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Allocution de M. Abbas El Fassi : Allal El Fassi était l'un des grands penseurs et hommes politiques de l'ère contemporaine
Inauguration des manifestations commémorant le centenaire de la naissance du leader Allal El Fassi
Publié dans L'opinion le 15 - 02 - 2010

Son nom reste étroitement lié au Mouvement national en vue de libérer le sol national, de préserver la dignité du citoyen et de parachever l'intégrité territoriale du Maroc
Mesdames, messieurs,
Il m'est agréable, pour commencer, de faire part de mes remerciements et de ma gratitude à Mrs le Président de la Fondation Allal El Fassi et aux membres de son Conseil d'administration pour cette initiative hautement symbolique que nous considérons comme étant réellement un témoignage de fidélité à ce grand pionnier ainsi qu'à sa mémoire et aux principes et idéaux qu'il incarna. Je remercie également les organisateurs de cette commémoration de m'avoir permis de prononcer cette allocution d'ouverture en ma qualité de Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal et de garant de la pérennité de ses principes et idéaux, avec le soutien des membres du Conseil de la présidence, du Comité exécutif et de l'ensemble des militantes et militants au sein des divers organes du parti et de ses organisations parallèles à travers le territoire national.
A cette occasion, nous avons présente à l'esprit la mémoire de Feu SM le Roi Hassan II qui a, depuis le début, entouré cette fondation de sa sollicitude, comme nous adressons nos sentiments de considération et de respect à son héritier, Sa Majesté le Roi Mohhammed VI, que Dieu l'assiste. Les deux Souverains ont décidé de faire participer l'Institution Royale au Conseil d'administration de la Fondation allal El Fassi.
Medames et Messieurs,
Je suis heureux de prendre part à cette manifestation par laquelle nous inaugurons le programme des activités prévues au titre de la commémoration du centenaire de la naissance de ce grand leader qu'était feu Allal El Fassi, dont le nom figure parmi ceux qui ravivent le plus la conscience et la mémoire nationales pour avoir été associé à nombre d'événements historiques inscrits en lettres d'or dans les annales nationales et dans l'histoire de la nation arabo-musulmane.
Une grande endurance et un attachement ferme aux principes
Je ne m'attarderai pas ici sur les divers aspects du combat du regretté leader aux plans tant spirituel et intellectuel que politique et diplomatique, aspects que les honorables intervenants évoqueront plus en profondeur par la suite ; je me contenterai donc de retracer quelques facettes de sa personnalité des points de vue patriotique, scientifique et humanitaire car ce fût un homme qui a aussi bien connu des moments heureux et d'autres plus sombres mais qui, en toutes circonstances, a fait montre d'originalité, de perspicacité, d'endurance, d'attachement ferme aux principes et valeurs et de loyauté envers la patrie, la famille et les amis.
Allal, l'inégalable
Historiens, chercheurs et tous ceux qui s'intéressent à l'Histoire contemporaine du Maroc ou aux hommes qui ont bâti la renaissance intellectuelle et spirituelle du Maroc, sont unanime à considérer Allal El Fassi comme un homme à part et d'une étoffe unique pour avoir été l'un des plus brillants penseurs et un symbole des meneurs de combat auxquels notre pays a donné le jour ainsi que l'un des grands de l'époque moderne. Il a, de fait, marqué de son empreinte l'une des périodes les plus difficiles de l'Histoire de notre pays, par ses prises de positions historiques sans précédent, par sa riche production encyclopédique qui témoigne de la pluralité et de la diversité de ses centres d'intérêt et par la pertinence et la clarté de ses vues dans un monde fluctuant marqué, notamment, par le soulèvement des peuples asservis contre l'occupation étrangère, l'apparition des mouvements de libération nationale à travers le monde et, en particulier en Afrique et en Asie, devenant ainsi l'un des rares pionniers à avoir contribué à façonner les événements du 20è siècle et à leur imprimer une autre trajectoire. Si bien que son nom a été associé à la naissance du Mouvement national en vue de libérer le pays, de défendre la dignité du citoyen à l'intérieur comme à l'étranger, de préserver l'unité nationale et l'intégrité territoriale et de combattre tout ce qui est de nature à altérer nos valeurs civilisationnelles et les fondements de l'humanisme marocain.
