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Coupe du monde 2030 : Une logique d'Etat qui bouscule les priorités sociales !
Publié dans Maroc Diplomatique le 15 - 06 - 2025

Faut-il organiser la plus prestigieuse compétition sportive mondiale lorsque des pans entiers de la population réclament un accès digne à l'école publique, à un hôpital fonctionnel ou à une protection sociale décente ? Depuis l'annonce officielle en octobre 2023 de la désignation conjointe du Maroc, de l'Espagne et du Portugal pour accueillir la Coupe du monde 2030, le débat s'est installé dans l'espace public marocain, tergiversant entre fierté nationale et interrogation civique. Derrière les enthousiasmes liés à l'événement planétaire, une partie croissante de la population exprime une inquiétude profonde : et si l'investissement massif requis pour un tel projet se faisait au détriment des urgences sociales ?
L'interrogation n'est ni marginale, ni illégitime. Elle s'inscrit dans un contexte où les inégalités territoriales, les difficultés d'accès aux soins, la précarité scolaire et la pénurie d'emplois dignes demeurent des réalités bien tangibles. Pour une partie de l'opinion publique, le sport, aussi universel et fédérateur soit-il, demeure un luxe tant que les besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits. Ce scepticisme, loin d'être un rejet du projet en soi, révèle une exigence accrue vis-à-vis de l'Etat : que les priorités nationales soient hiérarchisées avec rigueur, en cohérence avec les réalités sociales.
Pourtant, dans une lecture plus large, l'attribution de la Coupe du monde 2030 à un trio transcontinental, avec le Maroc comme hôte africain, ne relève pas uniquement du prestige symbolique. C'est une décision éminemment stratégique. Elle s'inscrit dans une logique de transformation à moyen et long terme, où l'événement devient un levier de structuration de l'espace national, d'accélération des réformes et d'ouverture sur de nouveaux partenariats économiques. Dans une économie de plus en plus globalisée, l'attractivité territoriale repose non seulement sur des régimes fiscaux compétitifs ou des incitations réglementaires, mais aussi sur la qualité des infrastructures, la stabilité institutionnelle et la visibilité géopolitique.
De ce point de vue, la Coupe du monde n'est pas une fin en soi, mais un catalyseur. Le développement des infrastructures aéroportuaires, l'extension du réseau ferroviaire, la modernisation des axes routiers ou encore la montée en gamme de l'hébergement touristique peuvent se muer en investissements à effet multiplicateur. Les retombées de tels chantiers — lorsqu'ils sont bien encadrés — dépassent largement les délais de l'événement. Elles favorisent la mobilité, dynamisent l'activité économique et renforcent l'attractivité des territoires périphériques, en particulier dans le sud et l'est du pays.
Un précédent qui interroge
Les exemples d'autres pays organisateurs invitent cependant à la prudence. Le Brésil, qui avait accueilli la Coupe du monde en 2014, a vu ses protestations sociales s'intensifier dans les mois précédant le tournoi, alors que les dépenses publiques massives dans les stades côtoyaient des hôpitaux à l'abandon. Le Qatar, pour sa part, a su tirer profit de l'événement comme outil d'influence régionale et d'investissement dans son image, mais avec un coût humain et financier colossal.
Le Maroc, quant à lui, ne dispose ni des ressources énergétiques d'un émirat gazier ni de la puissance fiscale d'un grand pays émergent. Son pari doit donc être calibré, méthodique, et profondément ancré dans une logique de développement inclusif.
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Opposer frontalement l'investissement dans la Coupe du monde et les besoins en santé ou en éducation reviendrait à sous-estimer l'interdépendance des deux sphères. Les infrastructures, lorsqu'elles sont pensées dans une logique intégrée, ne sont pas des dépenses de prestige mais des conditions essentielles pour la création de richesse. Et c'est précisément cette richesse qui permet, en retour, de financer l'école, l'hôpital, ou la protection sociale. Sans croissance durable, les ambitions sociales, aussi louables soient-elles, restent des promesses intenables.
