Maes... le rappeur français embrase les réseaux avec un message fort en faveur de la marocanité du Sahara    M. Hilale: L'engagement du Maroc contre le discours de haine est constant et irréfragable    Coup d'envoi à Salé de la 6è édition du Championnat d'Afrique militaire de boxe    Le Maroc parmi les six premiers pays à équiper ses F-16 du système de guerre électronique Viper Shield    La région Casablanca-Settat se dote de 28 stations de dessalement    La Chine financera à Mohammedia une unité de production de matériaux pour batteries portée par Zhongwei et la Banque de construction du Hunan    Ipsos Global Trends : entre repli et ouverture, le Maroc révèle ses contradictions    La récente panne ibérique révèle l'urgence d'une sécurité électrique globale, selon l'AIE    Un retard israélien sur la livraison de chars Merkava Mk3 au Maroc favorise les exportateurs sud-coréens d'armement    La marque de parfums de niche NISHANE débarque officiellement au Maroc via Interbeauty    Les champs de lavande au Xinjiang... Un tableau naturel qui enchante les visiteurs et dynamise l'économie locale    Iran et Algérie... l'axe du désordre qui attise les foyers de tension dans le monde arabe et en Afrique    SAR le Prince Moulay Rachid préside l'Assemblée Générale Extraordinaire de la FRMG    Walid Regragui... Entre emportement populaire et exigences de construction nationale    Le Maroc enregistre un taux de remplissage de 38,9 % dans ses barrages, les disparités subsistent    Les prévisions du mardi 17 juin    CDM (Clubs 25) : L'Espérance battu, Chelsea vainqueur !    Eolien offshore: Un parc de 1000 MW prévu au large d'Essaouira    Mondial des Clubs : Mehdi Taremi coincé en Iran, une crise inattendue pour l'Inter Milan    Inde: Un vol Air India Hong Kong–Delhi fait demi-tour après un problème technique    Risque d'incendies : L'ANEF appelle à la vigilance pour éviter les départs de feux de forêts    Prisons : 435 détenus décrochent leur baccalauréat    Dislog Group acquires avon morocco and strengthens its beauty portfolio    Amine Boudchart : l'architecte musical d'un renouveau marocain    Prendre exemple sur le dirigeant vétéran Chen Yun et faire de la Chine un pays puissant    "Tout le monde devrait évacuer Téhéran immédiatement", écrit Trump sur Truth Social    Royaume-Uni : Le gouvernement ignore des questions d'un député pro-Polisario    Panama : Les ministres de l'Agriculture, du Commerce et le chef des renseignements attendus au Maroc    Presse italienne : le Maroc s'affirme comme hub stratégique pour les investissements étrangers    Marrakech Coffee & Tea festival 2025 unites Africa in celebration of culture and innovation    Après les islamistes, le PPS «condamne l'agression sioniste contre le peuple iranien»    Marrakech Coffee & Tea Festival : La cité ocre devient capitale panafricaine du café et du thé    Canada-G7 : Un sommet assombri par la guerre israélo-iranienne et les guerres commerciales    L'Iran exhorte les Européens à faire cesser "l'agression" israélienne    Real Madrid va prolonger le contrat de Brahim Diaz malgré une offre de 50M de la part d'Arsenal    Le FC Barcelone renonce à disputer un match amical à Casablanca en août    Le Panama qualifie l'offre marocaine d'autonomie de fondement le plus réaliste pour clore le différend du Sahara    Saraha : pour le Panama, l'initiative d'autonomie est "l'unique solution à l'avenir"    Casablanca célèbre "Arouah Ghiywania": Un hommage vibrant au patrimoine musical marocain    Gnaoua 2025 : Une ville en transe, un monde en fusion    Marrakech : le FNAP revient au Palais El Badiî pour sa 54e édition    Coupe du Trône de football : Les dates des demi-finales fixées (FRMF)    Thunderstorms and gusty winds expected this Monday in Morocco    Armamento: Marruecos lanza la Sociedad de Gestión de Zonas Industriales de Defensa    «Le Maroc m'a toujours soutenu» : Mohamed Ihattaren opte pour les Lions de l'Atlas    Le Festival international du film de Dakhla célèbre sa 13e édition    «Je viens d'un regard qui traverse», une exposition de portraits pour révéler l'invisible de Mustapha El Basri    101e édition du Festival des Cerises à Sefrou: Bensaid souligne la valeur culturelle et civilisationnelle de cet événement    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«La mémoire tatouée» de Abdelkebir Khatibi : figurer le visible et transfigurer l'invisible !
Publié dans Albayane le 13 - 03 - 2024


Mohamed Nait Youssef
Il y a des livres incontournables ayant marqué des époques et des générations. «La mémoire tatouée», premier roman du sociologue et écrivain Abdelkebir Khatibi, en fait partie. Un livre poignant. Une autobiographie singulière et solaire. En effet, cette référence emblématique, parue pour la première fois en 1971 chez les Editions Denoël, a mis les lumières sur la question de l'être, de l'identité, de la culture, de la double culture, de la différence, de l'altérité, de l'écriture et de la langue. Il s'agit bien d'un roman et autobiographie d'un décolonisé. «En 1968, je décidai d'écrire ce récit autobiographique qui sera la mémoire tatouée, tout en redoutant l'enjeu redoutable qui s'y engage et s'y agite. Peur d'un tel regard sur ma propre image ne s'envole en un pur enchantement de la mémoire, joie fébrile d'une poésie nostalgique et attendrie sur ses propres débris.», écrivait Abdelkebir Khatibi dans la présentation du roman.