Un Alem novateur insatiable
De plus, il était un Alem extrêmement versé dans les disciplines islamiques, un chercheur insatiable et novateur et un penseur ayant grandement contribué à l'essor de divers aspects de la connaissance humaine ainsi qu'un poète et écrivain de haute facture, un orateur hors pair, un journaliste à la plume très fine et un homme de communication qui savait dialoguer et convaincre avec brio des gens de différentes générations, ce qui lui a valu le respect et la considération des élites intellectuelle et politique qui l'ont côtoyé ou ont connaissance de son abondante œuvre. Il a de même formé un grand nombre d'étudiants et d'enseignants et éclairé, par ses conférences et son œuvre des contingents entiers de l'élite intellectuelle à tel point que sa précieuse et abondante œuvre et ses nombreux articles de presse dont regorgent les bibliothèques au Maroc et ailleurs, continuent encore de susciter l'intérêt des chercheurs et que des institutions scientifiques étrangères ne cessent de demander à pouvoir traduire ses écrits dans diverses langues.
Conscience précoce des problèmes des citoyens et des causes nationales et arabo-musulmanes
Quiconque réfléchit et analyse le parcours de ce symbole unique, ne manquera pas d'admirer sa prise de conscience précoce des préoccupations de ses concitoyens et des problèmes de son pays et de la Oumma (arabe et musulmane), ainsi que sa façon d'appréhender les événements, voire de les devancer et d'en anticiper l'évolution, le courage qu'il mettait à exposer ses idées et son appréciation desdits événements à la lumière de la conjoncture présente et de ce que l'intérêt national dictait comme positions et mesures à prendre, sans négliger la situation mondiale autour de lui.
Penser le Maroc d'après l'indépendance
Le combat national et l'effort quotidien en vue de contrecarrer les complots et les manœuvres de l'occupant ne l'empêchèrent cependant pas de réfléchir à ce que serait le Maroc après l'indépendance. C'est ainsi qu'il n'a eu de cesse d'engager ses compagnons d'armes à élaborer le projet de société à laquelle il aspirait et à imaginer ce que pourrait être le Maroc d'après l'indépendance. On peut ainsi lire dans son ouvrage «Les mouvements de libération» écrit en 1948 ce passage: «quoique nous sachions, en gros et dans le détail, ce qui nous reste à faire après l'indépendance, cela ne suffit pas car nous devons expliciter notre pensée et la décliner dans un programme général (et global) ; nous devons, chacun selon sa spécialité, nous pencher sur l'étude des (divers) aspects de l'activité populaire fut-elle politique, administrative, culturelle, financière, économique, sociale ou autre, (bref) de tout ce qui se rapporte à l'organisation de l'Etat et de la société de telle sorte que lorsque l'opportunité d'accéder à l'indépendance se présentera, nous serions fin prêts à mettre en œuvre notre programme et n'aurions pas à perdre davantage de temps à nous y préparer».
C'est ce dont il s'occupera ensuite personnellement, très tôt et de manière magistrale, dès 1951, en rédigeant son ouvrage impérissable «L'autocritique», inspiré du patrimoine islamique et civilisationnel de notre Oumma ainsi que des expériences des autres nations et peuples, anciens et contemporains, mais parfaitement adapté aux spécificités des marocains et à leurs aspirations au progrès et à accompagner l'évolution du monde selon une vision ouverte et tolérante permettant au génie national d'éclore, d'interagir avec l'autre et d'innover en vue de hisser notre peuple toujours plus haut et dans les domaines les plus divers.
