Incitation au terrorisme : le Club des Avocats du Maroc dépose une plainte contre Tawakkol Karman    Dakhla: la 5ème édition du Forum MD Sahara du 13 au 16 novembre    Tata Advanced Systems amorce la production du nouveau véhicule blindé AAP-Tr destiné à l'armée marocaine    Edito. Tanger ouvre la marche des champions    Mix énergétique: quelle place pour le solaire au Maroc ? (VIDEO)    Le Maroc devient le troisième acheteur mondial du bétail uruguayen en 2025    En Algérie, Rachid Hachichi écarté de la présidence de Sonatrach, Noureddine Daoudi lui succède, la gestion chaotique du géant pétrolier en question    Trump rejette l'idée d'une candidature à la vice-présidence en 2028    Présidentielle ivoirienne. Alassane Ouattara en tête    Algérie : Le PDG de Sonatrach limogé - Les raisons inavouées    Marathon de Casablanca : Le Marocain El Mahjoub Dazza vainqueur de la 16ème édition    Le PSG décide de ménager Achraf Hakimi qui n'ira pas à Lorient    Clasico : Vinicius Jr craque et menace de quitter le Real Madrid après avoir été remplacé    Sofiane Diop, la forme étincelante du moment en Ligue 1, 5 buts en 4 matchs    Lions de l'Atlas : Ismaïl Baouf dans la liste élargie de Walid Regragui    La Tanzanie investit pour préserver sa biodiversité    Environnement : le Togo muscle son dispositif de protection    Essaouira. Le Festival des Andalousies Atlantiques se rêve en Zyriab des temps modernes    Le Festival du Film Méditerranéen de Tétouan rend hommage à Nabil Ayouch et Eyad Nassar    Cotonou, scène des musiques d'Afrique francophone    Apple veut faire parler ses cartes : quand la pub s'invite dans Plans    Casablanca accueille la plus grande édition de Préventica    Liga / Clasico : Mbappé et Bellingham font plier le Barça    LDC : La RSB ramène un nul précieux de Tripoli    Mondial de Handball U17 / Groupe A : Le Maroc, s'inclinant face au Brésil, est hors course pour les demi-finales    Al Barid Bank : Nouvelle offre bancaire en faveur des vétérinaires    Recherche : le CESE alerte sur la fragmentation du système scientifique marocain    Le groupe chinois Guizhou Tyre officialise la création d'une base industrielle au Maroc tournée vers l'Afrique et l'Europe pour étendre sa présence mondiale    Aéroport Mohammed V: interpellation d'un Français d'origine algérienne    Delta Air Lines : Un nouveau pont direct entre les Etats-Unis et le Maroc    Revue de presse de ce lundi 27 octobre 2025    Donald Trump entame ce lundi une visite officielle au Japon    Maratón de Casablanca 2025: el marroquí El Mahjoub Dazza triunfa en 2h09'43''    Aéroport Mohammed V : arrestation d'un Franco- algérien recherché par Interpol    Nizar Baraka annonce une future zone industrielle dans la province de Taza    Le Qatar veut s'implanter dans le marché marocain des énergies renouvelables et des technologies électriques    Le SG de l'ONU dénonce les violations des droits de l'Homme dans les camps de Tindouf    Une source sécuritaire répond au rapport de l'AMDH sur les condamnations de membres de GenZ Maroc    Quand la passion du football rencontre la réalité médicale    Une délégation italienne à Laayoune    Entretien - Youssef Guezoum : « Ma musique est bilingue. Elle parle à la fois le langage du monde et celui de mes origines »    Sous Pedro Sánchez, plus de 272 000 Marocains ont obtenu la nationalité espagnole, un flux inédit concentré sur certaines régions espagnoles    Rabat « De mes soucis elle a pleuré » : Un vers qui unit, un recueil qui inclut    Festival national du film 2025 : "La Mer au loin" de Saïd Hamich triomphe à Tanger    Cinquante ans après la Marche Verte : Laâyoune renouvelle son serment envers le Roi et la Nation    Interview avec Idriss Iounousse : «L'objectif du SIC est de démocratiser l'accès aux compétences numériques»    Entre mémoire et culture, le Maroc à l'honneur à Bruxelles    Médiateur du Royaume: L'accès à la plateforme MARFI9I ouvert aux usagers du «Pass Jeunes»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Médias et désinformation: Le danger de la manœuvre
Publié dans Albayane le 23 - 07 - 2018

La société mondiale est pétrie de désinformation. Du «Cheval de Troie» jusqu'au virage numérique des temps modernes, le flou propre à la plus innocente des informations a toujours été exploité par l'homme pour en tirer profit. Ainsi, selon les contextes, la manœuvre, qui s'est développée, qui s'est colorée et qui s'adaptait aux évolutions de la société, consistait à joindre à l'approximation involontaire la tromperie délibérée.
