Impossible de circuler au centre ville de la métropole sans se rendre compte, avec parfois assez de désagréments il est vrai, que quelque chose bouge. Pour les Casablançais, c'est le prix à payer pour l'arrivée, en décembre 2012, du futur tramway de Casablanca. Selon les objectifs déclinés par les autorités de la ville, ce projet est l'un des piliers du Plan de déplacement urbain (PDU) qui vise à répondre aux nombreux défis que posent la fulgurante urbanisation que connaît Casablanca, afin de créer un cadre propice pour la mise en œuvre de solutions compétitives en matière de mobilité. Avec ses 4 millions d'habitants, le premier pôle urbain du Maroc concentre en effet 50,9% de l'activité commerciale du pays, 39% des unités productives et 60% de la main d'œuvre industrielle nationale. Un cocktail qui se traduit par l'existence de nombreux pôles générateurs de déplacements, parallèlement à une augmentation significative du parc automobile, au même rythme que celui de l'évolution du mode de vie des populations. Une nouvelle image pour la ville Les travaux se déroulent pour le moment conformément aux délais impartis à la réalisation du projet. Et l'objectif est de maintenir la cadence afin que les travaux soient livrés à temps. En ce sens, «toutes les parties sont à pied d'œuvre», selon Youssef Draiss, directeur de Casa transport en site aménagé. Derrière les palissades qui jonchent les différentes artères composant le circuit du tramway, long de 30 km, près d'un millier d'employés se mobilisent à longueur de journée pour les différents volets des travaux. Le tramway de Casablanca se décompose en deux plateformes pour deux zones différentes. Le marché pour la première zone, qui doit relier les quartiers de Sidi Moumen et Hay Mohammadi, a été attribué à l'entreprise turque Yapi Marzaki. Pour la deuxième tranche, c'est un conglomérat entre une entreprise française, Colas Rail, et une autre marocaine GTR, qui réaliseront la jonction entre Hay Mohammadi et le boulevard Abdoulmoumen. Au stade actuel, le chantier semble bien avancé, surtout sur le Boulevard Abdelmoumen et au niveau de Sidi Moumen. Sur le boulevard Abdelmoumen, les travaux sont déjà au stade de la pose des rails, alors que sur le boulevard Hassan II, les travaux de déviation des réseaux d'assainissement sont toujours en cours. Sur certains tronçons, la pose de la plateforme nécessite préalablement des travaux d'élargissement des voies, de voiries, d'assainissement et même de transplantation des arbres. Même son de cloche au niveau du Centre de maintenance de Sidi Moumen. Le chef de département, Karima Melikh, a indiqué que «le centre qui sera le cerveau névralgique du réseau sera opérationnel d'ici 2012». Un appel d'offres sera prochainement lancé afin de sélectionner l'exploitant international qui se chargera de la formation du personnel local. Respect des délais contractuels Afin d'optimiser le temps, mais également les ressources matérielles et humaines, les travaux se déroulent simultanément sur plusieurs tronçons, ce qui permet également de limiter les perturbations occasionnées aux usagers et aux riverains. Selon les explications de la directrice du projet, Nadia Bouhriz, «le tramway de Casablanca se veut un véritable projet intégré et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il modifiera sensiblement l'image de la ville». Des études architecturales, d'impact et de circulation ont ainsi été menées en amont avant de décider de tous les choix stratégiques à opérer. En aval du projet, on assistera à une réorientation du flux de circulation, notamment au niveau de la place des Nations-Unies, qui prendra l'allure d'un véritable parc aménagé. Même chose au niveau de la gare ONCF de Casa voyageurs, qui se métamorphosera en une véritable plate-forme d'échanges avec les bus. L'idée est de permettre à travers les aménagements nécessaires, la sauvegarde du paysage végétal et de rationaliser par la même occasion, l'utilisation des espaces. C'est pourquoi, les travaux d'aménagement urbain qui seront entrepris par la suite (réfection des trottoirs, remise en état de l'éclairage public, aménagement des paysages,...) seront appuyés par une restructuration du réseau des bus, afin que les deux modes de transport soient complémentaires et non concurrents. Même les commerces et établissements riverains de la plate-forme ne sont pas oubliés. Dans le cadre du plan Rawaj, des actions seront entreprises avec la collaboration des services concernés pour permettre aux commerçants de tirer profit du tramway à travers l'amélioration de leur vitrine. Pour le moment et selon les responsables du chantier, la difficulté majeure du chantier réside dans la gestion de la circulation. Mais la collaboration avec les autorités communales et la police a permis jusque là de contenir les perturbations du trafic. Pour le moment, grâce à une campagne de sensibilisation et de communication touts azimuts, la population semble adhérer au projet. Mais jusqu'à quand, surtout qu'au regard du délai qui reste, 18 mois, un non initié jurerait qu'il faudrait plus qu'un miracle pour pouvoir respecter les délais contractuels. Pourtant, à tous les niveaux des structures engagées dans les travaux, l'optimisme est de mise. Il est vrai qu'au vu de l'état actuel du chantier, qui n'a véritablement commencé qu'il y a cinq mois, le délai paraît raisonnable. En tout cas, les entreprises et le maître d'ouvrage délégué sont avertis. La population est prête à supporter les travaux à la seule condition de respecter l'échéance du 12 décembre 2012. A.Y.B La tramway en chiffres Lancés en octobre 2010, les travaux de réalisation de la première ligne de tramway de Casablanca n'ont véritablement démarré qu'en mars 2009. D'une longueur de 30 km fractionnés en 47 stations, le tramway desservira les principaux quartiers et zones industriels et de services de la ville. Depuis Sidi Moumen, jusqu'à la Corniche Aïn Diab, il circulera, de 5h30 à 22h du lundi au vendredi et jusqu'à 23h le weekend à une vitesse commerciale de 20km/h, ce qui correspond à un peu moins d'une heure pour tout le trajet. 37 rames de 65m de long chacune desserviront le circuit, avec des arrêts toutes les 4 minutes en heure de pointe. Chaque rame a une capacité de 304 places dont 78 assises selon le choix validé par les autorités. Les rames seront habillées de couleur orange et blanche pour ne pas heurter la sensibilité des supporteurs des deux équipes phares de la capitale selon le vœu des autorités communales. Le prix du ticket n'a pas définitivement été arrêté mais devrait se situer, vraisemblablement, autour de 7 DH. Ce qui paraît raisonnable au vu des efforts qui seront consentis pour le confort, la mobilité et surtout la sécurité des usagers. Le tramway de Casablanca, c'est un investissement global de 6,4 milliards de DH, soit 200 millions par km. 1,9 milliard est réservé à l'acquisition du matériel roulant, 500 millions aux études et le suivi des travaux, 400 millions aux travaux de déviation des réseaux, 2,3 milliards pour la plateforme, 1 milliard pour les équipements et 300 millions pour le centre de maintenance. Pour le financement, une convention a été signée en 2008. L'Etat participera à hauteur de 1,2 milliard ; 1,5 milliard sera à la charge des collectivités locales, 840 millions à la charge de la communauté urbaine de Casablanca et 400 millions sur financements du Fonds Hassan II. Le reste étant assuré par plusieurs actionnaires publics et privés (région, préfecture, CDG, ONCF, BCP) et un emprunt garanti par l'Etat et les collectivités (2,4 millions de DH).