«L'autocritique», une œuvre d'avant-garde
«L'autocritique» fut ainsi le premier ouvrage fondateur d'un système intellectuel, politique, économique et social que notre pays ait pu produire à l'époque et qui tout en traçant la voie à suivre au Mouvement national, exposait déjà les contours du futur Etat marocain souverain. C'est en effet une œuvre inédite et inimitable, le champ politique national n'ayant produit depuis que des programmes de partis politiques ou des déclarations gouvernementales ponctuelles et visant simplement à gérer la situation du moment et à transcender ses contraintes le temps d'un mandat (électif) ou d'une législature.
Par contre, «L'autocritique» demeure le fruit d'un effort intellectuel qui abolit les limites du temps et les frontières géographiques, un ouvrage donc en avance sur son époque car une foule d'idées et d'orientations qui y sont exposées demeurent toujours viables et continuent de susciter l'intérêt et la curiosité des penseurs et chercheurs au Maroc et de par le monde à en juger par le nombre de thèses et d'études dont il continue de faire l'objet.
La diversité des sujets abordés dans cet ouvrage illustre, par ailleurs, le génie de son auteur, l'étendue de son champ d'intérêt, sa clairvoyance et la pertinence de sa théorie pour ce qui est des voies et moyens de transcender les séquelles du sous-développement et à se libérer de nombre de concepts éculés pour mieux réaliser les réformes souhaitées, faire évoluer la société et construire le pays.
La souveraineté nationale d'abord
Mesdames et Messieurs,
Le défunt leader était persuadé que la vraie mise à niveau sociale et le développement économique n'étaient concevables que dans le cadre de la souveraineté nationale. Aussi et depuis sa tendre jeunesse était-il avide d'indépendance et de liberté, hostile au colonialisme, soucieux d'attiser la volonté d'émancipation. Pour ce faire, il déploya avec ses compagnons de lutte d'énormes efforts en vue de propager les idéaux de libération parmi ses concitoyens, conscient qu'il était que les divers stratagèmes auxquels l'occupant avait recours pour asseoir et faire durer sa présence nécessitaient des moyens de lutte multiples et variés. Aussi, s'employa-t-il à encadrer et à faire prendre conscience aux citoyens à travers l'action politique, l'enseignement et l'éducation, le théâtre, les associations sportives ou sociales et de proximité, de même qu'il se distingua dans la composition de chants patriotiques qui ravivaient l'enthousiasme et l'engagement des marocains.
Libérer les pays du Maghreb
Ses préoccupations ne se limitaient toutefois pas à sa patrie, son souci majeur étant de libérer tous les pays du Maghreb sans oublier les autres régions encore sous tutelle coloniale française, d'où son initiative tendant à unifier les mouvements de libération contre le joug colonial français, aussi bien en Afrique qu'en Asie, et la création du «Front des travailleurs des pays sous tutelle» étrangère. Il sied ici de citer un passage du rapport qu'il adressa au Comité exécutif du parti (alors dans la clandestinité) depuis Le Caire en date du 29 janvier 1954 et dans lequel il écrivit: «Nous oeuvrons actuellement à étendre la lutte contre le colonialisme français et sommes parvenus à mettre sur pied un mouvement destiné à l'évacuer ; nous avons également convenu avec le président du Parti socialiste républicain (du Vietnam) de créer un Front de lutte contre l'occupation française en Afrique et en Asie dont copie du communiqué commun ci-jointe. Nous avons décidé également de convoquer un congrès des mouvements des pays sous occupation française au cours du printemps prochain et veillerons, même si cela prendra beaucoup de temps, à étendre et généraliser la résistance positive à toutes les colonies françaises afin que la France comprenne bien que son seul salut réside dans l'indépendance du Maroc. Je suis par ailleurs en contact avec une importante élite de jeunes Touaregs, Chenguittis, Sénégalais et Soudanais. Soyons donc à la hauteur de notre mission historique qui est de préparer ces peuples et de les soustraire au joug colonial en leur montrant comment le combattre et en les rendant aptes à le faire».
