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Claude Guéant
Publié dans Les ECO le 10 - 02 - 2011

Il est le secrétaire général de l'équipe présidentielle mise en place par le président français, Nicolas Sarkozy l Au Palais de l'Elysée, il contrôle et supervise tout l Une interview exclusive réalisée par Hichem Ben Yaïche et Guillaume Weill Raynal pour le «New African»
En votre qualité de secrétaire général, quelle est votre méthode, votre mode de gouvernance à l'intérieur du Palais de l'Elysée ?
Claude Guéant : Le président a autour de lui une équipe de quelque 45 personnes, sans compter le personnel administratif. C'est moi qui anime ce cabinet en ma qualité de secrétaire général. Notre travail - car nous fonctionnons en équipe - est de faire en sorte que le président soit informé de tout ce qui est nécessaire à l'exercice de ses fonctions, de lui préparer des dossiers, des éléments de décision et, ensuite, de les mettre en oeuvre. Nous participons aussi à l'explication de sa politique. Et puis il y a le travail avec le gouvernement. Le président donne les orientations au gouvernement. Le Premier ministre le dirige. Il est responsable devant le parlement.
Entre un président qui fonctionne à l'instinct, très intuitif, hyper-réactif, et vous, qui êtes vraiment aux antipodes de ce tempérament, comment marche le couple Sarkozy/Guéant ?
Cela fonctionne très bien, car il y a un patron : c'est lui. C'est tout simple. Nous avons une habitude déjà ancienne de travailler ensemble, puisque je m'honore d'être, depuis sept ans, le patron de son équipe rapprochée. Par conséquent, il y a de nombreuses choses qui se font sans que l'on ait besoin d'en parler. Je le comprends à demi-mot ! Mais, enfin, ne croyez pas non plus que Nicolas Sarkozy fonctionne à l'instinct. C'est plutôt quelqu'un qui a un grand instinct politique. Mais, surtout, il travaille énormément ! Il a de nombreuses réunions avec ses ministres et ses collaborateurs. Il étudie et consulte beaucoup, pour préparer les positions. Votre implication se situe à tous les niveaux du processus de décision élyséen. Mais vous avez, en plus, un rôle transversal, sur certains grands dossiers de politique étrangère, comme celui de la Syrie, de la Libye ou de l'Arabie Saoudite... Comment se fait l'articulation entre la cellule diplomatique, le Quai d'Orsay et vous ?
Cela se fait très facilement. On travaille, d'abord, sous l'autorité d'un seul chef : le président de la République. Et, ensuite, on fonctionne tout le temps ensemble. La cellule diplomatique a des contacts qui sont vraiment de tous les instants avec le ministère des Affaires étrangères. Et moi, je travaille avec elle toute la journée...
Il y a une touche particulière de Claude Guéant...
Qu'est-ce qui détermine tel ou tel type de contact ? C'est un peu le hasard, parce que vous pouvez avoir des circonstances qui font que vous avez une valeur ajoutée sur tel dossier plutôt que sur tel autre. Pour tout dire, je ne suis pas le conseiller diplomatique du président. Je ne m'occupe pas de politique étrangère à plein temps, mais il se trouve que sur certains dossiers, pour des raisons de relations personnelles, d'histoire, de préférence de nos interlocuteurs, je peux avoir une valeur ajoutée. On en parle avec les collègues, dans la meilleure entente. Ce qui détermine le choix, c'est cette interrogation : y a-t-il une valeur ajoutée ?
Justement, sur la politique étrangère de la France, il y a un vrai problème de lisibilité, en ce qui concerne sa politique africaine. Comment expliquez-vous (on a pourtant beaucoup parlé de «rupture») cette espèce de décalage entre la réalité, les principes, et les pratiques ?
Je voudrais bien savoir quel élément on compare à un autre.
Par exemple, la Françafrique...Ce sont ces réseaux qui continuent à fonctionner...
D'abord, s'agissant de problèmes de politique étrangère ou de problèmes de politique intérieure, ni le président de la République, ni ses collaborateurs, ni même ses ministres, n'ont de relations qu'avec les seules administrations. C'est extrêmement important. Par exemple, dans le domaine économique, nous rencontrons non seulement les fonctionnaires de Bercy qui sont des collègues (avec lesquels on a souvent des relations d'amitié), mais aussi des chefs d'entreprises, des banquiers, des assureurs, des industriels et des journalistes spécialisés ! Si on ne travaille qu'avec les administrations, on s'appauvrit beaucoup !
