Importations : Le gouvernement réduit drastiquement le droit de douane sur les smartphones    La Fondation Mohammed VI des Ouléma Africains, pilier de la coopération religieuse en Afrique    Sahara : Les Pays-Bas déclarent que le plan d'autonomie est la solution "la plus réalisable"    Le zoo d'Ain Sebaa à Casablanca rouvrira ses portes le 22 décembre    CAN 2025 : Rabat forme ses professionnels de l'hôtellerie-restauration pour un accueil exemplaire    Marché national - M-Automotiv lance au Maroc KGM, une marque sud-coréenne issue de SsangYong    Coupé sportif - Honda Prelude, l'habit ne fait pas le moine    Revue de presse de ce vendredi 5 décembre 2025    GenZ Maroc : Un total de 55 années de prison pour les participants aux émeutes d'Aït Ourir    Secousse tellurique de magnitude 4,9 ressentie dans le sud de l'Espagne    Poutine en Inde : une visite d'Etat stratégique au cœur du sommet annuel Inde-Russie    Sektioui : Le match contre Oman, décisif pour la qualification en quart de finale    Tirage/CdM 2026 : quels scénarios pour les sélections africaines, du meilleur au pire    Coupe Arabe 2025 : Des Lions en alerte face à Oman, pour la qualification cet après-midi    Coupe du Monde 2026 : Rio Ferdinand et les légendes du sport au tirage final de ce soir    Sponsoring - Le Maroc a participé à la Mediterranean Cupra Padel Cup en Egypte    Marjane célèbre les supporters et dévoile un dispositif exceptionnel pour la CAN 2025    Coupe arabe : Sektioui dévoile la composition des Lions de l'Atlas face à Oman    Pays-Bas : Un Marocain tué sur un passage piéton, une collecte de fonds lancée pour rapatrier la dépouille    UNESCO : Casablanca et Oujda rejoignent le Réseau mondial des villes apprenantes    Quand le public s'essouffle, l'éducation se pantoufle    Voici les hauteurs de pluie enregistrées ces dernières 24H    Admission au barreau de Paris des étudiants de Sorbonne-Euromed Maroc    L'Humeur : Manal, madame l'ambassadrice    Andrew Dominik : « La femme comme sujet au cinéma m'a toujours inspiré »    « Fatna, une femme nommée Rachid » : Hélène Harder ravive la mémoire combattante de Fatna El Bouih    FIFM : Karima Saïdi dévoile "Ceux qui veillent", un hymne à la mémoire et au lien -Interview-    Standard Chartered renforce son ancrage régional avec l'ouverture de son bureau marocain    inwi mise sur les constructions neuves pour accélérer la fibre au Maroc    Le Sahara, levier de développement continental qui inspire    Autodétermination, autonomie et nouveau cap diplomatique : ce que révèle la parole de Nasser Bourita    L'Ittihad de Tanger présente l'entraîneur espagnol Pepe Mel et la vision sportive du club    Le Maroc souligne « un moment inédit » dans ses relations avec l'Espagne    Réunion de haut niveau Maroc - Espagne : Plusieurs accords de coopération signés    Le Maroc réélu au Conseil d'administration du Programme alimentaire mondial    Les présidents du Rwanda et de la RDC signent un accord de paix à Washington    Le Burkina rétablit la peine de mort dans son projet de nouveau Code pénal    As Morocco and Spain meet in Madrid, Sumar MP renews criticism of Spain's Sahara stance    Salé: Clausura del campeonato de mini-fútbol El camino hacia la CAN Marruecos 2025    Rhinocéros noirs : le Kenya intensifie la protection    Un Partenariat à Fort Enjeu Stratégique : Pourquoi le Golfe demeure-t-il un soutien indéfectible à la marocanité du Sahara ?    Maroc-Espagne : Bourita salue un « partenariat modèle » et appelle à des « solutions innovantes » pour les dossiers complexes    Fatim-Zahra Ammor : « Les performances sont le fruit d'une politique gouvernementale volontariste et ambitieuse »    ONDA : quatre nouveaux directeurs nommés à la tête des aéroports de Marrakech, Tanger, Fès et Agadir    «Mira» de Lakhmari : La rupture qui n'en est pas une ?    Le chat domestique européen a été amené de l'Afrique du Nord, selon une étude    «El Sett» : Marwan Hamed's bold reimagining of Oum Kalthoum premieres in Marrakech    ElGrandetoto tops Spotify Wrapped Morocco 2025, as hip-hop reigns supreme    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Abdelkébir Khatibi: l'inclassable maître à pensée
Publié dans MAP le 19 - 10 - 2010

Il nous a quittés le 16 mars 2009, mais son œuvre restera à tout jamais tatouée dans les mémoires. Feu Abdelkébir Khatibi a été, tour à tour poète, romancier et essayiste à un penseur, somme toute.
