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Histoire : Sayyida al-Horra, la corsaire de Tétouan qui affronta l'armée ibérique
Publié dans Yabiladi le 20 - 02 - 2019

Au XVe siècle, une femme riche de son courage, de son savoir, de son intelligence et de l'aura de sa famille andalouse écrivit l'histoire de Tétouan au féminin. Première gouvernante de la ville, Sayyida al-Horra fut une pirate coriace crainte par les armées européennes les plus tenaces.
Fille du prince Ali ibn Rachid Alami qui vécut à Grenade, descendant des Idrissides (789 – 985), celle que tous appelèrent Sayyida al-Horra – ou encore La Honesta – se construisit une réputation de femme courageuse, pugnace, qui ne reculait face à aucun danger. Ainsi gouverna-t-elle d'une main de fer Tétouan, bastion de sa région natale qu'elle défendit bec et ongle contre les incursions européennes. Ce chemin était tout naturellement tracé devant cette princesse, qui était prédisposée à devenir une dirigeante influente de son temps.
Celle qui fut élevée dans le faste et la noblesse de la cour était initiée très tôt à la gestion du pouvoir, dans une région politiquement mouvementée, comme le rappela la chercheuse Osire Glacier. Dans son ouvrage «Femmes politiques au Maroc d'hier à aujourd'hui – la résistance et le pouvoir au féminin», l'auteure expliqua en effet que ce contexte contribua grandement à l'évolution personnelle et intellectuelle d'al-Horra. Issue de la famille des rois nasrides (1237 – 1492) d'al-Andalus, chassés au lendemain de la chute de Grenade, elle vit le jour à Chefchaouen en 1493.
Ce fut le moment où les Ottomans (1299 – 1923) traçaient leurs frontières avec l'Oriental marocain. De l'autre côté, les armées ibériques menaient des offensives sur les côtes méditerranéenne et atlantique et réussirent celles contre Ceuta (1415) et Melilla (1497). Par ailleurs, les Mérinides (1248 – 1465) cédèrent à leurs successeurs, les Wattassides (1472 – 1554), qui ne réussirent cependant pas à unifier le pays.
Une élève qui fit ses premières armes à Chefchaouen
Cette situation politique instable donna lieu à des principautés éparses, dont naquirent notamment les Saâdiens (1509 – 1660). Dans un tel contexte, la femme forte du nord-est marocain grandit au milieu d'une région vacillante, dans la cité érigée par son aïeux qui en fut le premier gouverneur. A l'origine, Ali ibn Rachid Alami avait bâti Chefchaouen en 1471. Il avait idée de l'offrir à son épouse, Zahra Fernandez, la mère de la princesse andalouse, qui était une Castillane convertie à l'islam. La famille s'y établit tandis que la principauté de Grenade s'essoufflait, et l'éducation d'al-Horra fut assidument surveillée.
A dix ans, son intelligence avait déjà attiré l'attention de Cheikh al-Islam, plus haute autorité religieuse, qui s'occupait de son instruction. «Cette enfant sera une femme au grand aura», prédisait le dignitaire en la bénissant, selon un récit de l'historien Mohamed Ben Azzouz Hakim dans «Sida al-Horra, exceptionnelle souveraine», un écrit paru dans l'ouvrage collectif «Mémorial du Maroc», dirigé en 1982 par Larbi Essakali.
Cette bénédiction guida Sayyida al-Horra tout au long de son évolution. Par le fait qu'elle baigna dans une grande diversité culturelle, elle maîtrisa rapidement l'arabe et l'espagnol. Elle fut enseignée par des éducateurs de renom, puis initiée à la gouvernance dès ses 18 ans. En 1510, elle épousa Mohamed al-Mandari II, sultan de Tétouan, ce qui lui permit de participer activement à la gestion de la vie publique, en plus de mener des opérations sans merci contre les armées portugaise et espagnole. En effet, l'époux d'al-Horra lui transmit cette ténacité guerrière qu'il hérita de son oncle nasride Abou al-Hassan Ali al-Mandari de Grenade (1464 – 1484), connu pour ses combats sanglants contre les Castillans.