En ce qui concerne les relations avec l'Afrique, cela procède de la même démarche : il n'y a pas de «réseaux» particuliers, mais nous rencontrons d'autres personnes que les chefs d'Etat. À cet égard, la cellule africaine de l'Elysée, composé de trois personnes, reçoit des personnalités de tous horizons. Cela répond directement à votre question : nous n'avons pas des «réseaux», mais je dirais plutôt des «contacts», qui sont très divers. Vous allez évoquer des relations que nous pourrions avoir de façon plus régulière avec telle ou telle personnalité. Cela est vrai. De ce point de vue, on cite toujours le même nom, celui de Robert Bourgi. Cependant, je l'ai dit et je le répète, je suis sûr que cela ne lui causerait pas de peine, parce que c'est la réalité : il n'est ni le représentant du gouvernement français, ni un émissaire. C'est quelqu'un qui s'est tissé à titre personnel un réseau de relations en Afrique, qu'il connaît pour y être né, pour y avoir étudié et enseigné. Il est intéressant à écouter. Mais cela ne veut pas dire qu'il a toujours raison ou que l'opinion qu'il peut émettre sera suivie forcément. Je reçois régulièrement des interlocuteurs africains au pouvoir ou dans l'opposition. C'est toujours intéressant. Cependant, en ce qui me concerne, tout cela représente assez peu de mon temps.
Au sujet de la Françafrique précisément, la rupture - je prétends qu'il y a eu rupture dans la politique africaine de Nicolas Sarkozy - était annoncée avec une parfaite clarté, avant même qu'il ne devienne président : je pense en particulier à son discours de Cotonou. Au fond, en quoi consiste-t-elle ? Plusieurs éléments à prendre en compte : d'abord, nous considérons les pays africains comme des Etats majeurs ayant des peuples majeurs, qui tiennent à leur identité et ne veulent plus qu'on se mêle de leurs affaires. Eh bien, nous ne nous mêlons plus de leurs affaires !
Prenez la récente élection présidentielle gabonaise : je mets quiconque au défi de voir une ingérence française dans cette élection. Et, d'ailleurs, cela a été dit par un dirigeant politique gabonais, je l'ai vu et entendu à la télévision française, lors d'une réunion publique la veille ou l'avant-veille de l'élection, expliquant que la France ne s'était occupée en rien de cette élection ! Pour autant, cela ne veut pas dire qu'on s'en désintéresse. On veut que tout se passe bien. Et cela s'est bien déroulé. Dans ce cadre, le scrutin a-t-il été parfait ? Je n'en sais rien. Il y a des institutions pour le dire.
Autre élément de rupture très fort : les moyens de la coopération. Le président l'a dit, dans un discours important qu'il a prononcé en Afrique du Sud. D'abord, la France va réduire sa présence militaire ; ensuite, les accords de Défense seront tous revus, parce que la France n'a pas vocation à entretenir une force armée qui soit une sorte de garantie de la pérennité de tel ou tel régime. C'est une présence défensive. Enfin, en matière de coopération économique, nous privilégions désormais, par rapport aux grandes infrastructures, le développement des entreprises, de l'agriculture, de la santé, du tissu économique local, etc. Ce choix témoigne d'une autre relation. L'objectif : aider à créer de l'activité. Cela dit, nous ne sommes pas indifférents à l'égard de l'Afrique. Autre point important marquant cette rupture : le président considère que ces liens avec l'Afrique ne doivent pas être exclusivement tournés vers l'univers francophone, mais aussi anglophone, lusophone, etc. Est-ce de l'indifférence ? Certainement pas ! Car, d'une façon générale, la diplomatie a pour mission d'entretenir et de garder des liens d'amitié et de bonne entente pour éviter de se fâcher avec tout le monde. Nous sortons, il est vrai, pour des raisons historiques, d'une relation particulière avec l'Afrique. C'est parce qu'il y a aussi une grande population africaine vivant en France et que nous avons en partage la francophonie. À cet égard, nous considérons que la culture de la francophonie est un atout pour l'Afrique. Récemment, un chef d'Etat africain me disait : «Dans mon pays, il y a sept cents langues». J'ai tendance à dire : c'est une richesse fantastique. Le monde entier se mobilise pour préserver la biodiversité. C'est excellent ! Mais la diversité des cultures, c'est quelque chose de prodigieux qu'il faut aussi maintenir. Cela étant dit, on ne peut pas faire un développement avec sept cents langues. Il faut bien une langue commune : pourquoi pas la langue française ? Nous, nous trouvons que c'est bien...
Vous êtes personnellement impliqué dans ce que l'on appelle l'émergence de la diversité, notamment à travers la nomination d'un certain nombre de personnalités. Les propos reprochés à Brice Hortefeux sont en tout cas révélateurs d'un certain état d'esprit. Qu'est-ce qui explique ce décalage d'une certaine élite avec la réalité sociologique de la France ?
Brice Hortefeux n'est pas du tout un raciste. Je pense que ses propos ont été complètement sortis de leur contexte.
Mais au-delà de ces considérations, il s'agit d'un homme politique qui s'exprime...
