Analyste politique Cette année a marqué le cinquantenaire du conflit sur le Sahara marocain. À l'aube de ce que d'aucuns considèrent comme l'épilogue d'un feuilleton qui n'a que trop duré, l'analyste politique Driss Aissaoui revient sur les dynamiques qui ont marqué l'évolution du dossier ces dernières années. On parle aujourd'hui de 50 ans de différend sur le Sahara marocain, mais il faut relever entre-temps les décennies d'efforts concrets engagés par l'Etat dans les provinces du Sud... Il faut en effet saluer le travail énorme qui a été accompli par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, à savoir celui de l'intégration des populations sahraouies au niveau de tout ce qui touche aux droits socio-économiques. Les Sahraouis ont également pu bénéficier de leur processus d'intégration à travers le système d'élection sur les plans local, régional et national, parce qu'il y a beaucoup de personnalités importantes qui sont aujourd'hui à la tête d'institutions. Par exemple, le président de la deuxième chambre du Parlement est issu des provinces du Sud. Et sur le plan économique, on ne compte plus les investissements colossaux consentis dans les provinces du Sud, dont plusieurs à vocation internationale. Rappelons l'initiative d'ouvrir un très grand chantier stratégique sur le gazoduc Nigéria-Maroc qui bénéficiera en principe à pas moins de 12 pays du continent. Ce sont des pays qui sont enclavés et qui vont pouvoir accéder à la mer. Et il y a également l'Initiative atlantique royale pour ces pays-là pour, justement, avoir un accès direct. Autre chose, de manière plus concrète. Il y a toute la planification pour faire de Dakhla la grande porte vers l'Afrique subsaharienne, avec un port atlantique important en eau profonde qui sera l'un des plus grands ports du Maroc, aux côtés de ceux de Tanger Med et Nador. Il y a également tout le travail qui est fait pour l'énergie verte et tout ce qui touche aussi à l'agriculture et au tourisme dans ces régions. Donc je pense que tout ce travail permet aujourd'hui au Maroc d'être rassuré quant à l'avenir de ses provinces du Sud. Et tout cela, c'est grâce à l'implication directe et personnelle de Sa Majesté le Roi qui a donné une impulsion géostratégique extraordinaire à ce dossier. Grâce à ce travail et à cette initiative, nous sommes aujourd'hui dans la meilleure des situations. Donald Trump a-t-il été le «game changer» dans ce dossier ? Depuis le premier mandat de Donald Trump (2017-2021), un travail extrêmement important a été accompli, que ce soit par le Maroc ou les Etats-Unis. D'ailleurs, Donald Trump continue à agir dans ce sens. Et beaucoup de personnalités qui en sont très proches sont aujourd'hui à l'œuvre. Ce sont ces personnes qui sont derrière la proposition de résolution votée par le Conseil de sécurité. Quel regard posez-vous sur les dynamiques autour du dossier du Sahara au niveau du Conseil de sécurité de l'ONU ? Le constat à faire aujourd'hui, c'est qu'au niveau des membres permanents du Conseil de sécurité, nous avons en notre faveur la France, l'Angleterre, et les Etats-Unis. Donc, trois membres permanents sur cinq. Il y a un grand point d'interrogation sur la Chine. Mais au regard des importants projets économiques développés par Pékin au Maroc depuis quelques années, on peut la considérer parmi nos alliés. Concernant la Russie, rappelons qu'il y a eu récemment une réunion entre le ministre marocain des Affaires étrangères et son homologue russe. Réunion au cours de laquelle il a été clairement exprimé que la Russie va adopter une attitude qui n'irait pas à l'encontre des intérêts du Royaume du Maroc. Comment justifiez-vous ce positionnement de la Russie qui a longtemps été un allié de poids de l'Algérie ? On remarque d'abord que les relations entre l'Algérie et la Russie sont devenues très compliquées. Par ailleurs, la présence de forces russes au niveau des pays du Sahel pose un problème aux Algériens. Quant aux Russes, ils ne considèrent pas avoir une quelconque obligation vis-à-vis de l'Algérie. On remarque en même temps que le plan d'autonomie remporte une adhésion toujours plus franche sur le plan international. Qu'est-ce que cela dit de la diplomatie marocaine ? Il y a un travail énorme qui a été accompli par le gouvernement depuis avril 2007, lorsque le Royaume a présenté cette initiative d'autonomie sous souveraineté marocaine. C'est une proposition qui a emporté l'adhésion d'un très grand nombre de pays, que ce soit en Europe ou au niveau des Amériques, notamment l'Amérique latine. Cette initiative est toujours une proposition importante, qui permet au Maroc de regarder ce dossier avec le maximum d'objectivité. Quant à l'adhésion, comment elle est intervenue ? D'abord, il y a eu des déclarations qui ont été faites par le ministre marocain des affaires étrangères. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que nous disposons d'une diplomatie parlementaire très efficace et qui a fonctionné. À titre d'exemple, on remarque que la Belgique a beaucoup aidé à faire avancer la solution marocaine. Il en est de même pour l'Espagne qui, bien qu'étant l'ancienne puissance coloniale, est désormais favorable à la solution marocaine, et ce, sachant que beaucoup de projets sont développés en commun avec eux. Tout ce travail a fait qu'aujourd'hui, on est très sincèrement satisfait de l'évolution de ce dossier. Quel regard portez-vous sur le mandat de Staffan de Mistura, l'envoyé personnel du SG de l'ONU, en poste depuis 2021 ? Disons qu'il a eu le mérite de clarifier les situations et les rôles. C'est grâce à son travail qu'aujourd'hui, nous sommes en présence d'un dossier qui est bouclé. Et le vote du Conseil de sécurité est venu confirmer tout cela. Il faut aussi, à ce niveau, souligner l'évolution objective du travail de la Minurso. En effet, on ne parle plus d'elle comme d'une mission de mise en place de référendum d'autodétermination Bien au contraire, on parle d'accompagnement des territoires sahraouis sous souveraineté marocaine. Darryl Ngomo / Les Inspirations ECO