Il importe de rappeler également sa longue lutte pour le soutien et le triomphe de la juste cause palestinienne qu'il a toujours considéré comme la cause du peuple marocain et de la Nation arabe et islamique. Je souhaite que la commission culturelle de la Fondation consacre une conférence sur la lutte du Zaïm pour le triomphe du droit du peuple palestinien à l'établissement de son Etat sur ses territoires avec Al Qods Achcharif comme capitale.
Militantisme au-delà des frontières nationales
Devant un tel dynamisme et une telle obstination dans la lutte dont l'écho parvint bien au-delà des frontières nationales et des limites du continent africain puisqu'il fut aussi parmi ceux qui jetèrent les bases du Mouvement des non-alignés à Bandoëng en 1954, les autorités coloniales considèrèrent le défunt leader comme l'un des plus dangereux et inquiétants agitateurs à l'intérieur comme à l'extérieur. Ceci compte tenu de sa capacité à faire prendre conscience aux élites des méfaits de la stratégie coloniale sous ses divers aspects et sous ses multiples manifestations. Une strétégie qui avait pour objectif de briser l'unité et la cohésion des peuples et des pays colonisés en exacerbant leurs différences ethniques, linguistiques, religieuses ou idéologiques et en provoquant des conflits sociaux, voire des guerres civiles. L'occupant cherchait ainsi à gommer l'unité de plusieurs peuples ayant pâti de cette occupation et dont les effets sont encore perceptibles de nos jours sous des formes et selon des procédés différents mais qui ont tous en commun de retarder le progrès de nombreux pays africains. C'est ce qui nous impose à nous autres, chacun selon sa position et ses moyens, d'y faire face en nous inspirant de la pensée et de l'action de notre défunt leader, en restant vigilants et en faisant montre d'autant de sens de patriotisme qu'il faut pour réduire, sinon occulter, les retombées de telles manœuvres et ne minimiser fut-ce la moindre de leurs manifestations tout les anticipant, en les gardant constamment présentes à l'esprit et en inventant de nouveaux moyens de lutte contre leurs effets probables sur les individus et la collectivité, principalement sur les jeunes et la communauté des marocains résidant à l'étranger.
Indépendance politique, culturelle et économique
Le regretté leader croyait fermement que l'indépendance véritable ne signifiait pas seulement le départ de l'occupant mais nécessitait aussi la poursuite de l'effort en vue de réaliser l'indépendance politique, l'émancipation culturelle, économique et sociale et la quiétude spirituelle. C'est pourquoi il a pris soin d'alerter les peuples assujettis sur ce qui les guette à travers le colonialisme culturel en écrivant: «l'occupant sait que la force n'est pas éternelle et que la domination des peuples et l'exploitation de leurs richesses ne servent à rien tant que la nation préserve son identité et son essence, car plus les membres d'une communauté sont en mesure de conserver leurs spécificités doctrinales et leurs caractéristiques culturelles, plus la nation (toute entière) se prémunit contre l'anéantissement si longtemps que puisse durer son asservissement».
Souci de jeter les bases de l'édifice démocratique
Mesdames et Messieurs,
Le leader a été réputé pour sa conviction que l'accès de la majeure partie du territoire national à l'indépendance politique n'était qu'un pas important sur la voie de la libération des autres régions du Royaume encore sous tutelle étrangère, ce sur quoi il mit l'accent lors du congrès constitutif de la Jeunesse istiqlalienne à Fès en mars 1956 en appelant à la poursuite du combat pour le parachèvement de l'intégrité territoriale et en créant, à cette fin, le journal «Le Sahara marocain» et la revue «Perspectives sahraouies» dont il assuma la direction jusqu'à sa mort. Parallèlement, il ne ménagea aucun effort dans le combat pour l'édification du Maroc indépendant sur des bases démocratiques comme il n'a cessé d'y appeler tout au long de son parcours de militant et dans ses écrits. Le défunt écrivit à ce sujet: «Si les générations précédentes ont appris aux masses et même à nos intellectuels de ne point se préoccuper de maintes questions intéressant la nation, il est de notre devoir d'attirer l'attention du peuple sur la nécessité de se départir de cette mauvaise habitude et d'œuvrer à susciter (chez lui) le sens politique afin que la Oumma réapprenne à s'occuper de ses affaires et à contrôler l'action de ses gouvernants dans le cadre de la solidarité entre le roi, le gouvernement et le peuple, en vue de préserver l'héritage spirituel et matériel de ce peuple glorieux».
