Le 30 avril, à la veille de la Fête du Travail, qui commémore les acquis sociaux obtenus grâce aux luttes pour la journée de huit heures, le gouvernement a présenté le bilan de la session d'avril du dialogue social. Aucune annonce sur les salaires n'a été faite, seuls des ajustements déjà programmés, comme la hausse du Smig ou la revalorisation des salaires dans la fonction publique, ont été confirmés. Une gestion prudente qui illustre le décalage entre les attentes des travailleurs et les marges de manœuvre de l'Etat marocain. L'attitude circonspecte du gouvernement intervient dans un contexte marqué par une pression sociale grandissante. Les syndicats, bien que engagés dans le dialogue, expriment leur frustration face à l'absence de réponses concrètes aux revendications liées au pouvoir d'achat, à la hausse générale des salaires et à l'amélioration des conditions de travail. Du côté de l'exécutif, on insiste sur les contraintes budgétaires et sur les engagements financiers lourds qui limitent toute marge pour de nouvelles concessions. La tension entre attentes sociales et réalités économiques pose la question de la capacité du gouvernement à préserver la paix sociale sans creuser davantage le déficit public. Car si les ajustements salariaux programmés peuvent être perçus comme des avancées, ils restent insuffisants face à l'inflation et à la détérioration du pouvoir d'achat. Le gouvernement semble miser sur une stratégie d'équilibre, avançant à petits pas pour éviter de fragiliser davantage les finances de l'Etat, tout en espérant contenir les frustrations. Lire aussi : Hausse de 20% du salaire minimum dans le secteur privé Dans ce cadre, le gouvernement a annoncé, lors de la session d'avril, le versement de la deuxième tranche de l'augmentation générale des salaires dans la fonction publique en juillet 2025, soit 500 dirhams nets par mois, s'ajoutant aux 500 dirhams déjà octroyés en 2024. Dans le secteur privé, pilier essentiel du développement économique national, le salaire minimum (SMIG et SMAG) fera l'objet d'une hausse supplémentaire de 5 %, prévue respectivement pour janvier et avril 2026, avec pour objectif l'unification progressive des seuils salariaux à l'horizon 2028. À l'issue de cette session, l'Union marocaine du travail a affirmé, dans un communiqué de presse, que la flambée des prix a largement annulé les effets des précédentes augmentations salariales. Le syndicat estime qu'il est désormais nécessaire de prendre des mesures substantielles pour préserver le pouvoir d'achat des travailleurs face à la vie chère. Budget 2025 : priorité aux réformes, marge de manœuvre limitée Le nouveau cadre budgétaire pour 2025 s'inscrit dans une logique de réduction progressive du déficit public, avec un objectif de 3,5 % contre 4 % en 2024. Pour atteindre cet équilibre, le projet de loi de Finances prévoit une meilleure maîtrise des dépenses publiques, en les programmant selon les priorités nationales, tout en renforçant les ressources de l'Etat. Les recettes fiscales devraient représenter environ 19,5 % du PIB, soit 320,1 milliards de dirhams, dont 139,3 milliards d'impôts directs. Ce cadrage financier, orienté vers la rigueur, laisse peu de place à de nouvelles marges budgétaires. Les recettes prévues pour 2025 incluent 22,6 milliards de dirhams provenant des établissements publics, 35 milliards issus de mécanismes de financement innovants, ainsi que 6 milliards générés par la cession de participations de l'Etat. Côté dépenses, celles-ci devraient atteindre 453,3 milliards de dirhams, soit 27,6 % du PIB. Cette hausse est liée à la poursuite de chantiers majeurs tels que la généralisation de la protection sociale, les réformes de la santé et de l'éducation, l'aide directe au logement, et les engagements issus du dialogue social, en ligne avec les Orientations Royales et le Nouveau modèle de développement. Selon le rapport économique et financier accompagnant le projet de Loi de Finances (PLF) 2025, les dépenses ordinaires atteindraient 353,9 milliards de dirhams, dont 294,2 milliards pour les biens et services. La masse salariale, en hausse de 0,5 point du PIB, passerait à 180,3 milliards de dirhams, en raison notamment de la création de postes, des avancements et des accords conclus dans le cadre du dialogue social. À cela s'ajoutent 113,9 milliards pour les autres dépenses, en particulier dans les secteurs sociaux, et une charge de la dette estimée à 42,6 milliards de dirhams, en augmentation, tout comme celle de la compensation qui devrait s'élever à 17,1 milliards. Cela montre que les hausses de salaires prévues pour 2025 suivent une logique de continuité et de gestion rigoureuse des finances publiques, sans nouvelles augmentations importantes. L'augmentation de la masse salariale concerne surtout des engagements déjà pris, comme les promotions et les ajustements prévus dans le cadre du dialogue social. À cet égard, il apparaît clairement que le gouvernement privilégie les réformes sociales majeures, telles que la protection sociale, la santé, l'éducation et l'aide au logement, tout en gérant une dette croissante. Cela reflète un souci de maintenir l'équilibre financier, limitant ainsi la possibilité de nouvelles hausses salariales au-delà de ce qui a déjà été décidé.