FEMMES DU FOOT À moins de faire partie de la toute nouvelle sélection nationale féminine, le football ne nous emballe pas des masses (pardon Nawal). Ce n'est pas faute d'avoir essayé. Mais, désolées, nous ne trouvons pas que 22 bonhommes qui sautillent sur le gazon soient plus attrayants que les soldes. Mais ne vous inquiétez pas. Bien que pour d'autres raisons que vous, nous attendons avec autant d'impatience les grandes rencontres. Car, nous avons rarement l'occasion e faire ce que nous voulons. De vous comme de nous-mêmes. Profitons-en. Rien à faire. Nous n'aimons pas le foot. À la limite, nous préférons le tennis. Vous conviendrez avec nous que là au moins, ça ne fait pas désordre. Deux joueurs qui restent bien à leur place et qui font attention à marquer des buts par dizaines. Des joueurs qui se serrent la main et qui ne s'envoient pas des torgnoles à la fin du match. Pas des fous furieux qui font d'incessants allers-retours en bavant pour pas grand-chose. L'arbitre non plus ne court pas dans tous les sens mais reste perché sur sa chaise. Il peut difficilement commettre des erreurs, là où il est. Celui du foot est peut-être habillé comme un corbeau mais il n'en a pas l'acuité visuelle. Alors, il court, il court, en sanctionnant à qui mieux mieux. Parce que sincèrement, qui peut me dire ce qui se passe 120 mètres plus loin ? Surtout quand il s'agit de dire si c'est le joueur en marron foncé qui a donné un coup de pied au joueur en marron clair, alors que 6 personnes sont autour, qu'il pleut des cordes et qu'il fait presque noir. Pas étonnant qu'on leur démolisse souvent le portrait. À ma connaissance, peu d'arbitres de tennis se sont pris une raquette à travers la tronche. Ne parlons pas du goal. Qui s'ennuie tellement entre les tirs qu'il ne voit rien arriver. Ce qui fait hurler les supporters qui nous utilisent comme puching-ball quand nous sommes à côté. C'est peut-être notre faute à nous s'il a forcé sur la harira hier ou s'il a trop tiré sur le pétard tout à l'heure ? En un mot et pas en mille, le foot, c'est la foire. Nous ne comprenons pas qui fait quoi. Encore moins pourquoi. Déjà, nous souffrons le martyr pour pouvoir suivre des yeux le numéro 5 au milieu de 22 joueurs sur un terrain grand comme un quartier ! Nous, à la longue, nous lassons des passes et des buts ratés. Tiens, celui-là par exemple, qui ne lâche pas la balle. Nous, nous aurions tiré sans hésiter un bon coup sur sa queue de cheval d'un blond douteux. Voilà qui aurait stoppé net sa "dssara". Et si l'arbitre siffle à 2 cm de notre tympan pour cette broutille, nous, nous lui faisons le souk de sa vie. Alors supporter tout ça pendant 90 mn, non merci. D'autres choses nous attendent. Surtout les bonnes affaires. Mesdames, préparez-vous. Deux grandes rencontres footbalistiques vont rendre vos maris plus généreux. Surtout que le Maroc va participer et à la coupe d'Afrique des nations en février et au Mondial 98 en juin. Quand vous faites le cumul du nombre de matchs pendant un mois pour chaque événement, vous obtenez 96 matchs de presque une heure. Petit calcul. Si vous ne prenez que 100 dh pour chaque rencontre, vous aurez au bout du compte 9 600 dh. Presque un million de centimes. D'après ma voisine, experte en la matière, un mordu du foot n'hésite pas à monnayer sa tranquillité. Il nous enverrait même visiter la lune -pourvu qu'on revienne après le match et que nous n'ayons pas oublié de faire à dîner. Et pas de problème si c'est une omelette au lieu d'un couscous. &laqno; En temps normal, rien n'échappe à mon mari. Pas même le clou derrière la porte des WC. J'attends la Coupe d'Afrique des Nations pour me teindre en rousse et changer les rideaux du salon », confie la voisine diplomate. D'après elle, il ne verra rien jusqu'à la fin de la coupe. Après, c'est une autre histoire s'il ne reconnaît ni sa femme ni son salon. En attendant, ce qu'elle a bien saisi, c'est que demander à son mari et à quel moment. Alors, elle qui n'a jamais rien compris au foot est incollable sur les grandes rencontres à venir. &laqno; Heureusement que le Maroc participe au Mondial en février. Je vais en profiter pour demander un nouveau frigidaire et je suis sûre qu'on aura une nouvelle télé », calcule-t-elle. Une demande qu'elle prendra soin de formuler avant le match. Nous ne sait jamais. Quand à nous autres, c'est une autre histoire. Question de partager le pire, nous avions d'abord essayé de nous intéresser au foot. Mais même de faire semblant, c'est trop nous demander. Quand nous avions tenté de rivaliser avec la télévision ? une vraie catastrophe. Pourtant, nous avions tout essayé. Quand nous avions exécuté une danse du ventre digne d'un film égyptien des années trente, à défaut de lui, c'est sa babouche qui s'est jetée sur nous. Sans rater l'oreille droite. Quant à la tentative de pendaison au loquet de la porte du salon, nous y serions restées qu'il n'aurait rien remarqué. Alors qu'en temps normal il nous aurait trucidées, il n'a même pas cillé quand nous avions traité sa famille de tous les noms. Il n'y a que lorsque nous avions menacé de déserter le foyer conjugal qu'il nous a regardées. Avec l'air de nous dire "pourvu que tu le fasses". Et c'est là qu'il fallait faire preuve d'intelligence. Au lieu de sortir ce jour-là sans un sou en poche, nous aurions dû négocier, paraît-il. Parce qu'il faut le savoir. Un mordu du foot est prêt à tout pour ne pas quitter son fauteuil. Prenez l'épicier du coin. Les jours de grands matchs, il ne quitte pas son comptoir parce que sa petite télé est planquée derrière. Les gamins chapardent autant de bonbons qu'ils veulent. Il accepte de faire crédit. Pourtant, en temps ordinaire, il est radin comme personne. Donc tous les espoirs sont permis. Alors, un autre caftan ? Un miroir ? Ce qui est sûr, c'est que nous aurons au moins la paix. Vive le foot !