Dirigé par John Kwame Osei Korankye, maître incontesté de la harpe-luth traditionnelle du Ghana, ce moment musical a célébré toute la richesse spirituelle et artistique de l'Afrique de l'Ouest. Un héritage musical vivant Instrument à cordes peu connu du grand public, le seperewa est une harpe-luth originaire du Nord-Sahel et historiquement enracinée dans la culture des peuples akan. Longtemps central dans la vie des villages ghanéens, il a vu son usage décliner au XXe siècle, marginalisé par la montée en puissance de la guitare introduite dans le contexte de la colonisation européenne. Osei Korankye, héritier de cette tradition qu'il a apprise de son grand-père, consacre sa vie à la sauvegarde et à la transmission de cet instrument. Musicien, chercheur et pédagogue, il a été encouragé dès 1996 par le grand ethnomusicologue Kwabena Nketia à enseigner à l'Université du Ghana, devenant ainsi l'un des derniers gardiens de ce patrimoine menacé. Un trio en harmonie Accompagné de Christopher Amootornyor au prempensiwa (lamellophone-cajón) et de Prince Charles Eghan aux percussions (hochets, castagnettes, adenkum – une calebasse –, cloches et flûte), Korankye a offert une performance où la maîtrise technique se mêlait à la ferveur spirituelle. Le trio a su faire vibrer l'âme du public en révélant les multiplesdimensions du seperewa – entre traditions orales, danses rituelles et philosophies akan. La diversité des timbres et la richesse des rythmes ont témoigné d'une Afrique plurielle, lumineuse et en perpétuelle renaissance. Entre tradition et innovation Soucieux de faire évoluer son art sans en trahir l'esprit, Osei Korankye n'hésite pas à innover. Il a notamment enrichi son instrument en y ajoutant plusieurs cordes, portant le seperewa à quatorze cordes pour élargir ses possibilités harmoniques. En alliant fidélité à la tradition et ouverture à la modernité, l'artiste incarne une démarche exemplaire : celle d'un passeur de culture, résolument tourné vers l'avenir tout en restant enraciné dans la mémoire collective de son peuple. Ce concert du Festival de Fès, qui met cette année l'Afrique à l'honneur, a offert une illustration saisissante de la vitalité culturelle du continent. À travers le seperewa, l'Ensemble a célébré la beauté, la diversité et la spiritualité d'un patrimoine vivant, que le public a salué avec émotion.