centre d'entraînement dédié au développement des compétences des électriciens et des petites entreprises, offrant un cadre structuré pour apprendre, se perfectionner et se préparer aux exigences des projets solaires de grande envergure. Pour Nader Al-Zouabi, directeur général Maroc et Mauritanie, «la PME est un élément important de l'écosystème de l'entreprise». En pratique, Schneider Electric accompagne une quarantaine d'entreprises locales, les aidant à renforcer leurs capacités techniques, à structurer leur organisation et à se positionner pour participer à des projets majeurs. Le groupe forme les électriciens et les TPME dans la distribution électrique et le développement des compétences digitales. L'entreprise prévoit de former plus de 3.000 techniciens en trois ans. En parallèle, des partenariats avec des établissements universitaires visent à faciliter l'insertion professionnelle des jeunes et à renforcer leurs compétences dans les métiers de l'énergie. Cette approche démontre qu'un grand groupe peut non seulement réussir sur le marché, mais aussi catalyser le développement industriel local en formant et en valorisant les compétences existantes.