La pratique, qui a été adoptée dans les guerres pour «soumettre l'ennemi sans combattre», puis subtilement perfectionnée dans le même domaine, s'est vu son champ d'action s'élargir. C'est ainsi que le langage, univers intérimaire ente l'homme et le monde, était manipulé pour entrainer les foules, faire taire, faire obéir, semer la peur, dissiper les craintes, accroitre la pitié, aiguiser les appétits, persuader, apprivoiser, assujettir, dominer.... Et gouverner. La matrice s'articule autour de l'intoxication, la publicité, la propagande, la désinformation et «l'ingénierie sociale».
La désinformation, objet de cet article, se distingue des autres pratiques de manipulation de l'opinion publique, par ses techniques et ses mécanismes. Le terme est apparu dans les dictionnaires soviétiques avant tous les autres. Mais le phénomène existait depuis presque vingt-cinq siècles. Il était défini comme «une technique utilisée par les puissances capitalistes contre les démocraties populaires».
«Il me semble que la désinformation suppose trois éléments : une manipulation de l'opinion publique, sinon ce serait de l'intoxication ; des moyens détournés, sinon ce serait de la propagande; des fins politiques, internes ou externes, sinon ce serait de la publicité...La désinformation est (donc) une manipulation de l'opinion publique à des fins politiques, avec une information traitée par des moyens détournés», résumaitvers la fin du vingtième siècle Vladimir Volkoff, écrivain français, auteur de nombreux ouvrages ayant trait à l'histoire, à la guerre froide et à la désinformation.
Pour mener à bien une opération de désinformation, plusieurs caisses de résonnances, dont notamment les médias, sont nécessaires. Les buts de la désinformation et les objectifs des médias se convergent en un seul point : provoquer une émotion pour déclencher l'action.
Dans le registre de la désinformation, c'est l'émotion qui entrainera les actions voulues ; dans le monde médiatique, l'émotion se vend toujours mieux. Sur cet axe commun, le fait pourrait être affirmé, infirmé, passer sous silence, amplifié, minimisé, approuvé ou désapprouvé. A ce propos, les médias, qui servent de véritables caisses de résonnances, optent pour la négation des faits, l'inversion des faits, le mélange du vrai et du faux avec titrage divers, une modification des causes, des circonstances, un estompement, un camouflage, une interprétation, une généralisation, une illustration, des parts égales ou inégales dans le traitement et une variation sur le même thème. «C'est vrai puisque je l'ai vu...lu ou entendu».
Or, une image pourrait être manipulée à volonté aussi bien qu'un texte écrit. Dans le premier cas, les ajustements techniques, le cadrage, le montageet les réglages pourraient non pas uniquement modifier le message, mais lui donner une charge émotive pour bien manipuler les passions. Dans le deuxième cas, celui du texte, il s'agit en fait d'une bataille «à coups de mots». En plus de la mise en page de l'information et de son illustration, la technique recourt à des jeux de mots, l'emploi des adjectifs flatteurs ou dépréciatifs, des caricatures, avis du média. Ces détails amènent le lecteur à croire au contenu de l'article lu. Ainsi, l'information servie ne correspond pas nettement et honnêtement au fait. Bien plus, elle finit par signifier le contraire ; exactement ce que recherche le désinformateur.
