EXPERT MARITIME C'est une bonne nouvelle pour les acteurs de l'import-export. Les coûts du transport maritime connaissent une baisse considérable en cette fin d'année 2025. L'impact de cette baisse est attendu sur l'inflation, avant une reprise à partir de la mi-janvier. L'expert maritime Najib Cherfaoui nous explique pourquoi. Comment évoluent les prix des conteneurs en cette fin d'année ? Najib Cherfaoui : En ce dernier trimestre de 2025, les coûts du fret maritime ont diminué de moitié par rapport à la même période de 2024. Ainsi, pour un conteneur de 40 pieds, ils s'établissent à 2.000 dollars sur les routes commerciales transpacifiques et Shanghai-Maroc-Europe. C'est une baisse très intéressante par rapport au niveau que l'on a connus durant certaines périodes, notamment au lendemain de la reprise post-covid, puis quelques mois après le début de la guerre en Ukraine. Tout ceci est donc très salutaire surtout pour les opérations d'export-import, et notamment les exportateurs et importateurs des différents pays, y compris bien évidemment le Maroc. Cela dit, risque-t-on d'assister à une hausse notamment avec les fêtes de fin d'année ? Avec l'évènement du Nouvel An chinois (17 février 2026), il convient d'anticiper un léger redressement des taux durant la deuxième semaine du mois de janvier 2026. Mais, on peut affirmer que la situation est équilibrée et parfaitement maitrisée. Cependant, les transporteurs cherchent temporairement à relever les taux pour les «Groupages de fret» afin d'en tirer avantage lors de la prochaine saison de négociation des contrats. Il faut se mettre à l'évidence que le niveau de gains, lors de la flambée historique du fret maritime que j'évoquais tout à l'heure, n'est plus le même. C'était une situation exceptionnelle marquée par une course aux conteneurs et par une certaine rareté de ces conteneurs et tout ceci a bien évidemment énormément profité aux armateurs internationaux. Désormais, la situation est maîtrisée et tant mieux pour les exportateurs. Quel impact sur les prix au Maroc faudrait prévoir avec ce retour à la normale au niveau des prix du fret maritime ? Au Maroc, l'économie est directement liée aux fluctuations des coûts du transport maritime. Aussi, la stabilité actuelle de ces derniers permet de prédire un recul conséquent de l'inflation. De plus, l'Etat va débourser moins de ressources en devises, tous les indicateurs annoncent la reconduction de l'actuelle tendance pour l'année 2026. Et c'est encore une fois une très bonne chose. Comme vous le savez, dans les opérateurs d'importation, les Etats perdent des devises, et, là, nous aurons moins de devises étrangères à dépenser. Et c'est tant mieux pour l'économie nationale. Et tout ceci, encore une fois, devrait avoir un impact très positif sur la maîtrise de l'inflation, du moins en ce qui concerne l'aspect coût du fret maritime. Quant aux autres paramètres, il faudrait s'adresser ou plutôt interroger d'autres secteurs et intervenants dans la détermination des prix. Quel est l'impact des mesures environnementales sur la Méditerranée, les navires et les flux ? Le 1er mai 2025, le taux maximum d'émission de soufre autorisé pour les navires naviguant en mer Méditerranée est passé de 0,5% à 0,1 % : c'est-à-dire 500 (resp. 100) milligrammes d'émission de soufre par kilogramme de fioul lourd. De ce fait, elle est devenue la cinquième zone de contrôle des émissions d'oxyde de soufre au monde (zone SECA : sulfur emission control area). Pour bien comprendre l'étendue géographique des enjeux, il faut savoir que les vingt-deux (22) Parties contractantes à la Convention de Barcelone sont impliquées dans ce vaste mouvement d'assainissement marin. C'est un événement majeur pour l'environnement, avec émergence d'un ordre nouveau fondé sur la dichotomie suivante : d'une part, il y a les navires aptes à naviguer en mer Méditerranée (émissions à 0,1% de soufre) et, d'autre part, il y a les navires à émissions 0,5% de soufre. C'est en ce point précis que réside l'impact de la mise service de la zone SECA-Med : génération de deux types de lignes de navigation selon les plafonds de taux de soufre en vigueur. Comment les ports marocains peuvent-ils tirer profit de ces nouvelles réglementations ? La dichotomie, 0,1% versus 0,5%, entraîne, d'une part, la redécouverte du passage par le cap de Bonne Espérance, et, d'autre part, le redéploiement autour de l'Afrique de l'Ouest. Ainsi, de manière mécanique, l'ensemble du littoral atlantique du Maroc est identifié comme une ressource maritime mondiale, notamment Casablanca, Agadir et surtout le futur port Dakhla Atlantique. Enfin, il est important de souligner que la zone SECA-Med s'étend du méridien correspondant au phare de Cap Spartel à Tanger jusqu'à celui passant par Port Said, en Egypte. Nador West Med : Accostage du «Super Fast Levante» Jeudi 20 novembre dernier, pour des raisons de conformité par rapport au référentiel de l'OMI (Organisation maritime internationale), le navire roulier «Super Fast Levante» arrive d'abord au port de Nador (Béni Ansar) avant de joindre Nador West Med le 26 novembre. Pour ce voyage inaugural, il a pour mission d'assurer l'export de pales éoliennes produites par l'unité industrielle de la société «Aeolon». Il s'agit de pales de 74 mètres d'envergure, avec en option celles de la nouvelle génération de 81,5 mètres. Le navire peut ainsi charger jusqu'à 40 pales. Cette cargaison est destinée aux fermes de production d'énergie électrique établies en mer du Nord. «Super Fast Levante» devait appareiller le 30 novembre 2025, mais les vents violents, avec des rafales de 40 km/h, ont retardé son départ. Chaque aller-retour devrait durer quinze jours via le canal de Kiel (Allemagne). Abdellah Benahmed / Les Inspirations ECO