Contexte mitigé, autobiographie tatouée...
«La mémoire tatouée», autobiographie éditée dans un contexte culturel, économique et politique national et international marqué par des turbulences, plonge le lecteur dans un univers romanesque où la quête de soi, la double culture, le pluralisme et l'esprit critique sont au cœur de l'œuvre. «Je naquis avec la deuxième guerre, je grandis aussi dans son ombre et peu de souvenirs me reviennent de cette époque. Se détachent de ma mémoire de vagues paroles sur la rareté des produits ou le drame de parents engagés de gré ou de force. Radio-Berlin captait l'attention de nos pères ; l'histoire internationale entra dans ma petite enfance par la voix du sinistre dictateur.», p 19. Par ailleurs, la vision du monde de l'autre se dévoile à travers le plurilinguisme d'un livre marqué par sa richesse linguistique, sémantique et romanesque. Ainsi, l'autobiographique est mêlé avec le poétique, le narratif et le méditatif pour enrichir l'œuvre.
«Je naquis dans le rythme de ma ville, porté par le vent doux et salé de l'Océan. Ouvrez le cœur de Thalassa, vous y verrez la racine croisée d'une branche et d'un regard. Ce regard appelle la renaissance d'un espace. Par le jeu de la dissimulation, le souvenir métamorphose la ville de notre passé en une nostalgie blanche ; les chemins partent et aboutissent au même nœud, les quartiers se renvoient les uns aux autres dans un puzzle de formes, de surfaces, et de couleurs. Deux images se détachent de ma mémoire nomade, images légères et mouvantes comme la géométrie de l'hirondelle ou l'appel feutré du désir.», p.47.
Témoin de son temps, le roman revient sur l'indépendance au Maroc et les luttes menées contre le colonisateur. Influencé par son époque, l'auteur a été marqué par les grands événements ayant chamboulé son contexte à savoir la guerre mondiale, l'indépendance du Maroc, la guerre d'Algérie.
«On connaît l'imagination coloniale : juxtaposer, compartimenter, militariser, découper la ville en zones ethniques, ensabler la culture du peuple dominé. En découvrant son dépaysement, ce peuple errera, hagard, dans l'espace brisé de son histoire. Et il n'y a de plus atroce que la déchirure de la mémoire. Mais déchirure commune au colonisé et au colonial, puisque la médina résistait par son dédale. », p.54.
«Ainsi tourne la culture»... et la vie !
Entre essais, citations, poèmes en prose, réflexions et méditations, Abdelkebir Khatibi aborde, par le prisme de l'écriture et des mots, de multiples problématiques, l'enseignement, la double culture et la langue, entre autres...
«À l'école, un enseignement laïc, imposé à ma religion ; je devins triglotte, lisant le français sans le parler, jouant avec quelques bribes de l'arabe écrit, et parlant le dialecte comme quotidien. Où, dans ce chassé-croisé, la cohérence et la continuité?», p 64.
De la mémoire tatouée en passant par El Jadida, Essaouira, Marrakech, Khatibi nous amène dans ses univers marqués par '' le corps et les mots'', ''par gestes décrochés''... et c'est ''ainsi tourne la culture'' et la vie.
Par ailleurs, dans ''le corps et les mots'', l'auteur évoque son rapport à l'écriture et sa fascination pour la lecture, les mots et les livres. «J'ai rêvé, l'autre nuit, que mon corps était des mots.», peut-on lire dans une citation de Khatibi. Et d'ajouter : «on est toujours l'adolescent de quelque obscure mémoire. Ce fut le bonheur de l'écriture qui me sauva. Je devais mon salut à l'amitié des livres, et à cet adolescent à la chevelure nonchalante, qui jetait sur tout un coup d'œil ironique. Duo inséparable, une amitié toujours renouvelée.», p 89.
La lecture, écrivait-il, me rendait à la vie, à la mort. Le parfum d'un mot me bouleversait, p. 91. L'écriture est une espèce d'échappatoire. Elle a cette force salvatrice tirant l'auteur de la lassitude et du non sens du monde.
«J'écrivais, acte sans désespoir et qui devait subjuguer mon sommeil, mon errance. J'écrivais puisque c'était le seul moyen de disparaître du monde, de me retrancher du chaos, de m'affûter à la solitude.», p 98.
L'identité et la différence occupent une place centrale dans l'autobiographie de l'auteur. Le voyage de khatibi entre la ville ocre (Marrakech) et la Ville Lumière (Paris) a démontré les problématiques de l'altérité, de la différence, de l'identité, de la quête de soi.
«Je partais à Paris sans autre histoire que celle d'un étudiant ombrageux, à la recherche d'une autre image des autres et de moi-même. Je me souviens, de même, de ma vacance dans la séparation de deux espaces, légèrement tremblant, assis dans un avion nocturne ; rêve qui, depuis ma prime enfance, vieillissait dans la narration. Ce vol, rencontrer l'Occident dans le voyage de l'identité et de la différence sauvage.», p127.
Khatibi questionne les signes et la culture marocains. «L'originalité de Khatibi, au sein de sa propre ethnie, est donc éclatante : sa voix est absolument singulière, et par là même absolument solitaire.», écrivait Roland Barthes dans sa postface ''Ce que je dois à Khatibi''.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.