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Entretien avec Mostafa Ammadi, chercheur en manuscrits andalous
Marrakech et Fès furent des centres prospères de l'industrie du papier et des manuscrits
Publié dans L'opinion le 04 - 06 - 2011

Mostafa Ammadi est membre de l´URMA (Unité de Recherche sur les Manuscrits Andalous) organisatrice du colloque « Manuscrits, papier, technique et dimension culturelle ». Cette unité de recherche a pour mission, depuis sa création au sein de la Fac des lettres Aïn Chok, de planifier, préparer et mettre en œuvre les programmes qui permettent la conservation, l´édition, la restauration et l´étude des manuscrits andalous. Dans l'entretien suivant, Mostafa Ammadi nous donne un aperçu sur l'Histoire des ateliers de fabrication de papier qui ont existé au Maroc jusqu'au XXème siècle.
-Vous organisez un colloque sur le papier, techniques de fabrication à travers l'Histoire et la sauvegarde des manuscrits. Quelle est d'abord l'Histoire de la fabrication du papier ?
-Toute cette Histoire vient d'Extrême Orient. La technique de fabrication du papier a été en effet prise par les Arabes chez les Chinois au cours des conquêtes musulmanes. Cela remonte donc à l'époque où les conquérants musulmans, dirigés par Ibn Qutayba, avaient envahi la ville de Al Sayt qui avait été l'une des plus importantes zones commerciales de Samarkand sous domination de l'empire chinois. Cinquante ans après cet événement historique, Saleh Ibn Ziyad introduit la nouvelle technique de fabrication de papier dans la ville de Bagdad, où fut inaugurée une nouvelle industrie prospère.
La fabrication du papier et son essor dans le monde arabe ont été rendus possibles, comme l'Histoire nous l'indique, par le besoin urgent d'un nouveau support pour la transmission du savoir, plus facilement accessible du point de vue de manutention et de stockage. Ces avantages incontestables de l'industrie du papier importée de Chine représentent une avancée majeure par rapport à d'autres médias traditionnels, à l'époque encore répandus, mais devenus obsolètes comme les pierres plates et les parchemins.
Par la suite, l'amélioration ultérieure des techniques de fabrication du papier par les Arabes a permis l'éclosion d'une grande activité économique et culturelle, qui s'est propagée d'Est en Ouest au rythme du développement du savoir et des bibliothèques. Les villes qui ont prospéré dans l'industrie du papier ont également été les plus importants centres de la culture contemporaine de l'époque, comme ce fut le cas en Occident musulman, à Marrakech et Fès au Maroc, et Valence en Espagne à l'époque de l'Andalus.
En ce qui concerne l'industrie du papier arabe, Ibn Sahl de Séville (Abu Ishaq Ibrahim Ibn Sahl al-al-Ishbili Isra'ili) (1212-1251) fut l'un des grands poètes andalous du XIIIème siècle qui cite, dans ses écrits, la ville de Cordoue comme étant l'une des villes les plus importantes pour le développement de cette technologie, car il y régnait un véritable engouement pour les livres et le papier. Cette même idée a été confirmée par d'autres auteurs tels que Al Maqsidi.
On note le particulier développement, par la suite, surtout en Andalus, en Espagne, dans les villes du Nord, Valence et Xatiba. A propos de cette petite ville, il y a un ensemble de personnes qui s'appellent Chatibi et ne savent pas que cela provient du mot arabe « chatb » plante qui servait de matière première pour la fabrication du papier.
-Quelle Histoire de la pérennité de cette tradition de fabrication du papier au Maroc dans la mémoire collective?
-Cet artisanat s'est poursuivi à Fès et s'est déplacé à Sebta. Dans la ville de Sebta, il y a encore aujourd'hui des rues qui portent des noms évocateurs comme la rue «Papeleros», ce qui veut dire « fabricant de papier ». A Fès, il y a pas mal de familles qui portent des noms qui rappellent ce grand artisanat comme les familles au nom de Kaghate. En Espagne, un ensemble de familles s'appellent Molinéros en évocation du moulin qui faisait fonctionner, grâce à l'énergie du courant d'eau, la machine à fabriquer le papier.
-Quel est l'objectif du colloque « Manuscrits, papier, technique et dimension culturelle » ?
-Tout simplement mettre en évidence l'importance de ce patrimoine et étudier un thème que la recherche scientifique n'étudie plus. Surtout que l'année dernière et cette année en Espagne on a organisé deux congrès sur l'Histoire du papier. Tandis qu'au Maroc, nous avons un certain nombre de bibliothèques publiques comme la Qaraouiyyine ou Ben Youssef de Marrakech qui comportent un certain nombre de manuscrits qui se détériorent comme si on ne connaît pas la composition de leur papier.
Le colloque ne fait pas intervenir uniquement les historiens mais aussi des experts qui étudient les composants du papier pour savoir pour quelle méthode opter pour la conservation, ou est-ce que les manuscrits doivent être entreposés, dans quelle température pour éviter leur dégradation et leur perte. Quatre spécialistes espagnols invités viennent de l'institut de Valence pour la restauration du vieux papier de fabrication artisanale.
