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Les élites, les données et l'illusion des classements : plaidoyer pour une intelligence collective enracinée
Publié dans L'opinion le 30 - 05 - 2025

L'article récemment publié par TelQuel Arabi sur le classement du Maroc dans l'indice EQx 2025 invite à la réflexion. On y lit que les élites marocaines constitueraient un frein au développement, sur la base d'un classement mondial qui se veut objectif. Si ce type d'analyse soulève des interrogations légitimes, il me semble essentiel de proposer une lecture plus nuancée, plus enracinée et résolument constructive.
Le Elite Quality Index (EQx) 2025 est un indice international élaboré par l'Université de Saint-Gall (HSG) en Suisse, en collaboration avec la Fondation pour la création de valeur. Il évalue 151 pays à travers 149 indicateurs répartis en 12 piliers, afin de mesurer dans quelle mesure les élites créent ou extraient de la valeur pour la société. Le rapport complet, intitulé Elite Quality Report 2025: The Sustainable Value Creation of Nations, a été publié en mai 2025 par les chercheurs Tomas Casas et Guido Cozzi de l'Université de Saint-Gall.
Il faut d'ailleurs saluer les efforts soutenus déployés par le Royaume dans tous les domaines. Qu'il s'agisse d'infrastructures, d'énergie, de numérique, d'éducation ou d'industrialisation, les avancées sont visibles et appréciées bien au-delà de nos frontières. Le Maroc s'affirme comme un acteur stratégique dans son environnement régional et continental, en misant sur la stabilité, la modernisation et la transformation progressive de ses institutions. Ces progrès ne sont rendus possibles que grâce à l'engagement des cadres qualifiés – ceux-là mêmes que certains classements désignent comme des « élites » – et à l'action volontariste du gouvernement.
Dans ce contexte dynamique, les critiques généralisées à l'égard des élites doivent être maniées avec prudence. Personnellement, cela fait bien longtemps que j'ai cessé de croire aux classements qui s'appuient sur des données souvent imprécises, désynchronisées, mal contextualisées, voire tout simplement erronées. En informatique, on appelle cela le principe du GIGO : Garbage In, Garbage Out. Autrement dit, si les données d'entrée sont biaisées, les résultats le seront aussi – même si ces derniers prennent l'apparence d'un verdict scientifique.
On nous présente souvent des graphiques élégants, des courbes en cloche censées représenter les performances ou les écarts entre pays, en s'appuyant implicitement sur la loi normale, cette fameuse distribution statistique en forme de cloche. Mais la vie n'est pas une loi normale. Le réel, surtout lorsqu'il touche au social, ne se plie pas à une symétrie abstraite. Le développement humain, les trajectoires collectives, les transformations sociétales sont traversés par des discontinuités, des ruptures, des singularités. Réduire ces complexités à des courbes gaussiennes, c'est souvent confondre modélisation et réalité, voire reproduire inconsciemment des biais structurels.
Seule une approche épistémologique rigoureuse, comme celle proposée par les méthodes constructivistes, permet parfois de dégager des tendances pertinentes. Dans cette perspective, l'analyste fait partie intégrante du contexte analysé ; il n'est pas un observateur extérieur neutre, mais un acteur situé, impliqué, conscient des dynamiques sociales dans lesquelles il s'inscrit. C'est cette posture réflexive qui ouvre la voie à une intelligence collective capable d'interpréter les données au service du sens, et non de la simplification.
Il convient également de rappeler que si certaines de ces institutions de mesure statistique produisent des travaux utiles, d'autres se contentent hélas de publier des classements dont la finalité réelle semble davantage dictée par l'opportunisme économique ou l'appât du gain que par une volonté sincère de contribuer à la connaissance ou au développement. Cela pose la question de l'éthique de la mesure et de la responsabilité des producteurs d'indicateurs.
Dans mon livre « L'intelligence artificielle au Maroc ? Souveraineté, inclusion et transformation systémique », j'insiste justement sur la nécessité de construire une intelligence collective nationale, mobilisant tous les savoirs disponibles, y compris ceux de la diaspora. Ces femmes et ces hommes formés à l'étranger, parfois restés longtemps hors du pays, peuvent contribuer à cette dynamique – à condition de ne pas se contenter d'un retour symbolique ou opportuniste.
Il est d'ailleurs important de souligner que de nombreux talents marocains, revenus de l'étranger, s'investissent aujourd'hui pleinement dans le développement de notre pays, souvent avec discrétion mais efficacité. Toutefois, certaines situations méritent un regard attentif : des établissements d'enseignement supérieur privé – notamment certaines écoles de commerce adossées à des fonds d'investissement étrangers – fonctionnent parfois selon des logiques purement lucratives, au détriment de leur mission éducative. Il serait pertinent que le ministère de l'Enseignement supérieur les accompagne, les évalue, et les encourage à se recentrer sur l'excellence académique, la recherche utile et la formation de cadres citoyens.
Loin de moi l'idée de dénigrer qui que ce soit. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un sursaut collectif. D'une prise de conscience partagée, au-delà des jugements catégoriels. L'élite de demain ne sera pas celle que l'on désigne, mais celle que l'on construit ensemble, dans la rigueur, la responsabilité et le service de l'intérêt général.
Il ne s'agit pas de critiquer pour critiquer, mais de tracer des voies nouvelles. Celles d'une souveraineté intellectuelle, économique et technologique réellement marocaine, inclusive et ancrée dans notre réalité. C'est à cette ambition que j'invite toutes celles et ceux qui croient encore, comme moi, à la force des idées, au pouvoir du savoir et à la vertu de l'engagement.

Dr. Az-Eddine Bennani est ingénieur en informatique, titulaire d'un MBA de Chicago, docteur en sciences économiques de la Sorbonne, et expert en management stratégique, gouvernance digitale et intelligence artificielle. Avec plus de 40 ans d'expérience en France, au Maroc et à l'international, il a été ingénieur système, consultant et manager chez Hewlett-Packard en France, en Europe et au MEA, a été professeur-chercheur à La Sorbonne Universités/UTC et à NEOMA Business School, et est actuellement professeur associé à l'Université Al Akhawayn.


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