-Par Ali Hassan Eddehbi-
Très diverse, la création de Khatibi échappe aux classifications et à leur côté forcément réducteur.
"Ma spécialité c'est le langage et le langage c'est la grande question de l'homme. Ma spécialité c'est d'explorer les lieux de langage qui me révèlent soit des questions, soit des structures, pas simplement de pensés, mais de société de pouvoiràje ne veux donner aucun nom à cette exploration ", rétorquait-il à ceux qui voulaient le confiner dans un genre particulier.
Comme beaucoup d'écrivains maghrébins de la période postcoloniale, Abdelkébir Khatibi a d'emblée choisi la langue française pour s'exprimer, expliquer son pays, véhiculer à l'imaginaire occidental une nouvelle image de l'Orient.
.+Un étranger professionnel+.
Abdelkébir Khatibi a vu le jour à El Jadida en 1938 au sein d'une famille relativement modeste. De mère analphabète mais porteuse d'une culture orale, populaire féconde et d'un père dont le savoir théologique renvoie à la langue arabe classique, il a tenté de renaître par lui-même et de s'auto-engendrer à travers un troisième véhicule: la langue française.
A douze ans, le jeune Abdelkébir est envoyé comme interne au collège Sidi Mohammed de Marrakech dont il usera les bancs pendant sept ans (1950- 1957).
C'est durant ces années d'internat qu'il découvre l'univers magique des livres et les horizons qu'il ouvre. Il commence alors à penser à son avenir. Il songe à tout. Faire du Cinéma. Epouser une carrière sportive. Rentrer dans le monde de la danse et de la musique. Mais vers l'âge de dix-neuf ans la littérature vient le hanter. Il se met alors à entretenir un dialogue assez profond avec les textes de Mallarmé et s'en va explorer la poésie française.
Il s'enfonce dans les textes de Baudelaire, Rimbaud et autres grands classiques de la littérature française, et y trouve un tel plaisir qu'il adopte la langue de Molière comme "instrument de travail".
Mais Khatibi tiendra toujours à rappeler que le français n'est pas sa langue maternelle, qu'il y est venu par un heureux hasard et qu'il porte dessus le regard d'un " étranger professionnel ". Une idée qu'il n'a cessé de revendiquer sa vie durant.
.+Je suis resté lecteur 20 ans+.
En 1958, le baccalauréat en poche, Khatibi fait ses malles pour aller à Paris, plus précisément à la Sorbonne où il entame des études de sociologie.
A son retour au Maroc, après avoir soutenu une thèse pionnière sur le roman maghrébin, Khatibi mène de front une intense activité intellectuelle. Sur le plan politique, il participe à la création du Syndicat national de l'enseignement supérieur.
Mais il revient vite -et définitivement- vers son domaine de prédilection: la littérature. En 1971, il publie à l'âge de 33 ans son premier roman, probablement le plus célèbre: La mémoire tatouée, autobiographie d'un décolonisé.
Un premier opus, fruit d'une vingtaine d'années de lectures silencieuses." Si j'exclus l'intermède que fut l'écriture de ma thèse et les quelques brouillons de poésie que j'ai pu composer, j'investissais dans l'enseignement, la recherche le moment historique où j'ai repris l'écriture de manière systématique, se situe dans les années soixante-dix.