Des participants du Maroc, d'Espagne, des Etats-Unis seront présents pour des échanges d'expériences et d'informations sur le papier, son Histoire, sa technique de fabrication traditionnelle, ses composants et sa conservation en vue de la sauvegarde du patrimoine manuscrit. Quand on parle du papier on parle aussi de l'encre, de la calligraphie et des hommes qui étaient derrière comme les fabricants des feuilles de papiers, les calligraphes, les scribes, les enlumineurs, les relieurs, etc.
-Mais qu'en est-il au juste de l'Histoire de la fabrication du papier au Maroc ?
-Pour le Maroc, on sait que l'artisanat du papier s'est imposé comme activité à l'époque des Mérinides. A cette époque, il y avait environ une centaine d'ateliers de fabrication du papier. Après les Mérinides, on a pu estimer la présence des ateliers de fabrication du papier à plus quatre cents ateliers. Bien avant les Mérinides, le voyage du papier entre Al Andalous et le Maroc est constant dans les archives. La preuve en est qu´on trouve dans les deux rives de la Méditerranée des manuscrits faits avec le papier fabriqué dans les deux zones. A Marrakech, on a encore un Coran fait avec le papier de Xátiva, une ville située à proximité de Valence.
-Mais au niveau des travaux de recherche sur l'Histoire de cette importante activité artisanale, on note la rareté des documents.
-Il ne fait pas de doute que ce pan d'Histoire en plein de l'opération de transmission du savoir est resté peu étudié. Toutefois, le grand savant marocain Mohamed El Mnouni est auteur d'un précieux et incontournable travail intitulé « Histoire de la papeterie marocaine ». Il se réfère à deux publications majeures d'experts marocains dans ce domaine. Le premier est « Sina'at tafsir Al-Kutub Wa Hallu Addahab » de Assufiani Mohamed Ahmed Ben, et la seconde est l'oeuvre de Ahmed Ben Mohammed Arrifai « Urjuzat Li- ali Assmat » et son explication intitulée Hilyat al Kitab.
Une autre référence importante sur le papier a trait aux scribes qui ont copié le travail sur commande, y compris le copiste célèbre originaire de Xativa qui s'était installé à Fès et dont le nom est Ben Abd Malek Abd El Aziz Ben Al Walid Allajmi Achatibi (le Játiva) scribe dont le travail a été caractérisé par l'excellence de la calligraphie et la qualité du papier utilisé. La trace d'un tel travail dans la ville de Fès est visible dans le livre Al-Istidkar, son auteur est Ibn ‘Abd al-Barr Al Kurtobi, ouvrage manuscrit conservé à la bibliothèque Al Qarawiyyine.
L'industrie du papier en plein essor a prospéré dans des villes comme Fès au Maroc grâce à la géographie unique de la ville, car cette activité dépendait de l'énergie hydraulique et les rivières en mouvement dans la ville actionnaient donc les moulins à eau. Ainsi, dans la ville de Fès et autour de la rivière qui traverse la médina, ont été installés des ateliers de fabrication de papier. Ils ont continué leur activité, du moins pour certains, jusqu'au XXème siècle.
L'industrie du papier à Fès a connu son heure de gloire pendant des siècles au même titre que d'autres activités artisanales telles que la tannerie, la poterie et céramique et autres activités d'artisanat. Les fabriques de papier ont accompagné la vie intellectuelle et spirituelle des villes de Fès, Marrakech, Sebta qui furent des centres de rayonnement scientifique mondialement célèbres en Occident musulman.
-A quelle date l'artisanat de la fabrication traditionnelle du papier a disparu au Maroc ?
-Cet artisanat s'est maintenu jusqu'à il y a quelques années. Cela fait une dizaine ou une quinzaine d'années, il y a avait encore un artisan à Fès fabricant de papier de manière artisanale qui s'activait du côté du Rcif. M. Laghzioui, conservateur de la bibliothèque de la Qaraouiyyine, m'avait parlé de lui. Nous avons cherché à le contacter mais en vain. C'était apparemment le dernier survivant de cette confrérie des artisans fabricants du papier qui se sont perpétués jusqu'à la fin du 20ème siècle. Il était d'origine morisque. C'était un métier hérité de ses ancêtres. Sachant que parmi les Morisques venus au Maroc chassés par l'Espagne catholique, il y avait des faire copie sur des manuscrits de grande valeur.
-Pourquoi l'artisanat du papier s'est-il développé particulièrement au Maroc alors qu'on aurait pu rester des importateurs ?
-C'est justement pour ne pas importer du papier, car il fallait choisir le meilleur papier pour transcrire dessus les sourates du Coran, on ne pouvait pas écrire le texte sacré sur du papier sans en connaître les composants parce que dans les pays européens, les fabricants de papier pouvaient y inclure des composants inadmissibles pour l'Islam comme la graisse de porc par exemple. Les musulmans ont essayé d'améliorer la qualité, de développer la technique tout en veillant à ce que les composants du papier restent halal. La fabrication locale du papier au Maroc répond à des Fatwas qui disaient que le papier doit être fabriqué au Maroc pour s´assurer des composants Halal.


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