On le connaissait surtout poète, journaliste et agitateur culturel. Yassin Adnan signe son premier roman, «Hot Maroc», 457 pages, sorti chez Actes Sud. Une aventure romanesque bien réussie ! Témoin de son temps, cette saga dont le récit est guidé minutieusement jusqu'à la fin, dresse le portrait d'un Maroc en pleine mutation, d'un pays qui se modernise, se transforme en perpétuelle évolution. Par ailleurs, la description détaillée et bien maîtrisée est l'un des points forts de ce roman écrit à la technique anglo-saxonne. Volumineux certes, mais il ne tombe pas des mains. Ecrit sur un ton parfois comique, ironique et cocasse, le lecteur de «Hot Maroc» ne sort pas indifférent de cet univers où la comédie et la condition humaine sont les maîtres mots de la situation. Rahhal, personnage clé du roman, se sentait plus proche de l'Ecureuil. Il renvoyait l'humain à son animalité première !!! Une métaphore où chaque personnage incarné dans l'histoire correspond à un animal. Et c'est voulu en tout cas dans la mesure où la caricature humaine et de sa réalité sont mises à nu. Rehhal est un personnage problématique, absurde, pragmatique, passif, compliqué et complexe. Un anti-héro ! Ce personnage, renvoyé, a pu ouvrir une nouvelle page de sa vie universitaire grâce aux luttes des étudiants de l'UNEM. Et c'est alors à travers les yeux de Rehhal, Atiqa, Ahmed, Aziz et les autres qu'on y voit de près l'état de santé de l'université marocaine, ses petites histoires, ses maux, ses protagonistes incontournables. Une microsociété, si nous n'osons dire... «Hot Maroc» est un roman dans le roman, une histoire dans l'histoire. C'est aussi un regard poignant sur une étape cruciale et importante du pays où la société marocaine connaissait des changements sur plusieurs : politique, économique, social et culturel. En outre, la ville dite ocre; ses ruelles, ses souks, ses fameuses familles, ses odeurs, ses couleurs mais aussi ses métamorphoses et son visage sombre, occupe une place prépondérante dans le roman. C'est un hommage à Marrakech, mais au goût amer, au-delà de l'image poétique habituelle transmise au fil des années de cette ville des sept saints. Les paradoxes de la vie réelle et virtuelle sont décrits par le pais de l'écriture. Dans cet esprit, les surenchères politiciennes, la corruption, le chantage, les fake news… ont été bien examinés sous la loupe de l'auteur. «Hot Maroc», un roman d'actualité digne d'une pièce de théâtre ou d'un film. A lire absolument !