Au sortir d'une époque riche en évènements, ressentant un besoin impérieux de repli à l'écriture d'un roman ou d'un texte de recherche peut prendre des années", racontait-il dans "L'oeuvre de Abdélkbir Khatibi ", éditions Marsam, 1997.
Pour Khatibi, l'acte d'écrire n'était pas fortuit. Cet acte exigeait du temps pour la méditation, la lecture, les voyages et les rencontres. Ce que l'on dit ou s'efforce de dire doit être enraciné dans la vie.
Il disait que quand on s'installe dans cette longue expérience qui s'appelle l'écriture, le temps ne se compte plus. On peut travailler continuellement, arrive un moment où l'on se rompt à l'équilibre avec les autres dans sa vie privée, autour de soi dans le quotidien.
.+Le précieux legs Khatibien+.
De l'avis de ceux qui l'ont connu et vécu à ses côtés, Abdélkébir Khatibi est le modèle de l'intellectuel et du sociologue qui a consacré sa vie à l'étude des autres cultures et sociétés dans l'ultime dessein de mieux comprendre les siennes.
"Pèlerin du monde", il voyageait partout et réinventait tout. Il aimait se déjouer des concepts préétablis pour pouvoir les disloquer et, ensuite, les reconstruire. Khatibi voulait reconstituer une identité contemporaine tout en s'inscrivant dans la "modernité de la pensée".
S'interrogeant sur son appartenance à la culture musulmane, il s'opposait à toute forme de traditionalisme, sans renier la tradition culturelle dont il relève.
"Le traditionalisme, écrit-il en 1988, n'est pas la tradition: il est son oubli et en tant qu'oubli, il fixe l'ontologie à ce dogme : primauté d'un Etant (Dieu) immuable et éternel, invisible et absent. (...) Le traditionalisme se nourrit de la haine de la vie. Se dévorant lui-même et de siècle en siècle, il se renverse dans le monstrueux et la démonie".
Tout en étant fortement influencé par Nietzsche, chantre de la post-modernité, Khatibi a consacré une grande partie de ses travaux à la redécouverte du patrimoine culturel marocain et arabo-islamique. Il a ainsi beaucoup écrit sur l'art: Art calligraphique de l'islam, Gallimard, 2001, Du signe à l'image, Le tapis marocain, Lak international, 2001, Le corps oriental, Hazan, 2002àtout comme il a influencé bon nombre d'artistes, dont les peintres Bouchta Hayani et Aissa Ikken.
Ses textes sur l'art restent encore méconnus, peut-être parce que le côté essayiste de Khatibi a fini par faire de l'ombre à ses autres écrits. Cela étant, ses textes demeureront une intarissable mine de savoir, même s'ils n'ont jamais été "faciles à digérer ".
Philosophiques, profonds, parfois même acerbes, ses écrits sont tout sauf "clairs". La lecture de Khatibi est exigeante. Il s'agit, dit-on entre intellectuels, d'un maître à pensée dont l'œuvre s'adresse aux initiés.
Khatibi, lui-même, disait que celui qui demandait à un auteur d'être "clair", lui demandait, en fait, d'être comme lui. Revendiquer la "clarté " revenait à avouer avoir une relation difficile avec le texte en question.
.+Le jour d'après (encadré)+.
En guise d'hommage posthume à cette grande figure, la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc a organisé dans le cadre de ses rencontres mensuelles "vivement vendredi" une rencontre consacrée à la présentation d'une nouvelle parution à la mémoire du défunt.
"Khatibi, le jour d'après" est un recueil de dédicaces et de témoignage de ceux qui ont connu l'intellectuel. Vingt-deux personnalités de tous bords, dont les emblématiques Abdelfettah Kilitou et Thahr Benjelloune, ont répondu à l'appel de Assiya Lahbib qui a dirigé la publication. L'occasion de revenir sur l'œuvre et le parcours d'un homme hors paire.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.