À l'inverse, un sous-investissement chronique dans les leviers économiques porte en lui le risque d'un ralentissement prolongé. Moins d'investissements signifie moins d'emplois, moins d'impôts collectés, et donc moins de moyens pour répondre aux besoins sociaux. Le gouvernement est ainsi confronté à une équation délicate : comment concilier rigueur budgétaire, impératif social et ambitions internationales ? La réponse réside probablement dans une gouvernance plus fine des ressources et dans une priorisation claire des projets structurants.
Talents marocains, diaspora et fuite des cerveaux
Le cas des talents marocains, notamment dans la recherche ou l'innovation technologique, illustre les limites d'une approche sectorielle. Si l'école est, selon l'expression consacrée, « le creuset de la créativité », encore faut-il offrir à cette créativité un terreau fertile. L'absence d'infrastructures adaptées, de financements ciblés et de débouchés professionnels pousse nombre de jeunes diplômés à chercher ailleurs les conditions de leur épanouissement.
L'un des enjeux majeurs de la décennie à venir réside dans la capacité du Maroc à retenir ses talents, à mobiliser sa diaspora, et à transformer son système éducatif en un outil de valorisation économique. Cela passe notamment par une revalorisation de la formation professionnelle, longtemps marginalisée, mais qui pourrait jouer un rôle déterminant dans la relance industrielle et le développement des territoires.
Coupe du monde : vitrine culturelle et atout diplomatique
Outre les considérations économiques, la Coupe du monde constitue une vitrine inédite pour la culture, l'histoire et le patrimoine marocain. Dans un monde dominé par les batailles d'influence, le soft power est devenu une arme diplomatique à part entière. Le Maroc, déjà reconnu pour son rayonnement en Afrique francophone et subsaharienne, voit dans cet événement une opportunité de renforcer son positionnement géopolitique, en tant que pont entre les mondes arabe, africain et européen.
Le choix d'une candidature conjointe avec deux puissances ibériques, membres de l'Union européenne, traduit cette volonté de s'inscrire dans une nouvelle diplomatie d'influence, où la coopération sud-nord redevient possible, sur un pied d'égalité. À ce titre, le projet Yalla Vamos 2030 est porteur d'un message politique fort : celui d'un monde multipolaire, capable de dépasser les clivages traditionnels au nom d'un projet collectif.
Sur le plan touristique, les retombées potentielles sont considérables. Le Maroc a su, au fil des ans, capitaliser sur sa diversité géographique, son artisanat d'exception et la chaleur de son accueil. Mais une partie de ses régions — notamment dans le Rif, le sud profond ou l'Oriental — demeure encore à l'écart des flux touristiques internationaux. La mise à niveau des infrastructures, notamment aéroportuaires et hôtelières, prévue dans le cadre de la Coupe du monde, pourrait changer la donne. Si les connexions interrégionales s'améliorent, si l'offre hôtelière se diversifie, alors le Maroc pourrait bâtir un tourisme plus équilibré, moins dépendant de quelques destinations phares, et plus résilient face aux crises.
L'événement ne suffit pas, il faut une vision
Organiser la Coupe du monde ne doit pas être une fin en soi, mais le point de départ d'une politique de développement cohérente et inclusive. Le véritable défi pour le Maroc n'est pas d'accueillir des matchs, mais de transformer chaque infrastructure en levier pour l'avenir. Un stade ne peut être laissé à l'abandon après 2030 ; il doit devenir un outil d'émancipation locale, un espace de formation, de vie, d'emploi. De même, une autoroute construite pour des flux touristiques temporaires doit aussi désenclaver les régions et servir durablement les économies rurales.
Ce modèle intégré, liant le global au local, ne fonctionnera que s'il repose sur la transparence, la participation citoyenne et un engagement clair à ne pas reproduire les erreurs du passé. À défaut, la Coupe du monde risque de se transformer en symbole d'une fracture sociale aggravée. C'est à ce prix que l'événement deviendra un héritage, non une parenthèse.


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