L'ancien président Hosni Moubarak n'a pas ordonné à l'armée de tirer sur les manifestants pendant le soulèvement populaire qui a abouti à son renversement le 11 février dernier, a déclaré dimanche le chef des autorités militaires égyptiennes, le maréchal Mohammed Hussein Tantaoui. Tantaoui, qui fut ministre de la Défense de Moubarak pendant vingt ans, a témoigné le 24 septembre lors du procès à huis clos de Moubarak, poursuivi notamment pour la mort de 850 manifestants pendant la “révolution du Nil”. “Personne ne nous a demandé de tirer sur la population et nous ne tirerons jamais”, a déclaré le chef du Conseil suprême des forces armées (CSFA) lors de l'inauguration d'une usine dans la province de Fayyoum. Ces propos, cités par l'agence officielle Mena, donnent pour la première fois une idée de la teneur du témoignage livré par le maréchal lors de son audition. “Mon témoignage (...) est un témoignage de vérité de la part d'un honnête homme qui combat depuis quarante ans au service de Dieu et de l'Egypte”, a ajouté l'officier. Les militants égyptiens manifestent de plus en plus leur frustration envers l'armée, qui avait pris le relais de la police quand celle-ci avait perdu le contrôle de la rue le 28 janvier dernier. Ils accusent les militaires de protéger leur ancien commandant et réclament l'abolition des lois d'urgence toujours en vigueur près de huit mois après la chute de Moubarak. L'armée rejette ces critiques et assure piloter la transition vers un régime civil. “Nous conduirons l'Egypte vers la stabilité, si Dieu le veut”, a déclaré Mohammed Tantaoui. Par ailleurs, le gouvernement américain a confirmé dimanche avoir entamé un dialogue direct avec l'aile politique des Frères musulmans égyptiens, considérés comme parmi les favoris des prochaines élections législatives - les premières depuis la chute du régime Moubarak en février. “Nous avons eu des contacts directs avec de hauts dirigeants du Parti de la liberté et de la justice”, a déclaré un diplomate américain de haut rang à propos de la formation créée par la confrérie après la démission du “raïs” le 11 février. Jusqu'ici, les diplomates américains n'étaient pas autorisés à rencontrer des députés proches des Frères musulmans qui avaient été élus sous l'étiquette d'indépendants pour contourner l'interdiction officielle de la confrérie. Dimanche, le numéro 2du parti, Essam el Erian, a pour sa part nié tout contact avec des diplomates américains. Les Frères, tolérés dans les dernières années de l'ère Moubarak malgré une interdiction purement formelle, constituent l'une des forces politiques les plus structurées du pays, avec notamment une très forte action au niveau social et caritatif. Ils ont renoncé depuis plusieurs années à la violence pour atteindre leurs objectifs politiques et sont généralement taxés d'un islamisme modéré. Cette prise de contact, si elle est confirmée, risque de déplaire aux Israéliens et à leurs soutiens aux Etats-Unis. Samedi, la chaîne de télévision égyptienne Al Hayat avait demandé à Hillary Clinton si Washington était prêt à travailler avec un futur gouvernement égyptien comprenant des membres de la confrérie. “Nous serions ouverts et désireux de travailler avec un gouvernement composé de membres attachés à la non-violence, au respect des droits de l'homme et de la démocratie comme, je pense, l'espère la place Tahrir”, a répondu la secrétaire d'Etat américaine.