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Une femme pour saper l'armée ibérique
Au lendemain de la chute de Grenade (1492), Ali al-Mandari s'installa près de Tétouan. Il légua à son neveu cette rancœur indélébile de quitter Grenade à l'apogée de la Reconquista (1212 – 1492). Ainsi, Mohamed al-Mandari II comptait beaucoup sur Sayyida al-Horra, qui garda en elle également la hargne de la chute d'al-Andalus. Leur projet était donc de faire de Tétouan une véritable ville-Etat, impénétrable par leurs ennemis historiques et même redoutable.
Vers 1512, al-Horra se chargea ainsi de l'administration militaire du règne de son époux. Elle fut sans pitié à l'égard des hommes d'Afonso De Noronha, gouvernant portugais de Ceuta, qui se plaignait de ces usages de la force. Sayyida al-Horra confirma ainsi sa qualité de femme redoutable après le décès de Mohamed al-Mandari II en 1518, lorsqu'elle accéda au plein pouvoir attribué par son mari. Elle fut ainsi appelé «la Dame de fer du monde arabo-musulman», selon Osire Glacier.
Une fois gouvernante de Tétouan, elle renforça les activités de piraterie maritime dans la région pour continuer à inquiéter l'armée ibérique. Au cœur du port de Tétouan, elle mit en place une unité industrielle pour bâtir et réparer les navires de guerre. La flotte tétouanaise devint imposante en peu de temps et les marins reçurent l'ordre d'avancer le plus loin possible en Méditerranée, pour faire front depuis la haute mer. Ils s'emparèrent aussi des cargaisons espagnoles et portugaises, tout en faisant des otages qui furent échangés contre des rançons. Ces activités eurent rapidement leurs retombées économiques sur la ville-Etat, qui devint ainsi l'une des régions les plus riches du pays.
Dans sa détermination à en finir avec la puissance ibérique, Sayyida al-Horra se rallia aux corsaires ottomans, rappela encore l'ouvrage d'Osire Glacier. Kheir ad-Din, appelé communément Barberousse, qui était le fondateur du royaume d'Alger (1515) lui fut d'un grand soutien. Al-Horra fut même surnommée «Barberoussa Tetouania» par les Espagnols, qui subirent des expéditions punitives encore plus violentes avec l'alliance des flibustiers marocains et algériens sur la Méditerranée. La cheffe des pirates poussa même les Ibères à conclure des accords qui permirent d'enrichir davantage Tétouan. Pour sa part, Barberousse mourut pendant une bataille à Tlemcen, constituant un symbole de courage et de lutte.
Une alliance qui précipita la chute
Pour pérenniser l'économie de sa forteresse, Sayyida al-Horra dût passer un compromis avec les Wattassides, au risque de se faire envahir. Osire Glacier rapporta que dans l'idée de les rallier, la corsaire épousa en 1541 le sultan Moulay Ahmed al-Wattassi (1526 – 1549). La chercheuse rappela cette histoire : «Pour la première fois dans l'histoire politique marocaine, la cérémonie d'un mariage royal eut lieu à Tétouan et non dans la capitale, Fès. De plus, la mariée résida toujours à Tétouan et y exerça le pouvoir.»
Le sultan s'y accommoda, cherchant à freiner l'expansion saâdienne au sud du Maroc. Al-Horra continua à exercer ses pouvoirs dans l'ouest du Rif, sous la marque politique wattasside. Mais en 1542, elle fut destituée dans des circonstances floues. Sa déposition aurait été l'œuvre de son beau-fils. Certains écrits avancèrent qu'il s'agissait d'un coup impliquant son frère. Pour sa part, Osire Glacier releva que depuis le mariage de Sayyida al-Horra, «les uns la considérèrent comme une représentante du pouvoir central, tandis que les autres n'acceptèrent jamais d'être gouvernés par une femme».
Cette union était pour le moins un mal nécessaire, étant donné que Sayyida al-Horra fut encerclée entre l'armée ibérique, les Ottomans (1299 – 1923) qui manifestaient des visées expansionnistes malgré les alliances, ainsi que les Wattassides à l'intérieur du pays. En lutte contre les Mérinides (1248 – 1465), ses alliés politiques affrontèrent la montée des Saâdiens (1509 – 1660), qui finirent par unifier le Maroc. Sayyida al-Horra, elle, se retrancha à Chefchaouen et y mourut en 1562. Dans la zaouïa Raïssouniya, sa tombe resta une destination de pèlerinage très prisée par les femmes.


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