Un fait n'est pas une information. Et les médias rapportent des informations et non pas des faits. En plus de biais, déclaré ou non, l'autre aspect des médias qui favorise grandement la désinformation est la reprise d'informations. En effet, les médias ont cette tendance à se copier les uns les autres pour s'aligner sur l'actualité et traiter «ce dont on parle». D'ailleurs les rédactions ne démarrent le matin qu'après avoir effectué une «revue de presse». Ainsi, dès qu'un nouveau sujet est rapporté par un média, d'autres s'y concentrent, l'abordent sous différents angles pour se différencier. Le sujet se trouve enfin de compte amplifié au grand bonheur du désinformateur. Un autre procédé a été également fortement souligné par Volkoff. Il s'agit de la logomachie et la langue de bois. Deux procédés distincts, mais qui attaquent le vocabulaire et la façon de discourir pour mieux désinformer.
Dans le premier cas, cette manipulation du langage, qui consiste à créer et soigneusement choisir un nouveau vocabulaire, impacte le discours et le rend désinformant même sans mauvaise intention de la part de celui qui le prononce. Les expressions forgées par des politiques à différentes époques, «ennemi du peuple», «ennemi de la liberté», «ennemi de la démocratie», «les valeurs de la chose», etc., sont employées pour porter des jugements de valeurs, diaboliser l'adversaire. Les échos émotionnels chez les destinataires ne sont plus à démonter. «Nous ne parlons pas pour dire quelque chose, mais pour obtenir certains effets», avait martelé, Joseph Goebbels, (1897-1945), l'un des dirigeants les plus puissants et influents d'Allemagne de 1933 à1945 (il était ministre chargé de l'éducation du peuple et de la propagande). La portée du message politique de Goebbels sera confirmée des décennies plus tard par le philosophe et sémiologue français, Rolland Barthes.
«Parler et à plus forte raison discourir, ce n'est pas communiquer comme on ne cesse de le répéter trop souvent... c'est assujettir», avait souligné Barthes lors d'une leçon au collège de France au début des années soixante-dix. C'est dire que l'arme du langage, ou plus exactement son code obligé : la langue, entre toujours au service d'un pouvoir. «Dès que la langue est proférée, fût-ce, dans l'intimité la plus profonde du sujet, la langue entre au service d'un pouvoir», avait répliqué le sémiologue français.
Dans ce sillage, résument des travaux effectués sur les ouvrages de Volkoff, que «lorsque la langue de bois est solidement installée, même un individu voulant penser autrement que la pensée dominante sera automatiquement limité et recadré par l'usage du vocabulaire».
De la sorte, le mensonge roule automatiquement et condamne au passage le raisonnement. Dans le deuxième cas, la langue de bois appauvrit le langage en ne retenant que les termes et les expressions qui servent la cause de la désinformation. Cet appauvrissement du vocabulaire et son massacre influencent le raisonnement.
Il s'agit d'une machine infernale qui fait florès. Dans ce registre, chacun pourrait être exploité comme agent, à son insu. Le désinformé devient à son tour un désinformateur zélé pour servir la thèse de l'opération, ses visées et ses objectifs. Voilà le grand danger de la manœuvre. Et avec l'avènement de l'Internet et des réseaux sociaux, la désinformation a acquis de plus en plus d'efficacité.
Désormais, elle n'est plus du tout le privilège d'Etats puissants et de leur services spéciaux. Les opérations de désinformation, aussi appelées montages, sont parfois menées par des agences privées contre rétribution d'un client qui préfère rester dans l'ombre.
Il faut dire que c'est l'ère des nouvelles technologies de la communication et de l'information, mais c'est également l'époque de la désinformation. Si la propagande, désagréable et détestable, était visible avec ses auteurs qui défendaient des idéologies, des idées, des opinions, force est de constater que la désinformation reste une «arme silencieuse» et ravageuse.
En saisissant ses mécanismes, ses rouages et la philosophie de ses opérations, cela permettra d'avoir un nouveau regard sur l'information, quelle que soit sa source et d'interroger même les évidences qui l'entourent. «La vérité, comme la lumière, aveugle. Le mensonge, au contraire, est un crépuscule qui met chaque objet en valeur», écrivait Albert Camus (1913-1960). Le mensonge devient alors facilement vendable. «Dites-leur ce qu'ils veulent entendre», disait Lénine (1870-1924).


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.