C'est pour quoi il tenait à ce que le pays commence à jeter les bases de la démocratie sitôt l'indépendance recouvrée et fut le premier à appuyer toutes les initiatives officielles prises dans ce sens les considérant, par principe, comme autant d'acquis nous rapprochant de l'objectif escompté. Ceci se traduisit essentiellement par la promulgation du «Pacte royal» par feu SM Mohammed V, du «Dahir des libertés publiques», la mise en place du «Conseil constitutionnel» ou encore la promulgation de la «Loi fondamentale», prélude à la Constitution de 1962 sous le règne de feu SM Hassan II et que le défunt leader soutint fermement pour y avoir décelé un tournant important dans notre Histoire de nature à nous soustraire de l'état de non Constitution d'après l'indépendance et de nous faire entrer dans l'ère de la Monarchie constitutionnelle, tout en insistant sur l'impératif d'améliorer encore davantage et progressivement cet acquis jusqu'à ce que nous atteindions le niveau escompté.
Autant nous nous souvenons des nombreux meetings de soutien qu'il présida pour soutenir le projet de Constitution, nous ne saurions oublier ses positions de rejet de l'état d'exception de 1965 ou son refus des pas en arrière engendrés par les amendements constitutionnels ultérieurs. Même chose pour son opposition aux violations des droits de l'Homme et aux piétinements qu'a connus le processus démocratique que ce soit à travers la falsification des élections ou sous la forme d'atteintes aux libertés individuelles et collectives, ni non plus son combat en faveur de la presse nationale et de la garantie de sa liberté ou sa défense acharnée de la dignité du citoyen face aux exactions de l'autorité.
Ses discours lors des sessions du Conseil national et les rapports doctrinaux aux différents congrès du parti et qu'il tenait à rédiger lui-même étaient, de ce point de vue, de véritables ouvrages de référence abordant le présent, tirant les enseignements du passé et prospectant l'avenir avec clarté et pertinence.
Courage et amour de la patrie
Chaque fois que nous relisons ses discours et rapports tels «L'appel du Caire», «La démocratie et la lutte du peuple marocain pour son instauration», «Combat d'aujourd'hui et de demain», etc. nous demeurons admiratifs pour son courage, son amour de la patrie et ses compatriotes et sa foi en la Monarchie constitutionnelle qu'il considérait comme la clef de voûte de la démocratie dans notre pays. Une démocratie dont le piétinement remonte au début des négociations d'Aix les Bains et aux résultats auxquelles elles donnèrent lieu, résultats qu'il jugeait hâtifs et ayant négligé d'importantes parties de notre pays, ce qui a nécessité (ensuite) leur récupération par étapes sur des décennies entières, sans oublier qu'elles (les négociations) ouvrirent grande la porte à des contradictions et des conflits politiques ayant à leur tour sérieusement perturbé le cours normal de la situation interne. La suite des événements a d'ailleurs prouvé qu'il avait raison de ne pas prendre part à ces négociations et de prôner la poursuite de la lutte afin de ne pas tomber dans leur piège. Il écrivit à ce sujet dans l'une de ses correspondances: «L'élite en général et nos supporteurs au sein du Parti de l'Istiqlal en particulier, n'accordent plus de valeur aux memorandums et protestations ; et si nous délaissons le parrainage de la lutte qui a pris forme par nous et par nos principes, je puis vous affirmer que la déception jettera le peuple dans les bras de quelques opportunistes qui l'exploiteront à leur propre fin», chose qu'il considérait comme ne servant guère l'intérêt général et ne permettra pas de procéder aux réformes nécessaires requises par le projet de société annoncé dans son «Autocritique».
