Présidentielle en Guinée-Bissau. 2,4 millions de bulletins livrés    Justice : le parquet lance un suivi des plaintes par SMS    Résilience climatique. Le Burkina renforce son arsenal financier    Tunisie. Le taux de chômage augmente    Forces Royales Air : Airbus Helicopters va fournir 10 appareils H225M    Investissements dans les startups : le Maroc s'allie au Keiretsu Forum MENA    Produits frais : un nouveau corridor maritime Maroc–Europe voit le jour    Attaques jihadistes. Alerte maximale au Nigeria    Coupe du Monde U17. Maroc-Brésil, ça va suer des deux côtés    CAF Awards. Les Marocains raflent la mise    Classement FIFA: le Maroc reprend la 11e place mondiale    Eswatini, premier pays d'Afrique à adopter l'injection préventive du VIH    Edito. Juger l'enfant ou réparer la société ?    Paris accueillera officiellement la proclamation de l'indépendance de la Kabylie le 14 décembre 2025    Terres rares : Washington "espère" finaliser l'accord avec Pékin d'ici fin novembre    La chute du dernier masque : le régime militaire algérien vote là où son peuple ne voulait pas    Chlorure de potassium : le ministre de la Santé réfute tout conflit d'intérêts devant le Parlement    La Gambie réaffirme son appui au Plan d'autonomie    Moroccan Ghizlaine Chebbak crowned Player of the Year at CAF Awards 2025    CAF Awards 2025 : L'équipe du Maroc U20 désignée sélection masculine de l'année    Ministère public : Un service numérique pour renforcer la communication avec les usagers    Sortie de Sanae Takaichi sur Taiwan : mépris de textes ou provocation    Azzedine El Midaoui: «Nadie tocará la gratuidad de la educación superior pública»    Azzedine El Midaoui : «Personne ne touchera à la gratuité de l'enseignement supérieur public»    Be Magazine : Rabat se fait une place méritée dans les grandes tendances du voyage    Festival International du Film de Marrakech : La composition du jury dévoilée    Marrakech : l'UCA inaugure l'exposition « L'Afrique aux origines de la vie »    Jameel Motors renforce sa présence au Maroc avec la distribution des véhicules utilitaires JMC    Qualifs CDM 26 : Mardi décisif en Europe    A Washington, le Prince héritier d'Arabie Saoudite annonce 1.000 milliards de dollars d'investissements aux Etats-Unis    L'ambassadrice de Chine en visite à la Commune de Marrakech pour explorer les perspectives de coopération    Le Maroc redessine son modèle agricole grâce à une ingénierie financière de nouvelle génération    Rabat accueille jeudi la Conférence ministérielle africaine sur le Désarmement, la Démobilisation et la Réintégration des enfants soldats    Kénitra: Les informations sur un prétendu mariage par "la Fatiha" d'une mineure dénuées de tout fondement    Hammouchi préside la cérémonie d'excellence annuelle organisée par la Fondation Mohammed VI pour les oeuvres sociales du personnel de la Sûreté nationale    Regragui after 4–0 win : «We must arrive at AFCON as a united group»    PAM: Pas moins de 318 millions de personnes pourraient être confrontées à une crise alimentaire en 2026    Mafia : Le Maroc arrête le chef du clan d'Aprilia, activement recherché par l'Italie    CAF Awards 2025 : Ce mercredi, c'est "Soirée Cérémonie" !    Festival International du Film de Marrakech: la composition du jury de la 22e édition dévoilée    Marrakech Film Festival 2025 jury unites global cinema icons    Mélita Toscan du Plantier : Le FIFM soutient «l'émergence de nouvelles écritures autour du cinéma» [Interview]    FIFM 2025 : un jury cosmopolite et intergénérationnel    La Bourse de Casablanca ouvre en grise mine    Le ministère de la Santé assure l'évacuation sanitaire urgente d'un nouveau-né de Laâyoune vers Rabat    L'ambassadrice de Chine visite le Centre de langue chinoise "Mandarin" à Marrakech    Pressée par Trump, l'Algérie lâche les Palestiniens à l'ONU    L'artisanat marocain s'expose à Séville pour renforcer les liens culturels avec l'Andalousie    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



« Boujemaa Lakhdar Le goéland de l'art contemporain au Maroc »
Publié dans Albayane le 09 - 05 - 2022


Par M'barek Housni
De tout temps, l'art a existé et existe par ce qu'il est, via les œuvres et les artistes. Cela est vrai, mais aussi par l'écrit qui ne se contente pas de l'accompagner, mais d'assurer sa pérennité et de le mettre là où la lumière luit. Le livre bilingue, en arabe et en français, intitulé « Boujemaa Lakhder, le goéland de l'art contemporain au Maroc » en est un parfait exemple, en s'attelant à un devoir de mémoire vis-à-vis de l'un des plus grands artistes marocains. Le premier grand mérite de cet ouvrage collectif coordonné par le critique d'art Hassan Laghdache, dont plusieurs études y figurent, et édité par l'association pionniers des arts, sous l'égide du maître Abdessalam Raiss (les œuvres étudiées sont collectionnées par lui), est de rassembler non seulement une pléthore de critiques d'art, mais aussi celle de critiques d'art doublés d'artistes plasticiens qui exercent les deux disciplines avec un égal bonheur. C'est dire que toute la profondeur des textes que tout ce beau monde a écrits est assurée.
