Entre légitimité et inconstitutionnalité : les revendications de la Génération Z 212 en question    Elections au Maroc : Le mouvement GenZ 212 pourrait «remodeler» le débat politique    Commission nationale des investissements : 12 projets approuvés pour plus de 45 MMDH    Maroc - Allemagne : La BVMW inaugure son bureau à Rabat    Une ONG appelle Israël à poursuivre Aziz Rhali et les participants marocains à la flottille Sumud    GenZ 212 llama a la diáspora marroquí a manifestarse por derechos políticos y sociales    Between legitimacy and unconstitutionality : GenZ 212 demands in question    Partenariat agricole Maroc-UE : un nouvel accord confirme l'application des tarifs préférentiels aux provinces du Sud    Mondial U20 : le conte de fées se poursuit pour les Lionceaux    Placements à l'étranger : renversement spectaculaire des investissements de portefeuille    Souss-Massa : début de la labellisation des TPME touristiques    Réforme de la santé : la pilule ne passe pas au parlement    Salon : cinquièmes "Lettres du Maghreb", pour habiter et écrire le monde (VIDEO)    Rendez-vous : demandez l'agenda    Flottille pour Gaza : six marocains arrêtés par l'armée israélienne, dont Aziz Ghali    Aziz Akhannouch méprise les institutions, déserte ses charges, attise la colère populaire et son silence accentue le malaise général    L'Équipe salue l'éclat de Gessime Yassine, pépite marocaine du Mondial U20    Hamdallah retrouve la sélection via les locaux de Sektioui    Genk retient son souffle : Zakaria El Ouahdi blessé à l'épaule en Europa League    Iresen et GGGI concluent un accord sur l'hydrogène vert à Marrakech    Signature à Bruxelles de l'échange de lettres amendant l'accord agricole Maroc-UE    Bourse de Casablanca : clôture sur une note positive    Le prix du Velcade, un anticancéreux, bondit de plus de 50 % entre 2023 et 2025, aggravant l'injustice thérapeutique au Maroc    Le temps qu'il fera ce vendredi 3 octobre 2025    Les températures attendues ce vendredi 3 octobre 2025    Actes de violence et de vandalisme : les peines varient entre 10 et 30 ans de prison    Le Roi préside à Rabat une veillée religieuse en commémoration de la disparition de Feu le Roi Hassan II    Maroc... Quand la stabilité devient la véritable richesse    Témoignant de l'ouverture du Maroc aux questions mondiales... Mohamed Oujar participe au Congrès pour la Paix en Chine    Gestion de l'eau. La Sierra Leone rejoint la Convention des Nations Unies    Le Festival du cinéma méditerranéen à Tétouan rend hommage à : Nabil Ayouch, Aida Folch et Eyad Nassar    La police arrête trois personnes pour piratage informatique et sabotage de panneaux électroniques à Fkih Ben Salah    Botola D1 / J4 : Clasicos Saïss vs Casa en ouverture dès la fin de cet après-midi    Coupe du Monde 2026 : La FIFA dévoile le ballon officiel de la compétition « Trionda »    Manifestations au Maroc : L'ONU appelle à une enquête sur les violences meurtrières    Espagne : Un jeune marocain arrêté pour le meurtre d'un historien à Almería    L'ONU salue le rôle du Maroc dans le soutien au processus humanitaire visant à réduire les impacts des conflits armés    De la désinformation à l'infiltration : les multiples dimensions de la guerre électronique contre le Maroc    Mondial U20 : Nigeria et Afrique du Sud relancés ; Arabie Saoudite éliminée    Manifestations Gen Z : Le CNDH insiste sur le droit de rassemblement pacifique    Emeutes du mercredi : 354 blessés, 3 morts et forte implication des mineurs (Bilan du ministère de l'Intérieur)    Walid Regragui convoque 26 joueurs pour les matchs contre Bahreïn et le Congo    Espagne : Les députés pro-Polisario appellent Pedro Sanchez à voter contre le nouvel Maroc-UE    Street art : Fatima Ezzahra Khilad (Tima) fait voyager le vase de Safi à travers le monde [Portrait]    Salon du livre d'Oujda : ce qu'il faut savoir sur la prochaine édition (VIDEO)    La 27e édition de Jazz à Rabat clôturée avec succès    Jazz in Rabat 2025 wraps up with sold-out concerts and cross-cultural collaborations    Trois films marocains en lice aux rencontres cinématographiques de Cotonou    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Au paroxysme de la misère
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 23 - 04 - 2002

Saâdia a fui la misère de sa famille, elle est livrée à elle-même. Elle refuse de se faire exploiter par des familles pour se livrer à la prostitution. Elle tombe enceinte, accouche d'un enfant qui devient une entrave pour elle. Elle l'abandonne dans la rue.