Une théorie sociale globale
Il insista pareillement sur la nécessité de promouvoir et de faire régner l'esprit solidaire parmi les différentes couches de la société et régions du pays, guidé en cela par une vision et une conception globales embrassant tous les aspects et questions qui préoccupent les citoyens à travers l'ensemble du pays en écrivant: «Afin de susciter et de propager un esprit solidaire entre tous les membres et toutes les couches de la nation, il est indispensable de les éduquer et de leur apprendre à mener une réflexion globale incluant tous les sujets et problèmes dont dépend la renaissance de la nation et qui prenne en compte simultanément toutes les parties du pays et toutes les composantes de son peuple… Nous devons œuvrer à ce que toutes les régions du Maroc se développent en même temps et de manière harmonieuse et que leur nouvelle mentalité évolue et s'adapte concomitamment afin que la nation ne compte pas d'éléments d'inégal degré de développement». C'est ce que le Parti de l'Istiqlal a défendu dernièrement devant la Commission consultative sur la régionalisation avancée.
Allal, l'homme de foi
Ces quelques aspects de la personnalité du défunt leader ainsi brossés à grands traits, ces quelques étapes de son combat brièvement rappelées et ces bribes de sa rayonnante pensée politique et sociale soulignées, je voudrais, avant de conclure, vous inviter à mieux approcher, à travers ses correspondances à partir de son exil au Gabon, Allal le croyant et homme de grande foi, le fils respectueux et reconnaissant envers ses géniteurs, le mari fidèle à la compagne de sa vie, le père débordant d'amour et de tendresse pour ses enfants… puis Allal, le lutteur révolté et désireux de briser les boulets qui le retiennent prisonnier et d'échapper aux affres de la déportation et aux sévices que lui font subir ses bourreaux.
M. Abbas El Fassi lut ensuite quelques extraits de lettres d'exil envoyées par le regretté leader à ses proches et qui attestent toutes, commente le S/G du parti, qu'il est demeuré constamment et en toutes circonstances, un homme d'une foi inébranlable, ne se préoccupant guère de ses souffrances personnelles mais toujours soucieux de rendre les autres heureux ou à tout le moins d'atténuer leur douleur. En voici quelques spécimens (Traduction libre- Ndt).
A son père, feu Abdelwahed: «Tu demandes de mes nouvelles (concernant ma santé et ma situation matérielle) ; je préfère, mon seigneur et père, que nous n'y pensions pas trop, car l'homme est tenu de mener sa vie (d'assumer sa destinée) normale quel que soit son rang. Je n'ai trouvé, pour ma part et en toute situation, que des bienfaits divins, d'autant que vous savez bien que je ne suis, naturellement, guère trop porté sur les choses matérielles lesquelles ne valent pas, à mes yeux, une aile de moustique que je ne rechigne pas à prendre si elle est disponible mais dont je ne cours pas après, le cas échéant, sauf bien sûr pour ce qui est de ce dont l'Homme, comme l'animal, ont besoin (pour survivre). C'est là une qualité que les événements que je vis ne font que renforcer et ancrer en moi et une compensation qu'Allah accorde aux éplorés et aux sinistrés en contre partie des délices et des richesses terrestres dont ils ont été privés ; cela veut dire (simplement) que je ne suis pas de ceux qui tournent complètement le dos aux belles choses de la vie lorsqu'elles se présentent ni, non plus de ceux qui les recherchent avec avidité et ne vivent que pour. Ainsi, je peux vivre la conscience tranquille et en paix avec moi-même dans un univers transcendant. C'est vous dire que je suis très heureux ; n'est-ce pas là ce que souhaite quiconque aspire au bonheur ici-bas et dan l'au-delà ? (…)».
