Réunis au Brésil pour un sommet stratégique, les dirigeants du Mercosur doivent composer avec un nouveau report de la signature de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne. Un revers de plus pour ce traité en négociation depuis 25 ans, miné par les réticences européennes, les sensibilités agricoles, et des fractures politiques de plus en plus apparentes. C'est dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu, emblématique car frontalière, que les représentants du Mercosur se sont retrouvés ce vendredi pour un sommet sous tension. Initialement prévu pour être le théâtre d'une signature historique, celui de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, le sommet s'ouvre sur une note de déception. L'accord a de nouveau été repoussé, cette fois à janvier 2026, sous la pression des agriculteurs européens et d'une opinion publique réticente, notamment en France et en Italie. Luiz Inácio Lula da Silva, président brésilien et hôte de la rencontre, espérait clore l'année de la présidence tournante du Mercosur par cette signature symbolique. Mais il a dû admettre que les blocages demeurent, évoquant un appel de Giorgia Meloni, Première ministre italienne, lui demandant «de la patience». Lula a nuancé ses propres ultimatums, concédant que si l'UE «n'est pas prête», il ne peut forcer les choses, tout en soulignant l'importance stratégique du traité pour la défense du multilatéralisme. Face à lui, l'inflexibilité française. Depuis Bruxelles, Emmanuel Macron a réitéré ses objections : «Nous ne sommes pas prêts, le compte n'y est pas pour signer cet accord». Malgré des clauses de sauvegarde censées protéger les marchés agricoles européens, le rejet du traité dépasse les seuls enjeux économiques. Une source gouvernementale brésilienne évoque même des «peurs irrationnelles» qui gangrènent l'opinion publique. En toile de fond, le sommet de Foz do Iguaçu est aussi le théâtre d'un choc idéologique entre deux figures opposées : Lula, homme fort de la gauche latino-américaine, et Javier Milei, nouveau président ultra-libéral de l'Argentine. Une tension accentuée par une publication polémique de Milei, caricaturant le Brésil comme une vaste favela face à une Argentine futuriste. Un geste qui n'a pas manqué de faire des remous diplomatiques, à la veille de leur première rencontre officielle. Ce sommet devait sceller une avancée majeure pour l'intégration sud-américaine sur la scène mondiale. Il révèle, à défaut, l'ampleur des résistances encore à surmonter — entre protectionnisme européen, clivages idéologiques et fragilités internes au bloc. Le Mercosur repart sans traité, mais avec une nouvelle preuve que la géopolitique commerciale ne se joue pas uniquement sur les chiffres.