Selon l'expérience de l'hôpital universitaire de Genève en Suisse, en matière de prise en charge des enfants victimes de maltraitance, des médecins, des assistantes sociales, des infirmières et une conseillère juridique, regroupés dans le cadre d'une équipe pluridisciplinaire spécialisée dans la détection et l'évaluation des enfants victimes de maltraitance, assurent la sécurité de « l'enfant - patient » et, le cas échéant, d'autres enfants potentiellement victimes, tout en maintenant le lien thérapeutique avec l'enfant et ses parents, et cela, dans le respect du cadre légal. Si en Droit Suisse, la violation du secret professionnel est une infraction pénale passible d'une peine privative de liberté de 3 ans au plus, en 1990, la Suisse a introduit dans son Code pénal une disposition qui permet aux personnes astreintes au secret professionnel de signaler les infractions dont les mineurs sont victimes, et ce, au Tribunal civil, qui est en charge des relations parents/enfants. Certains cantons suisses sont allés plus loin rendant obligatoire le signalement de toute situation de maltraitance aux services sociaux par les professionnels. A Genève, il n'y a pas de législation particulière imposant une telle démarche, l'équipe médico-soignante a donc le choix de signaler ou non une situation au Tribunal, ceci même sans l'accord des représentants légaux de l'enfant. Les professionnels évaluent donc la situation et prennent toutes les mesures permettant de protéger l'enfant (hospitalisation ou autres). Dès qu'il s'agit d'une situation d'une certaine gravité, le groupe de la protection de l'enfance cherche à obtenir l'accord de l'un des représentants légaux. Si les parents s'y opposent, ils sont informés que l'équipe a le droit de saisir le Tribunal, même sans leur accord. Dans ces situations particulièrement difficiles, l'interaction entre le pédiatre et le juriste permet d'élargir la réflexion, avant de prendre la décision de signaler ou non une situation aux autorités judiciaires. Le juriste peut encourager l'équipe à faire une démarche vers un milieu qui lui est peu familier. Certaines situations font également l'objet d'une procédure pénale. La conseillère juridique est alors l'interlocutrice du magistrat en charge de l'instruction. Résultats aux HUG, le GPE est amené à examiner environ 160-180 cas de suspicion de maltraitance ou de maltraitance avérée, par année. Seules 10 à 20 situations par an, nécessitent un signalement au Tribunal, soit parce que l'accord des représentants légaux ne peut pas être obtenu pour faire appel au réseau extérieur, soit parce que les situations sont d'une telle gravité que le recours à des mesures judiciaires semble indispensable. La réflexion vise à trouver la meilleure solution possible dans l'intérêt des enfants, tout en veillant à la cohérence de la position de l'hôpital face aux autorités judiciaires, tant civiles que pénales. Selon cette expérience suisse, dans la prise en charge intra-hospitalière d'enfants victimes de maltraitance, la collaboration entre le juriste et le pédiatre s'est révélée fructueuse de part et d'autre, du fait de l'élargissement de la réflexion et de l'accès pour le médecin à une meilleure compréhension du milieu judiciaire, impliqué dans ce type de situations.