Même ton affectueux et débordant de foi en Allah dans cette lettre à sa fidèle épouse, Lalla Zahra: «J'ai préféré t'écrire directement en cette heureuse occasion, celle de l'anniversaire de notre mariage béni qui nous permet, fut-ce en songe seulement, de nous remémorer ces jours heureux que nous avons passés ensemble, enveloppés par l'amour et l'acceptation mutuelle....» Et, un peu plus loin: «Tu m'as fait part, dans ta missive du 21 avril, de ta fidèlité et de ton attachement à moi, ce dont je n'ai jamais douté et il ne me viendra jamais à l'esprit que le contraire puisse se produire. Je me félicite donc (de t'avoir comme épouse) et m'empresse de te rappeler deux choses : 1) prendre soin de l'éducation et de l'enseignement de Layla, car c'est le plus beau cadeau que tu puisses me présenter le jour de nos retrouvaille si Allah le veut et, 2) de traiter convenablement et gentiment ta belle-mère, car tout ce que tu pourrais faire en ce sens équivaudra à ce que je suis tenu de faire moi-même en guise de reconnaissance envers feu mon père».
Dans le même ordre d'idées et pour mieux illustrer son côté humain et sa sollicitude, non seulement pour sa petite famille mais également envers ses amis, ce passage d'une lettre adressée au regretté combattant Haj Ahmed Mékouar: «J'ai reçu ta lettre datée du 13 août dernier dans laquelle tu me fais part de ta joie et de celle de la famille de l'arrivée de ma correspondance après trois années d'attente et me rassurant sur le sort de ma famille après le décès du père ; cela m'a fait plaisir et atténué les sombres pensées qui me hantaient depuis un an au moins. Je te remercie pour ton intérêt et ta générosité dont je ne doute point du reste mais tiens, néanmoins à insister auprès de toi sur l'éducation de la très chère Layla, espérant que tu ne te contentera pas de quelques études coraniques et que tu veilleras à la faire inscrire dans une école bilingue (arabe et français) afin qu'elle puisse franchir les différentes étapes de sa scolarité et acquérir une culture et un savoir utiles et réguliers. Comptant sur toi en cela, je te prie aussi de m'informer périodiquement de son évolution et de te faire mon interprète auprès d'elle de mon tendre amour, de mon attachement et de ma fierté ainsi que de mes salutations à la femme du père, à l'ensemble de la famille et à tous les amis, principalement le frère Abdeljalil dont j'espère que l'état de santé est stable(…) ».
Mesdames et Messieurs
Ce qui précède illustre le grand apport du défunt leader durant une vie particulièrement bien remplie dans les divers domaines de l'activité humaine qu'il s'agisse de lutte et de militantisme, de production scientifique et littéraire ou d'action politique, un apport qui n'a d'égale que ses nombreuses qualités humaines et éthiques, car il était d'une très haute moralité, d'une grande affection pour les siens et ses amis, loyal dans l'heur et le malheur, fidèle à ses principes et constant dans ses convictions, endurant dans les mauvais moments, modeste en ne tirant aucune gloire des ses succès ou des manifestations de considération et d'admiration qu'on lui témoignait de son vivant… et fait qu'il restera à jamais un symbole et un modèle parmi les plus grands et très illustres noms inscrits en lettres d'or dans les annales de notre nation, constamment présent dans l'esprit de tous ceux qui ont un tant soit peu d'estime et de respect pour les nobles valeurs et idéaux pour la consécration desquels il a lutté sa vie durant à la seule fin de sauvegarder la dignité du citoyen et de défendre la souveraineté, la liberté et l'indépendance de la patrie. Il n'est d'ailleurs meilleur hommage que celui dont Allah l'a comblé en le dotant de qualités rarement réunies en une seule et même personne et en faisant en sorte que sa mémoire demeure aussi vivace, outre (bien entendu) l'aveu unanime d'éminentes personnalités nationales et étrangères, de chercheurs, d'étudiants et de simples mais justes gens de l'importance de sa contribution et la détermination des militants du parti dont il est le fondateur à poursuivre son combat et à perpétuer son message.


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