D'abord, on prend connaissance de ce que fut Boujemaa Lakhdar (1941-1989) et ce qu'il a entrepris depuis son premier tableau peint à dix-sept ans. Puis cet apport fort considérable aux arts plastiques marocains qu'il n'a cessé durant sa vie d'enrichir en l'innovant : édifier des ponts entre l'artisanal et l'artistique, prendre son point de départ à partir de la culture populaire pour en ressortir le génie créatif qu'elle recèle. Il l'a fait en pionnier dans sa ville natale, Essaouira. Ville unique, ville de toutes les audaces artistiques, où les artisans ont une présence déterminante pour tout futur artiste. Ville des confréries, des gnaous, du métissage culturel, cité créée pour être internationale. Il l'a fait doublement : en tant qu'auteur ethnographe, historien, écrivain et en tant que plasticien. Il a beau été autodidacte, son érudition a servi pleinement ses créations inégalables. En outre, les années qu'il passées comme directeur du musée des arts populaires, qui porte le nom du fondateur de la ville Sidi Mohammed Ben Abdellah, lui ont ouvert les portes des espaces qui couvent la mémoire créative marocaine.
Les articles, les hommages écrits, les études des œuvres qui s'échelonnent le long des pages du livre le montrent et l'explicitent largement. À commencer par le texte d'un grand parmi les grands, le peintre Roman Lazarev, qui résume son travail ainsi : «... on est frappé par ces objets qui nous semblent presque toujours être des meubles utilitaires, mais qui ont été déformés, transformés, réalisés même avec beaucoup d'humour en utilisant le plus souvent des matériaux divers récupérés à la joutia, et ils deviennent, entre ses mains, plus une recherche artistique et symbolique que les pâles copies des objets utilitaires qui leur ont servi modèle ». Tout est dit sur l'art singulier et inspirateur de Boujemaa Lakhdar, ses célèbres sculptures basées sur la recherche tout en s'ancrant dans le local, l'habituel, le donné, qui devient quelque chose de magique. Car toutes les interventions s'accordent sur le fait que l'artiste est un magicien. Un magicien de la terre, lui qui a été le seul artiste maghrébin à participer à la célèbre exposition « les magiciens de la terre » au centre Beaubourg à Paris en 1989, qui figure comme consécration. Hassan Laghdache parle de cette magie en ces termes à propos d'une de ses œuvres : « L'artiste se joue avec fantaisie onirique de signes enchâssés dans une forme circulaire, censée par des lettres d'alphabet calligraphique, un alphabet mettant en valeur l'écriture du texte sacré ou celui du Tifinagh, utilisé dans les talismans et les amulettes occultes [...] le développement d'un langage commun, tantôt brodé, tantôt tissé, tantôt tatoué, tantôt gravé avec une symbiose chromatique qui rappelle soit la couleur du henné travaillé par le Skia soit la couleur verte pistache du Zellij »
Et c'est ce que confirme à son tour le chercheur connu Georges Lapassade avec lequel il a fait et publié des recherches anthropologiques en commun sur le patrimoine souiri. De même que le professeur Jean François Clément qui voit en lui un artiste qui « était mû par la croyance selon laquelle « les formes et les signes qui surgissent au fond des siècles… ne meurent pas même occultés, refoulés, écrasés ». Ce côté que les professeurs et critiques Abdelkader Mana, Daniel Couturier, Abdellah Brnsmain, Abderrzak Bebchâabane, Abderrahman Benhamza affirment joliment.
La magie, le magique et le féerique, c'est ce que l'artiste n'a cessé d'investir et d'approfondir. On en apprend plus et selon diverses sensibilités critiques dans la version arabe du livre, où d'éminentes plumes marocaines ont explicité et analysé certaines des œuvres les plus marquantes de notre artiste. Driss Katir, Abdellah Cheikh, Chafik Ezzougari, Brahim El Haissen, Benyounes Amirouche, Mohamed Chouika, Ahmed Lotfallah, Mohamed Chiguer, Boujemaa Elaoufi, Farid Zahi. Ils ont enrichi d'une vision globale, multiple et posée l'univers de cet artiste unique. Un goéland de l'art, nom qu'il mérite, car « symboliquement, le goéland est un oiseau de rivage qui s'aventure rarement loin de la terre. Les rivages sont des lieux de grand mystère et de magie. » dixit Hassan Laghdache.
Ce livre est tout simplement incontournable pour qui veut comprendre l'expérience artistique d'un grand homme et d'un grand artiste qui a révolutionné les arts plastiques au Maroc, durant sa courte vie. À l'exemple des géants que compte l'histoire de l'art mondial, disparus avant l'heure, mais demeurant éternellement présents par leurs œuvres. À propos de son travail, l'artiste a eu ses mots lumineux : « Derrière chaque œuvre, il faut dire qu'il y a une longue histoire, l'histoire de mon discours mimé qui me dérange et celle d'un grand rêve qui n'a ni début ni fin. C'est donc l'histoire d'un thème que j'ai incrusté, peinte, marquetée, brodée, sculptée…chaque fois que je suis en transe ».
La transe d'un goéland jaloux de ses racines.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.