Je dis bien, un : il n'est pas raciste ; deux : ces propos sont sortis de leur contexte. Cela étant, si vous voulez me faire dire qu'en France, il peut parfois y avoir, dans la bouche de certains, des propos déplacés, cela peut exister, c'est sûr ! Il y a même des racistes. Je voudrais dire, de façon fondamentale, que le président a fait de la promotion de la diversité une grande cause nationale. Il l'a montré, par exemple, dans la composition de son premier gouvernement ; il le montre en ce moment avec la mission qu'il a confiée à Yazid Sabeg, pour faire en sorte que les Français d'origines diverses se sentent complètement Français. Avec les mêmes chances que les autres, les mêmes droits.
Mais vous êtes un homme du concret,
de l'opérationnel, vous connaissez bien les raisons de ces blocages...
Oui, et c'est bien pour cela qu'on essaye de les surmonter. Pourquoi cela est-il important pour le président ? Parce que nous formons une nation. L'identité nationale, c'est un terme qui a été parfois contesté, veut dire des valeurs que nous partageons ensemble, afin que tout le monde s'y retrouve. Quelle que soit l'origine et quelle que soit la date d'arrivée dans la communauté nationale ! De façon concrète, on voit déjà un certain nombre de résultats. Quand il était ministre de l'Intérieur, le président de la République a fait en sorte, par exemple, que toutes les écoles de police soient dotées de classes préparatoires, jusqu'au niveau de commissaire, pour que les Français qui n'ont pas eu la chance d'être bien préparés à ces concours puissent avoir une préparation supplémentaire pour entrer dans les différents corps. C'est ce qu'on est en train de faire, dans le même ordre d'idée, avec les classes préparatoires aux grandes écoles. À la rentrée de l'année prochaine, il y aura 100 classes préparatoires aux grandes écoles – vous connaissez leur importance dans la mythologie nationale – qui seront accompagnées d'une préparation pour que des jeunes qui n'ont pas eu autant de chances que les autres et qui, disons la vérité, sont pour beaucoup des jeunes d'origine africaine ou maghrébine, puissent «recoller au peloton». De ce point de vue, on a des résultats merveilleux ! En un an, ces jeunes se remettent au niveau parce qu'ils ont du talent !
Mais vu l'urgence de la situation des banlieues, accentuée par la crise économique mondiale, pourquoi avoir choisi de retarder à plus tard un «plan Marshal» pour ces quartiers ? Cela est-il dû surtout à l'absence de moyens financiers ?
On ne retarde pas. Ce n'est pas une question de moyens ; il y a un argent considérable. Regardez le plan de réhabilitation de l'immobilier : il est énorme ! Mais c'est une question de volonté, de volonté pratique. On est en train d'y travailler. Autre sujet très important : il y a, en France, un phénomène qu'on appelle le «décrochage»: des jeunes quittent l'appareil scolaire à 16 ans. C'est l'âge limite de l'obligation scolaire. Avant qu'ils ne soient «repris» par les mécanismes de formation professionnelle, etc. – cela démarre à 18 ans – ils sont, pendant deux ans, «dans la nature». Le président va prendre des décisions, pour qu'ils ne sortent pas du champ de l'action et de la formation. Mais bien entendu, on peut toujours dire qu'il faudrait que cela aille encore plus vite !
Vous êtes au pouvoir depuis plus de deux ans. Vous vous apprêtez à entrer dans une nouvelle séquence politique. On aimerait bien comprendre vers quel cheminement vous allez vous orienter en termes de réformes à poursuivre ou à entreprendre ? D'autant qu'avec la donne économique mondiale, la situation est en train
de se crisper socialement...
C'est vrai que nous n'avions pas prévu la crise ; personne, du reste, ne l'avait prévue. Celle-ci a perturbé notre plan de marche. On avait prévu de réduire les déficits budgétaires, mais la crise ne nous permet pas de le faire. Cela étant, la France s'en sort plutôt mieux que d'autres – moins mal, devrais-je dire. Ne nous leurrons pas, la crise n'est pas terminée ! Cependant, elle ne nous empêche, en aucune façon, de continuer à réformer.
L'opinion est loin d'être dans cet état d'esprit...
Ah, non, pas du tout ! L'opinion, on la mesure par les études et les sondages. Il y a les questions de popularité et celles d'adhésion. À la question : «Est-ce que vous avez confiance en Nicolas Sarkozy pour poursuivre les réformes ?» - laquelle en comporte deux, en réalité : «Voulez-vous des réformes ?», et «Voulez-vous que cela soit Nicolas Sarkozy qui les conduise ?», 67% des Français répondent : «Oui». Sur les réformes qui sont engagées, on observe une adhésion supérieure à 60%. Certaines ont besoin d'être un peu acclimatées, comme la taxe carbone. C'est nouveau et les gens ne connaissent pas encore assez le contenu.
Il n'y a pas encore une grande adhésion. Mais on va faire de la pédagogie.
Et, franchement, s'il y a besoin de réformer les collectivités territoriales ou la justice, pourquoi attendre la fin de la crise ?
Copyright : New African, février 2010.
Avec accord du groupe New African.


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