Lundi 15 avril 2002. Dans l'après-midi. Aïn-Sebaâ, l'Allée des Cerisiers est calme et presque déserte. La majorité des habitants sont chez eux, en train de déjeuner ou s'apprêtent à sortir de chez eux, à destination de leur travail. «Attrape-la, attrape-la…ne la laisse pas s'enfuir !…», crie un jeune homme qui est lancé à la poursuite d'une jeune femme. Il appelle un autre jeune homme qui passe par hasard, loin de lui. Elle détale comme un lapin, sans se retourner. Son sac tombe à terre. Elle ne se retourne pas pour le récupérer. Les cinquante dirhams qu'il renferme ne lui importent plus. «Je dois sauver ma peau…», se dit-elle. Le deuxième jeune homme lui coupe le chemin, se jette sur elle, l'agrippe. Elle tente de s'échapper. Mais en vain. Le jeune la saisit comme un lion qui attrape une gazelle. Les badauds s'attroupent autour d'elle, l'empêchant de prendre la poudre d'escampette.
«Appelle la police !…appelle la police tout de suite !…», demande un homme à un jeune qui vient de voir ce qui se passe.
La jeune femme halète, tourne la tête à gauche et à droite, sanglote, ne sait quoi faire. Les badauds la traite de façon humiliante, chacun lui lance un mot abject, une insulte. Elle ne peut répondre. Elle leur demande d'être cléments avec elle. «Tu étais clémente avec ce petit enfant pour qu'on soit clément avec toi, sale p…?», lui lance l'un des badauds. Son nom est Saâdia. Elle n'a jamais connu un beau jour, comme elle le disait à quelques unes de ses amies. Elle a passé une enfance de misère avec ses neuf frères et sœurs. Aucun d'entre eux n'a jamais franchi le seuil d'une école. Parfois, sa famille n'avait pas de quoi préparer un verre de thé. Comment pouvait-elle alors financer les fournitures scolaires?. À son quinzième printemps, elle décide de fuir la misère, l'indigence de sa famille. « Une bouche en moins…», pensait-elle. Quelqu'un lui trouve un boulot chez une famille casablancaise ; elle devient une bonne à tout faire. «C'est mieux que de rester chez soi et de voir toute cette misère», se consolait-elle. Les jours passent, les corvées se poursuivent.
«Que te rapporte donc le travail chez les familles ?…Rien !…Ta situation n'a pas changé. Mais si tu «fréquentes» des gens tes poches se garniront d'argent…», lui explique une jeune fille qu'elle rencontre un jour de repos au parc de la Ligue Arabe, à Casablanca.
«Mais je suis encore vierge !», lui dit Saâdia.
«On l'a toutes été un jours, vierges…Mais à quoi bon d'être vierge si la virginité est assimilable à la misère ?…».
Saâdia accompagne la fille chez elle, laisse tomber ses employeurs, commence à apprendre les abc de la prostitution. D'un jour à l'autre, son amie l'abandonne. Saâdia est livrée à elle-même, elle ne peut plus supporter être exploité par des familles. Et la prostitution est un chemin plus sûr, plus facile pour gagner de quoi vivre. Elle erre dans les boulevards et les cafés casablancais, proposant sa «marchandise» ; le plaisir éphémère à un prix qui ne dépasse pas les cent dirhams. Une prostitution de misère. Analphabète, Saâdia est mal informée sexuellement. Elle tombe enceinte. «Quel destin !», se dit-elle. Comment peut-elle s'en sortir ? Saâdia recourt à l'utilisation d'herbes médicinales. Mais en vain. Neuf mois plus tard, elle est sur le point d'accoucher. Inutile de frapper aux portes des hôpitaux, la police et le tribunal étant au tournant. Elle gagne le mausolée Sidi Messaoud, à Had Ouled Fraj. Un bébé y verra le jour, en décembre 2001, sous sa coupole. Quatre mois plus tard, elle retourne à Casablanca, cherche à gagner sa vie et celle de son nouveau-né. Elle frappe à la première porte, à la deuxième, à la troisième…et toujours la même réponse : « Tu as un enfant ?…Non, non, on veut une bonne sans enfant…». Son nouveau-né devient une entrave à ses activités de vendeuse de plaisir et de bonne à tout faire. «Je dois m'en débarrasser…», se dit-elle. Et il est dur, pénible, qu'une mère en arrive à penser à se débarrasser de son enfant.
Lundi 15 avril était le jour J pour elle. Elle enveloppe son nouveau-né dans un drap, lui met la tétine du biberon dans sa petite bouche, regagne l'Allée des Cerisiers. Son cœur bat la chamade. Elle scrute du regard les alentours et pose son bambin près d'une maison. Mais un passant se rend compte de son acte.
Elle a été arrêtée, mise entre les mains de la police judiciaire de Hay Mohammadi-Aïn Sebaâ. «Quel est le prénom de ton fils ?», lui demande le chef de la PJ. Saâdia n'a pas trouvé de réponse, elle ne lui a pas donné un prénom. Il est encore X ben X comme un cadavre qui n'a pas encore été identifié. Faut-il incriminer Saâdia, qui se sent victime à plus d'un titre ?; d'abord d'une famille qui est incapable de subvenir à ses besoins, et enfin, d'une société qui l'a condamnée sans appel et sans circonstances atténuantes non plus ?


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.